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Les 3000 noms du fisc français : comment attraper des baleines avec des filets à sardines

Publié le 01 septembre 2009 par David Talerman

Le fisc français détiendrait 3 000 noms de contribuables ayant exilé des biens dans des banques suisses. Hier, je me demandais s'il s'agissait d'un coup de poker ou si c'était la vérité.

Après une journée de réflexion, je pense affirmer que ce n'est ni l'un ni l'autre. Voici pourquoi les cartes que Bercy a en main sont bien plus proches de la simple paire que de la quinte flush.

La liste a été constituée en partie sur la base des déclarations des banques françaises

Dans cette affaire, Bercy recherche les gros poissons. Or, soyons clairs : vous seriez multimillionnaire au point de pouvoir transférer plusieurs millions d'euros en Suisse ou ailleurs, le feriez-vous en utilisant les canaux légaux, et notamment en faisant de simples transferts de fonds depuis votre banque française vers la Suisse ? Probablement pas, vous prendriez beaucoup plus de précautions pour votre évasion fiscale.

Les noms livrés par les banques françaises sont donc probablement soit de petits poissons, soit des contribuables "stupides" qui se seraient fait attraper de toute façon.

Mais alors pourquoi Bercy annonce-t-il qu'il détient des noms ?

Probablement parce qu'il n'a pas les gros poissons.

Mettons-nous dans les chaussons d'Eric Woerth : pourquoi faire un effet d'annonce, alors qu'il serait bien plus simple de se taire et d'agir ? Le ministre du budget a non seulement dit qu'il avait des noms, mais il a aussi dit comment il avait pu les récupérer. De fait, une personne qui se trouve dans cette situation pourra estimer le risque qu'elle encourt. Ainsi, ceux qui sont effectivement dans la liste seront de toute façon attrapés, et les autres qui se dénonceraient "dans le doute", c'est du bonus. Sur le plan stratégique, c'est parfait.

Un timing parfait

La signature de l'avenant à la convention fiscale franco-suisse qui a mis fin au secret bancaire a eu lieu cet été, dans l'indifférence quasi générale. Du coup, cette annonce remet sous les projecteurs cette affaire, et le quidam moyen pourrait même imaginer que c'est la Suisse qui a livré les noms, ce qui n'est pas le cas.

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L'effet d'annonce est donc une bonne stratégie, et elle a en plus l'avantage de montrer au grand public que le gouvernement fait la chasse aux contribuables fortunés qui défiscalisent à l'étranger. Et tant qu'on parle de ça, on ne parle pas d'autre chose. On pourrait résumer ceci à ce slogan volé aux syndicats français : Tous ensemble... contre les méchants riches qui défiscalisent.

Le problème c'est qu'en voulant attraper des baleines avec des filets à sardines, on ne finit par attraper ni l'un ni l'autre... Souhaitons quand même bonne chance à notre ministre.


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