Magazine Finances

La souplesse de l’économie britannique

Publié le 02 octobre 2007 par Argoul

What about UK? OECD is just publishing a report on the UK economy and that must be interesting for us, French. The UK seems much more pragmatic for negotiation and work specialisation in globalization. Government spending is not enough in the UK, especially for education and nursing, infrastructures are not sufficient, but the country is restored compared to ten years ago. We, French, have to learn about it.

Il est bien entendu que le Royaume-Uni n’est pas la France. Ni en terme de territoire (réduit et allongé d’un côté, vaste et géométrique de l’autre), ni en terme de population (plus diversifiée en France), ni en terme de culture (l’histoire des deux pays diffère, notamment parce que le Royaume-Uni est une île, orientée vers le grand large). Mais France comme Royaume-Uni sont proches, si l’on raisonne global. Toutes deux puissances moyennes, toutes deux ayant un passé (donc un siège au Conseil de Sécurité), toutes deux européennes et parlementaires (l’une plus que l’autre, mais ayant inventé simultanément les institutions modernes).

Reste que le monde change, à grande vitesse, et que l’aptitude à en prendre le train fait toute la différence. La France, depuis 15 ou 20 ans, a subi le règne des « rois fainéants » tandis qu’à l’inverse, le Royaume-Uni était réformé en douceur par une néo-gauche pragmatique. Et cela finit par se voir.

L’OCDE vient de publier, en septembre, son étude économique sur le Royaume-Uni. On peut dire tout ce que l’on veut sur ce genre d’organisme international, technocratique et langue de bois. Mais ceux qui y travaillent sont, comme les fonctionnaires français, diplômés, sélectionnés et compétents. Leur langage, qui peut agacer, est celui de la « neutralité administrative », même s’il n’exclut nullement l’idéologie dominante à la mode. L’important est l’ensemble, pas le détail, et nul agacement ne peut invalider le raisonnement dû à l’analyse. En bref, et parce que la mondialisation a pris son essor brutalement, la pragmatique Albion a mieux réussi à s’en sortir que les rigides arrogants dont nous donnons l’image. « Le PIB par habitant britannique est désormais le troisième du G7 (derrière les États-Unis et le Canada), alors qu’il fermait la marche il y a dix ans. Il a aussi amélioré son classement au sein de la zone OCDE. »

Pourquoi cela ? Parce que, au contraire des Français, les Britanniques ont accueilli la mondialisation comme une donnée de fait et qu’ils s’y sont adaptés : « En témoignent son soutien au libre-échange, son ouverture à l’investissement direct étranger, la volonté d’ouvrir les marchés du travail aux ressortissants des États qui ont rejoint l’Union européenne en mai 2004, l’adoption de politiques de la réglementation prônant l’efficience, ainsi qu’un cadre d’action macroéconomique qui a renforcé la capacité d’adaptation de l’économie. »

Comment cela fut-il possible ? Parce que – point crucial ! – « Cette propension à s’emparer des possibilités offertes par la mondialisation bénéficie le plus souvent d’un large soutien chez les principaux protagonistes que sont notamment la classe politique, les dirigeants syndicaux et les employeurs. » On est bien loin des rêveries utopiques d’un « autre monde » de la gôch-de-la gôch comme du ressentiment impuissant du « tous pourris » de la plupart des syndicats. Il faut dire aussi que la représentativité syndicale au Royaume-Uni est bien plus grande qu’elle ne l’est en France… où c’est l’Administration qui décide souverainement « qui » est représentatif ou pas.

Les avantages de la souplesse anglaise :

• « une forte immigration a contribué à modérer les tensions des marchés du travail (…) en comblant les insuffisances de main-d’œuvre qualifiée et en empêchant l’apparition de goulots d’étranglement sur les marchés du travail. »
• « Choix délibéré, l’augmentation des dépenses était motivée par le souhait d’améliorer certains services publics, dont notamment la santé et l’éducation. »
• Des négociations sociales adultes : « En 2005, les autorités ont renégocié la mesure prévoyant de relever de 60 à 65 ans, à compter de 2013, l’âge normal du départ à la retraite des agents du secteur public alors en activité, en échange de l’engagement des syndicats d’entériner d’autres réformes des régimes de retraite visant à compenser exactement le coût du maintien de l’âge actuel de départ. »
• « L’ouverture aux échanges a favorisé la concurrence et le redéploiement de ressources économiques vers les secteurs dans lesquels le Royaume-Uni détient un avantage comparatif. Du coup, la part du secteur manufacturier dans la production totale a diminué au profit des services à forte intensité de savoir et des autres services rendus aux entreprises. Le Royaume-Uni est donc peu touché par la concurrence frontale des marchés émergents. »
• « le niveau de vie a ( …) profité de la progression des termes de l’échange, car le Royaume-Uni a eu tendance à importer les produits dont les prix ont le plus chuté, tout en étant l’un des premiers exportateurs de services, dont les prix montent. »
• « Le Royaume-Uni jouissant par ailleurs d’une quasi-autonomie pétrolière, ses termes de l’échange n’ont guère pâti de la hausse des cours mondiaux du pétrole. »
• « Par rapport à la majorité des autres pays de l’OCDE, le Royaume-Uni compte un nombre relativement faible de réglementations introduisant des distorsions sur le marché du travail. En conséquence, la mobilité professionnelle entre secteurs similaires est plutôt élevée ».
• « Le marché du travail britannique est aussi plus efficace que les marchés des grands voisins européens du point de vue de la réinsertion des chômeurs » (de 8 % en 1996 à 4.5% en 2004, 5.5% aujourd’hui).
• « La performance de l’innovation a été fortement stimulée par la mise en place de crédits d’impôt pour recherche-développement ». (Heureusement, nous venons de copier).
• « La mondialisation confronte deux besoins : celui de consacrer des dépenses à des filets de protection sociale et celui, potentiellement néfaste aux recettes, de maintenir la compétitivité fiscale. Cette confrontation a incité les pouvoirs publics à renforcer l’efficience de la fiscalité des entreprises en abaissant les taux légaux d’imposition des sociétés et en élargissant la base d’imposition. Les deux mesures se compensant, les recettes fiscales tirées des entreprises se sont maintenues en pourcentage du PIB. »

Il reste des points noirs :

• Bien-sûr les tensions sociales et ethniques dues à l’immigration et au multiculturalisme à l’anglaise (l’OCDE ne l’évoque point).
• Une Banque Centrale locale qui fait varier les taux d’intérêt plus vite que la BCE, et la pratique des emprunts à taux variables dont le danger vient d’être montré aux Etats-Unis. « Un tel ralentissement (économique), accompagné d’une rentabilité moindre des activités de la City, pourrait aussi diminuer les recettes fiscales et entraîner une hausse du déficit budgétaire, qui reste assez élevé par rapport aux autres pays. »
• Le coût du logement.
• « Le déficit de l’État a reculé, passant de 3.4 % du PIB en 2003 à 2.7 % au cours des 12 mois menant à mars 2007, mais le déséquilibre budgétaire, corrigé des variations saisonnières, reste substantiel et nettement plus élevé que dans la majorité des autres pays de l’OCDE. »
• « La performance éducative de la population britannique reste cependant inférieure à la norme des pays de l’OCDE les plus performants. » Or, « Les investissements dans le capital humain de la jeunesse constituent probablement le levier le plus important pour accélérer la croissance tendancielle de la productivité ». Malgré une amélioration, « les disparités socio-économiques globales restent importantes. Peut-être ce résultat s’explique-t-il par le fait que les autorités locales et les écoles ne distribuent pas les crédits conformément aux intentions des autorités centrales, et produisent ainsi des inégalités. » Ce sont aussi les dangers d’une trop forte décentralisation…
• Inégalités croissantes, à compenser par la redistribution : « Comme dans de nombreux autres pays de l’OCDE, les salaires les plus élevés ont augmenté beaucoup plus vite que les autres. Les salariés concernés semblent être ceux qui tirent le meilleur parti de la mondialisation. »
• « D’un côté, le système prélèvements-prestations du Royaume-Uni est parvenu, pour la majorité des individus concernés, à réduire au maximum les trappes à chômage. Mais le niveau élevé des frais de garde des enfants continue de faire peser un fort prélèvement fiscal implicite sur le deuxième apporteur de revenu. »
• « Après bien des années de sous-investissement dans les infrastructures de transport, celles-ci ont été mieux loties récemment, mais ces apports semblent encore insuffisants. »

Alors, le Paradis au Royaume-Uni ? Non, mais un pays adulte, qui sait accompagner le changement. Il est toujours intéressant d’aller voir ce qui se passe ailleurs, au lieu de rester à ronronner entre soi.


Retour à La Une de Logo Paperblog

A propos de l’auteur


Argoul 1120 partages Voir son profil
Voir son blog

l'auteur n'a pas encore renseigné son compte l'auteur n'a pas encore renseigné son compte

Magazine