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Brèves : le plus dur de la crise est encore devant nous (bis repetitam)

Publié le 19 juillet 2009 par Objectifliberte

chute libre Je sais, j'abuse, avec mon pessimisme récurrent. Et en plus, je plombe vos vacances. Que cela ne vous empêche pas d'en profiter ! Pour les bonnes nouvelles, rendez vous en 2011. Au menu du jour: la SFEF (la quoi ? ), la Pennsylvanie, le Japon, le monde entier, un cygne noir qui pense comme moi, et la fusion-acquisition du siècle !

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La SFEF : notre mini Fannie Mae finalement sortie du bilan de l'Etat !

La SFEF, "Société de Financement de l'Economie Française", est une structure mixte créée en catastrophe à la fin de l'année 2008 pour, selon le gouvernement, apporter des liquidités aux banques pour qu'elles financent l'économie.

La SFEF émet une dette garantie par l'état et reprête aux entreprises avec une ressource moins coûteuse que s'il avait fallu emprunter sans la garantie publique. Cela ne vous rappelle rien ? Mais oui, Fannie Mae et Freddie Mac fonctionnaient comme cela, même si la destination des prêts n'était pas la même ! 

De fait, les ratios financiers de la SFEF laissent songeurs:

Le machin n'a pas de site web officiel -- la transparence, c'est dépassé -- on sait donc simplement grâce aux échos que  7 grandes banques françaises en détiennent 66% (quoique HSBC soit dans la liste, mais passons), et l'état 34%. Selon les échos toujours, la SFEF aurait 50 millions de capital (source) et aurait émis pour... 75 milliards de dette, soit 4% du PIB. Je répète, on ne rêve pas: 50 Millions de fonds propres, 75 milliards d'émissions... 

Avec un bilan aussi fragile, la probabilité de devoir faire jouer la garantie de l'état si la conjoncture met beaucoup d'emprunteurs en défaut est forte, et logiquement, la dette de la SFEF devrait être comptée comme une dette publique et non comme une caution hors bilan. Mais l'état ne veut surtout pas que le chiffre officiel de sa dette ne soit impacté par la SFEF. Il va donc contraindre les banques à reprendre ses 34%, ce qui les forcera à recapitaliser massivement le "machin", ou, par un artifice comptable légal déjà dénoncé ici, avoir recours à de la dette subordonnée, plus coûteuse, pour renforcer leurs "pseudo fonds propres" TIER2.

Et ainsi, Bercy a obtenu que la dette de la SFEF soit ôtée des comptes publics. Je serai curieux de connaître tous les engagements hors bilan de l'état (et pas uniquement les retraites publiques du rapport Pébereau): SFEF, CNAVTS, entreprises publiques, CDC...

La seule "bonne" nouvelle est que les émissions de la SFEF seraient gelées au 31 décembre: si cela se confirme, la SFEF verra alors le total de ses engagements se réduire année après année. Juste un tout petit Freddie Mac, donc...

Il n'en reste pas moins qu'il s'agit d'une opération de camouflage comptable, et d'un dispositif de privatisation de larges profits pour les banques bénéficiaires, et de nationalisation des pertes si d'aventure le coût artificiellement bas de la ressource leur a fait consentir des prêts de qualité trop médiocre, ce qui s'est passé avec Fannie et Freddie... Des dispositions législatives fortes devraient être prises pour empêcher l'état de jouer ainsi avec la caution du contribuable.

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Philadelphia Blues

L'état de Pennsylvanie suspend la paie de ses 69 000 fonctionnaires sine die jusqu'à ce qu'un accord budgétaire soit trouvé au niveau du parlement local.

Après la Californie, ça commence à faire désordre.

Et de nombreux états ne seraient pas en meilleure posture.

Observons bien ce qui s'y passe. La même situation pourrait se produire chez nous.

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Le Japon : situation explosive

John Mauldin a émis une analyse absolument fascinante de la situation japonaise, et prévoit de très graves ennuis dans les deux à trois ans pour l'empire du Soleil Levant. Avec comme perspective, après 20 ans de déflation combattue (à tort) par l'endettement et le Quantitative Easing, une situation soit de faillite brutale, soit d'hyper-inflation à la zimbabwéenne :

Japan’s population is shrinking, and the number of workers per retiree is rising. Japan has the highest ratio of debt to GDP in the developed world. And that debt is growing by 7-8% a year, and does not include local debt. Interest rates cannot go lower. Savings are falling rapidly and will not be able to cover the need for new debt issuance, by a long shot. Within a few years, because of the aging of the population, savings will go negative. Social security payments are rising. GDP is shrinking, and export trade is off about 30-40%, depending on the industry. Machine tools are down 80%!

If rates were to go up by 1%, let alone 2%, over time Japan’s percentage of tax revenue dedicated to interest payments would double to 18% and then to 40% and then just keep going up. It is conceivable that it will take 100% of tax revenues in less than ten years, at the current trajectory. Why? Because Japan is going to have to start to compete with the rest of the world to sell its bonds. Who but the Japanese would buy a Japanese bond at 1.3%? From a country that is rapidly going to 200% of debt-to-GDP? Doesn’t really seem like a smart trade to me. And as the data shows, the ability of the Japanese consumer to buy more debt is rapidly waning.

The Japanese government is coming to a crossroads with no good exits. Cut the budget drastically in the face of a deflationary recession? Monetize the debt and let the yen go the way of all fiat currencies? Can someone say Zimbabwe? Increase already high taxes in a very weak economy?

Le vieillissement du japon va transformer le principal acheteur de dette de l'empire, le système de retraite, en vendeur nette de dette, et ce dans un pays ou la dette de l'état, hors collectivités, atteint 170% du PIB.

La seule question est de savoir qui, des USA, de l'Europe, ou du Japon, va sauter en premier...

Le surendettement est une impasse aussi pour les états. Il n'y a que les pseudo-économistes qui conseillent les états pour croire le contraire.

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La compétition pour l'épargne mondiale rend les défauts d'états ou l'hyperinflation inévitables

Dans la même chronique, Mauldin fait le point sur les disponibilités mondiales en terme d'épargne et considère que la probabilité est forte pour que celle ci soit insuffisante pour financer les émissions de nouvelle dette de tous les états, qui représenteront en 2009... 9% du PIB mondial. Et ce dans un contexte de deleveraging massif des institutions financières habituellement prêteuses.

Le graphique suivant se passerait presque de commentaires :

Brèves : le plus dur de la crise est encore devant nous (bis repetitam)

Je cite une fois encore l'auteur:

Bottom line? There is simply not enough available capital under current conditions to do it all. Something has to give. More household savings? More foreign investment (flight to safety, as the rest of the world looks even  worse)? Reduced corporate borrowing and thus less GDP growth? Higher rates to attract more foreign and US investment?

The combinations are infinite, but none of them bode well. Increased household savings means less consumer spending. To attract more foreign investment (in the amounts that will be needed) will mean higher rates. And this is 2009. What happens in 2010? And 2011?

Donc le risque est grand que la fabrication artificielle de monnaie apparaisse comme la seule "solution" évitant la faillite formelle des états incapables d'emprunter.

Comme je l'ai déjà dit, la fin de l'année risque d'être chaude. Et si par miracle la corde tient jusque là, on voit mal 2010 se passer en douceur.

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Et en plus, la contagion...

Susan Trimbath, professeur et PDG d'un gros fond d'investissement, partage le sentiment de John Mauldin sur l'insoutenabilité de la somme des dettes publiques dans le monde. Elle pense que des défauts souverains sont inévitables, en commençant par de petits pays.
Mais selon elle, le développement des "credit default swaps" sur ces dettes publiques rendra la moindre faillite d'état potentiellement dangereuse pour l'ensemble du système. Selon elle, en outre, ces faillites provoqueront des troubles à l'ordre public d'une ampleur inusitée. Au vu des réactions des calmes islandais à la failite de leur système bancaire, on ne peut que se demander ce que donnerait la faillite de la Grèce, du Portugal, de l'Italie... et de la France. 

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Que faudrait il faire, si tant est qu'il ne soit pas trop tard ?

Nassim Nicholas Taleb, auteur à succès de "Black swann", et fondateur d'un fond d'investissement, estime, avec son associé Mark Spitznagel, que seul un Deleveraging systématique de la société par l'application systématiques d'échanges "dette contre capital" est le seul moyen de se sortir de la spirale infernale qui est la notre. Modestement, c'est également la solution dont je me faisais l'avocat dans l'AGEFI au mois d'avril. Simplement, alors que je la limitais aux faillites bancaires, Taleb étend son application aux emprunteurs acheteurs de maison en situation de faillite personnelle. Extrait de l'article de Taleb:

We believe that stimulus packages, in all their forms, make the same mistakes that got us here. They will lead to extreme overshooting or extreme undershooting. They lead to more borrowing, by socialising private debt. But running a government deficit is dangerous, as it is vulnerable to errors in projections of economic growth. These errors will be larger in the future, so central bank money creation will lead not to inflation but to hyper-inflation, as the system is set for bigger deviations than ever before.

(...)

Monetary policy has always been dangerous. Alan Greenspan, former Federal Reserve chairman, tried playing with the business cycle to iron out bubbles, but it eventually got completely out of control. Bubbles and fads are part of cultural life. We need to do the opposite to what Mr Greenspan did: make the economy’s structure more robust to bubbles.

The only solution is to transform debt into equity across all sectors, in an organised and systematic way. Instead of sending hate mail to near-insolvent homeowners, banks should reach out to borrowers and offer lower interest payments in exchange for equity. Instead of debt becoming “binary” – in default or not – it could take smoothly-varying prices and banks would not need to wait for foreclosures to take action. Banks would turn from “hopers”, hiding risks from themselves, into agents more engaged in economic activity. Hidden risks become visible; hopers become doers.

(...)

We need an aggressive, systematic debt-for-equity conversion. We cannot afford to wait a day.

En France, en cas de grosse faillite bancaire, aucun mécanisme de la sorte, capable d'être appliqué rapidement, n'existe. On s'en remettra benoîtement à "la garantie de l'état", qui n'a de toute façon plus d'argent pour l'assumer. 

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L'OPA du siècle : Goldman Sachs en pourparlers pour racheter le trésor américain !

Quoi, on ne peut même plus rigoler ? Extrait du "Borowitz report", dont je recommande la lecture régulière contre l'anxiété:

Goldman Sachs confirmed today that it was in talks to acquire the U.S. Department of the Treasury.

According to Goldman spokesperson Jonathan Hestron, the merger between Goldman and the Treasury Department is "a good fit" because "they're in the business of printing money and so are we."

(...)Mr. Hestron said the only challenge facing Goldman in completing the merger "is trying to figure out which parts of the Treasury Dept. we don't already own."

Ceci dit, Andy Borowitz n'est pas si loin de la vérité : les interconnections entre Goldman Sachs et le gouvernement sont tellement nombreuses qu'un ancien adjoint au secrétaire au trésor, Paul Craig Roberts, a estimé publiquement que Tim Geithner, actuel secrétaire en question, "travaille pour Goldman Sachs". Et la Waxman Markey Bill, déjà évoqué ici, pourrait bien être en fait le "Goldman Sachs Bill".

Avis aux lecteurs: J'attends toujours un bon équivalent français pour l'expression "crony capitalism".

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That's all folks !

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