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Fragments pour la mort au théâtre

Publié le 19 juin 2009 par Achigan
Théâtre vide. En scène un acteur
Qui meurt selon les règles de l'art
Le poignard dans la nuque. L'ardeur retombée
Un dernier solo, pour quêter les bravos.
Et pas une main. Dans une loge, vide
Comme le théâtre, un habit oublié.
La soie chuchote ce que l'acteur crie.
La soie se colore de rouge, l'habit s'alourdit
Du sang de l'acteur qui dans la mort s'enfuit.
Sous l'éclat des lustres, qui fait blêmir la scène
L'habit oublié boit et vide les veines
Du mourant, qui ne ressemble plus qu'à lui-même
PLus de joie ni d'effroi de la métamorphose
Son sang une tache de couleur sans retour.
HEINER MULLER
ROI : Assassiné ! Dévoré !
FILS : Père, vous êtes mort !
ROI: Anéanti par une griffe noire et des canines tranchantes.
FILS : Comment ? Qui vous a pris la vie ?
ROI : Impossible de dire, mon fils, je demeure les lèvres cachetées par les sortilèges.
FILS : Apparition, fantôme, vampire nocturne, comment savoir si vous êtes bel et bien César ? Les ombres me filent, me coulent dans les veines et veulent ma peau. Je deviens fou !
ROI : Je suis bel et bien César, divin prince. Demi-mort, soit. Empereur de sang maculé, déjection de la nuit, me voici dans ma toute nouvelle apparence royale. Bloody Ceasar apparaît devant tes yeux qui sont des coquilles de doute. Mon fils, je n'en ai pas fini avec la vie. Je m'éveillais tout juste de mon long sommeil, de ma léthargie dans laquelle j'étais plongée toute la vie, quand on m'a tué. Le départ est annulé, je reste, quoique que cette pouffiasse ravagée et spectrale en pense. C'est une pauvre idiote. Je lui ai filé entre les pattes !
FILS: Vous avez échappé à la mort !
ROI: Échappé, non ! J'ai bel et bien été tué. Je suis tout mort, tout exsangue. Regarde mes trous. Je suis une outre vide. Mais je ne suis pas encore rangé, on ne m'a pas encore plié dans le catalogue. Et on ne m'y mettra pas. Je m'y refuse, pas maintenant, pas lorsque j'ai dormi si longtemps et que je me réveille. Je n'ai que faire de la mort ! J'ai tant de choses à te dire à présent, mon fils.
FILS : Parlez mon père, dites tout ce que vous savez. Pouvez-vous me sortir de mon sommeil, de ma peine qui ne finit jamais de me couler par les joues ?
ROI : Dévoré ! Assassiné par le fleuron, la coupe d'or, le blason de mon éternité. Arrgh ! Ça y est, j'en pâlis déjà. Impossible de dire.
...

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