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Une très belle critique de Michel Bonnet sur le joueur d'échecs de Stefan Zweig

Publié le 06 août 2009 par Yves4
L'été c'est fait pour lire, oui, mais c'est aussi un temps de jeu ! Alors quoi de plus naturel que de trouver, lire et vous conseiller un petit livre consacré au jeu, « Le joueur d'échecs » de Stefan Zweig. Autre avantage de cet ouvrage, il existe en version poche ce qui ne mettra pas en péril votre budget estival...

Premier constat : si le jeu d'échecs est un jeu dont les parties peuvent sembler longues, la nouvelle de Zweig est courte et se lit d'un seul élan. D'ailleurs, dès que vous êtes sur le bateau New-York Buenos Aires en compagnie du narrateur, vous ne pouvez plus fermer le livre. C'est comme ça, il faut le savoir et, heureusement, il est court, seulement une centaine de pages...

A bord, un homme est là incognito... C'est le champion du monde d'échec, un certain Czentovic. Pris au piège du jeu, le voilà en train de jouer contre les gentlemen qui voyagent. C'est un amusement, d'ailleurs, il joue plusieurs parties à la fois... C'est l'attraction du voyage... Un autre homme est là, dans l'ombre, lui aussi perdu dans l'anonymat total, il sera d'ailleurs nommé simplement par ses initiales, MB. Au cours d'une partie, il se laisse aller à donner un ou deux conseils aux joueurs prétentieux qui voulaient affronter Czentovic... et les conseils portent leurs fruits... Tout le monde le croit grand joueur et voilà que se prépare un match « officiel » entre MB et le champion du monde... MB hésite, dit qu'il n'a pas joué depuis longtemps... Rien n'y fait, il devra jouer...

C'est là, au cœur de cette histoire, que se situe la seconde histoire, le récit de la vie, du moins d'une partie de la vie, de MB. En effet, sans tout vous révéler, MB vient d'Autriche, le pays que vient d'annexer Hitler et nous sommes pendant la seconde guerre mondiale. Stefan Zweig, je le précise pour ceux qui ne le connaitrait pas, est mort en 1942, il était Autrichien et s'est suicidé au Brésil avec son épouse probablement écœuré par la victoire du fascisme et la propagation de la guerre à la planète entière... Il faudra comprendre, aussi, que lors de l'écriture de cette nouvelle Zweig ne connaît pas la réalité des camps de concentration. C'est pour cela que son personnage de MB peut déclarer en comparant son sort à celui des déportés : « Dans un camp de concentration, il m'eut fallu sans doute charrier des cailloux, jusqu'à ce que mes mains saignent et que mes pieds gèlent dans mes chaussures, j'eusse été parqué avec vingt-cinq autres dans le froid et la puanteur. Mais du moins, j'aurais vu des visages, j'aurais pu regarder un champ, une brouette, un arbre, une étoile... »

Oui, MB est enfermé dans une chambre vide et c'est là, après avoir dérobé un livre de grandes parties d'échecs, qu'il découvre ce roi des jeux. A force de faire et refaire ces parties dans sa tête, sans jeu réel, il devient quelque peu fou... Il s'était promis de ne jamais jouer aux échecs... mais ça été plus fort que lui en voyant Czentovic... La partie finale d'échecs entre les deux maitres, le reconnu et celui qui n'a jamais joué que dans sa tête, est une partie d'anthologie. Stefan Zweig décrit avec talent mais aussi un œil exercé toutes les phases d'excitation du joueur pathologique. C'est fascinant... et ça nous renvoie à certains de nos comportements...

Cette belle nouvelle ne dégoute pas du jeu, elle met en garde contre, d'une part, la dictature, d'autre part, le jeu excessif. Oui, le jeu doit rester une activité ludique, non un esclavage... Comme la lecture estivale... Juste un plaisir !

Le joueur d'échecs Stefan Zweig Livre de poche

Source  

Une très belle critique de Michel Bonnet sur le joueur d'échecs de Stefan Zweig
Michel Bonnet
 

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