Pendant la crise, le rugby français délocalise.

Le rugby Français est, comme toutes les activités économiques (professionnalisme oblige), touché par la crise. Les budgets sont resserrés, faute de sponsors accomodant, les suppporters grincent des dents devant les hausses du prix des abonnements...

Aussi, entendre parler de délocalisations dans la bouche des dirigeants de clubs du Top14 conduit à s'interroger. Délocalisation, conséquence de la crise ?

On répondra plutôt conséquence "des" crises : crise économique qui conduit à chercher par tout moyen des recettes supplémentaires. Et crise de croissance, qui amène dans les stades un public chaque année plus nombreux. Et quand on sait que la capacité moyenne d'une enceinte rugbystique de l'élite dépasse rarement les 12 à 15000 spectateurs, on peut trouver légitime l'envie des président d'aller, de temps en temps, voir si l'herbe est plus verte ailleurs.

Pour autant, le paris peut être risqué. Si des clubs comme le Stade Français ou son homologue Toulousain peuvent trouver à proximité de leurs enceintes habituelles des stades de plusieurs dizaines de milliers de places, il n'en est pas de même pour un grand nombre d'entre-eux. Ainsi, Biarritz envisage de disputer des matches à Saint-Sébastien, de l'autre côté de la frontière, à quelques cinquante kilomètres. Pour Toulon, la solution marseillaise et son Vélodrome se trouve à soixante-cinq kilomètres.

Pas sûr que les supporters s'y retrouvent forcément. Sans parler du trésorier du club qui fournira des transports (autocars) ou des billets à tarifs préférentiels pris en charge par le club. C'est pourquoi la délocalisation n'est pas forcément un remède miracle aux petits soucis budgétaires.

Le choix de délocaliser doit donc être mûrement réfléchi. Ainsi, ce n'est pas un hasard si Biarritz a décidé de miser sur un derby BO - Aviron pour disputer un rencontre du Top14 à Anoeta. Pour être sûr de faire le plein des 32000 places de l'enceinte basque espagnole, le président Blanco table en effet sur l'engouement des supporters de l'Aviron. A cet égard, il n'est pas certain que les rouge-et-blanc jouent à domicile...

C'est d'ailleurs l'autre revers de la médaille. En délocalisant un match, le club prend le risque de perdre l'avantage du terrain, dont on sait qu'il revêt une importance toute particulière en rugby. D'autant que pour assurer le remplissage du stade, on choisit évidemment une affiche. Et perdre des points face à un gros, c'est à dire un concurrent direct aux quarts, n'est pas forcément un affaire au plan comptable.

Pour quelques clubs, l'enjeu des délocalisations est très important sur un plan économique "immédiat" en apportant des recettes. pour d'autres, il est le moyen d'amener un public à ce sport et, partant, des sponsors.

Pour la fédération et la Ligue, ces opérations sont tout bénéfice, puisqu'elles illustrent la vitalité du rugby français.

Des supporters commencent à faire connaître leur mécontentement. Par esprit de clocher ? Pas forcément. Quand on travaille la semaine, il n'est pas très agréable d'être obligé de faire des kilomètres supplémentaires pour aller encourager son équipe. Qui plus est, l'esprit de cloche, qui règne encore - et c'est tant mieux sous certains aspects - dans l'ovalie française, s'accomode assez mal de ces grands messes qui ressemblent davantage à des opérations promotionnelles avec karaoké géant qu'à des matches de rugby.

On n'est pas contre ces délocalisations, loin s'en faut. Mais il serait dommage , de notre point de vue, que cela devienne systématique.