Magazine Société

"Caritas in veritate", l'encyclique sur le développement intégral de Benoît XVI

Publié le 12 juillet 2009 par Francisrichard @francisrichard
Le 29 juin dernier, en la fête des saints Apôtres Pierre et Paul, Benoît XVI (photo tirée du site de Challenges ici ) signait sa troisième encyclique, Caritas in veritate (ici), L'amour dans la vérité, consacrée au développement humain intégral dans la charité et dans la vérité. Elle était rendue publique le 7 juillet 2009. 

Nombre de commentateurs de cette encyclique de Benoît XVI ont surtout retenu l'urgence, selon le Saint Père, de mettre en place
une véritable Autorité politique mondiale. Ainsi, dans Le Temps du 7 juillet 2009 (ici), Patricia Briel indique-t-elle l'objet d'une telle mise en place :

Pour le gouvernement de l’économie mondiale, pour assainir les économies frappées par la crise, pour prévenir son aggravation et de plus grands déséquilibres, pour procéder à un souhaitable désarmement intégral, pour arriver à la sécurité alimentaire et à la paix, pour assurer la protection de l’environnement et pour réguler les flux migratoires.

Elle omet cependant - et c'est essentiel - de parler de ce qui doit inspirer une telle Autorité. Je cite le Pape :

Une telle Autorité devra être réglée par le droit, se conformer de manière cohérente aux principes de subsidiarité et de solidarité, être ordonnée à la réalisation du bien commun, s'engager pour la promotion d'un authentique développement humain intégral qui s'inspire des valeurs de l'amour et de la vérité.[paragraphe 67]

Il est intéressant de savoir ce qu'entend Benoît XVI par développement humain intégral :

Le développement authentique de l'homme concerne unitairement la totalité de la personne dans chacune de ses dimensions. [paragraphe 11]
Benoît XVI précise plus loin ce qu'il faut entendre par là :

Un tel développement demande (...) une vision transcendante de la personne; il a besoin de Dieu : sans Lui, le développement est nié ou confié aux seules mains de l'homme, qui s'expose à la présomption de se sauver lui-même et finit par promouvoir un développement déshumanisé. [paragraphe 11]

Pour le catholique, national et libéral, que je suis, il est réconfortant de lire
- que le Pape justifie le développement par la confiance que l'homme doit placer en Dieu : 
L'idée d'un monde sans développement traduit une défiance à l'égard de l'homme et de Dieu. (...) Absolutiser le progrès technique ou aspirer à l'utopie d'une humanité revenue à son état premier de nature sont deux manières opposées de séparer le progrès de son évaluation morale et donc de notre responsabilité. [paragraphe 14]

- que le Pape n'envisage pas de développement sans liberté ni responsabilité, qui lui est intrinséquement liée :
Le développement ne peut être intégralement humain que s'il est libre; seul un régime de liberté responsable lui permet de se développer de façon juste. [paragraphe 18] 

- que le Pape dénonce l'éclectisme culturel qui considère que toutes les cultures sont substantiellement équivalentes et interchangeables entre elles :

Cela favorise un glissement vers un relativisme culturel qui n'encourage pas le vrai dialogue interculturel; sur le plan social, le relativisme culturel conduit effectivement les groupes culturels à se rapprocher et à coexister, mais sans dialogue authentique et donc, sans véritable intégration. [paragraphe 26]

- que le Pape dénonce le nivellement culturel et l'uniformisation des comportements et des styles de vie :
De cette manière, la signification profonde de la culture des différentes nations, des traditions des divers peuples, à l'intérieur desquelles la personne affronte les questions fondamentales de l'existence en vient à disparaître. [paragraphe 26]

- que le Pape, comme son prédécesseur, Jean-Paul II, s'oppose à la culture de mort :
Quand une société s'oriente vers le refus et la suppression de la vie, elle finit par ne plus trouver les motivations et les énergies nécessaires pour oeuvrer au service du vrai bien de l'homme. [paragraphe 28]

- que le Pape condamne aussi bien le fondamentalisme religieux que la promotion de l'indifférence religieuse ou de l'athéisme :
Dieu est le garant du véritable développement de l'homme, dans la mesure où, l'ayant créé à son image, Il en fonde aussi la dignité transcendante et alimente en lui la soif d'"être plus". [paragraphe 29]

- que le Pape condamne le protectionnisme qui empêche les produits des pays pauvres d'entrer sur les marchés des pays économiquement développés et qu'il reconnaît les bienfaits de la mondialisation, à ne pas confondre avec le mondialisme :
(Ce processus d'interdépendance planétaire) a été le principal moteur pour que des régions entières sortent du sous-développement et il représente en soi une grande opportunité. [paragraphe 33]

- que le Pape ne rejette pas le marché que tous les véritables libéraux savent ne pas exister à l'état pur :

Lorsqu'il est fondé sur une confiance réciproque et générale, le marché est l'institution économique qui permet aux personnes de se rencontrer, en tant qu'agents économiques, utilisant le contrat pour régler leurs relations et échangeant des biens et des services fongibles entre eux pour satisfaire leurs besoins et leurs désirs. [paragraphe 35]

- que le Pape sait bien que cet instrument peut être mal utilisé et qu'alors :
Ce n'est pas l'instrument qui doit être mis en cause mais l'homme, sa conscience morale et sa responsabilité personnelle et sociale. [paragraphe 35]

- que le Pape rappelle que Jean-Paul II, dans Centesimus Annus :
Avait relevé la nécessité d'un système impliquant trois sujets : le marché, l'Etat et la société civile. Il avait identifié la société civile comme le cadre le plus approprié pour une économie de la gratuité et de la fraternité, mais il ne voulait pas l'exclure des deux autres domaines. [paragraphe 38]

- que le Pape, pour parvenir à cette économie de la gratuité, déclare :
A côté de l'entreprise privée tournée vers le profit, et des divers types d'entreprises publiques, il est opportun que les organisations productrices qui poursuivent des buts mutualistes et sociaux puissent s'implanter et se développer. [paragraphe 38]

- que le Pape s'oppose au malthusianisme :
Il y a de la place pour tous sur la terre: la famille humaine tout entière doit y trouver les ressources nécessaires pour vivre correctement grâce à la nature elle-même, don de Dieu à ses enfants, et par l'effort de son travail et de sa créativité. [paragraphe 50]

- que le Pape invite à une véritable communion des hommes, sous le regard de Dieu :
La créature humaine, qui est de nature spirituelle, se réalise dans les relations interpersonnelles (...) Ce n'est pas en s'isolant que l'homme se valorise lui-même, mais en se mettant en relation avec les autres et avec Dieu.(...) L'unité de la famille humaine n'abolit pas en elle les personnes, les peuples et les cultures, mais elle les rend plus transparents les uns aux autres, plus unis dans leurs légitimes diversités. [paragraphe 53] 
La vérité unit les esprits entre eux et les fait penser à l'unisson, en les attirant et les unissant en elle. [paragraphe 54]

C'est en ce sens que je fais mienne la phrase de Jean-Louis Kuffer, que l'on peut trouver dans son dernier livre (voir mon article "Riches Heures", de Jean-Louis Kuffer ) :
Bien plus que la différence, dont on nous rebat les oreilles et qui signifie peu de choses à mes yeux, c’est la ressemblance qui m’importe en cela qu’elle surmonte les particularismes raciaux, sociaux ou sexuels au bénéfice de valeurs plus fondamentales.

Je terminerai par une citation de Benoît XVI sur les relations entre foi et raison, qui est une ses grandes préoccupations et qui était celle de son désormais fameux discours de Ratisbonne :
Ce n'est pas un hasard si la fermeture à la transcendance se heurte à la difficulté de comprendre comment du néant a pu jaillir l'être et comment du hasard est née l'intelligence. Face à ces problèmes dramatique, la raison et la foi s'aident réciproquement. Attirée par l'agir technique pur, la raison sans la foi est destinée à se perdre dans l'illusion de sa toute-puissance. La foi, sans la raison, risque de devenir étrangère à la vie concrète des hommes.

Francis Richard

L'encyclique de Benoît XVI présentée en ... 1 mn 23 sur YouTube :



Retour à La Une de Logo Paperblog

A propos de l’auteur


Francisrichard 12008 partages Voir son profil
Voir son blog

Magazine