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Fraude, grippe, prime, Afrique : le storytelling à l'épreuve des faits en Sarkofrance

Publié le 10 septembre 2009 par Juan
Mercredi 9 septembre, la réalité était têtue en Sarkofrance: la lutte contre la fraude fiscale peine à donner des résultats, la Françafrique se porte bien, la prime de 500 euros aux chômeurs fait flop, et François Fillon tente d'accorder son violon sur la musique présidentielle. Même en Sarkofrance, les faits, et les chiffres, sont têtus. Le storytelling sarkozyen marque le pas.
40 appels par jour, c'est tout ?
Le ministre du budget a révélé, mardi 8 septembre, qu'une quarantaine d'exilés fiscaux par jour appelaient le bureau spécialement mis en place à Bercy pour négocier un redressement fiscal. Le chantage des derniers jours porterait-il ses fruits ? Le 31 août dernier en effet, Eric Woerth avait affirmé détenir une liste de 3000 contribuables ayant pour quelques 3 milliards d'euros d'avoirs en Suisse. Tous ces contribuables ne sont pas des fraudeurs, avait précisé Eric Woerth. Mardi soir sur France 2, le ministre s'est voulu rassurant: "On a une quarantaine d'appels par jour, un peu plus, dans la cellule de régularisation". Il n'a pu dire si ces 40 appels émanaient tous de fraudeurs, ni combien demandaient réellement une régularisation de leur situation. Mercredi soir, Eric Woerth faisait du story-telling: il racontait une histoire.
Les chiffres sont têtus. Depuis avril, moins d'une trentaine de fraudeurs fiscaux ont souhaité régulariser leur situation. La position de ce gouvernement est étonnante. Concilier les peines planchers pour les uns, et la patience fiscale pour les autres est un grand écart qu'Eric Woerth, comme Nicolas Sarkozy, maîtrise très bien.
3 283 bénéficiaires de la prime de 500 euros, c'est tout ?
Rappelez-vous la campagne de publicité gouvernementale de février dernier: "des mesures immédiates, des mesures justes". Le 18 février, Sarkozy promettait, sous la contrainte d'une manifestation hors normes le 29 janvier: "Les chômeurs qui ne peuvent pas bénéficier de l’assurance chômage parce qu’ils n’ont pas assez cotisé en tout cas assez longtemps et qui ont travaillé au moins pendant deux mois, ce qui est le cas de beaucoup de jeunes, recevront une prime exceptionnelle de 500 euros et les entreprises qui bénéficient des crédits du plan de relance s’engageront à former et à recruter des jeunes."
6 mois plus tard, à peine 3 283 personnes ont reçu la dite prime. "Nous avions déjà fait beaucoup de communication sur cette prime, mais nous allons intensifier nos actions de communication, par exemple sur le message d'attente du 39 49, surtout en cette rentrée où des gens ont achevé des jobs d'été et des jobs étudiants" a expliqué Christian Charpy, le directeur de pôle emploi. Le secrétaire d'Etat à l'emploi, Laurent Wauquiez, a reconnu que l'objectif de 200 000 personnes indemnisées en 12 mois ne serait pas atteint. Quand elle fut annoncée, certains critiquèrent l'hypocrisie du projet: cette prime ne concerne que les personnes ayant perdu leur emploi entre le 1er avril 2009 et le 31 mars 2010, autrement dit, très peu de chômeurs, et certainement pas les jeunes n'ayant pas justifié d'au moins 6 mois d'emploi. Six mois plus tard, les faits sont têtus, les critiques avaient raison... En février, Sarkozy racontait une histoire...
La grippe A : 6000 ou 20 000 ?Le débat sur l'épidémie grippale annoncée pour cet automne prend une curieuse tournure. Les chiffres, encore fois, sont têtus. Alors que les autorités sanitaires françaises ne confirmaient que 6 000 cas supplémentaires par semaine en France métropolitaine, un syndicat d'infirmier parle lui de 20 000 nouveaux cas hebdomadaires, un écart de 1 à 3. D'autres faits troublants agitent certains. Ainsi, deux mois avant l'annonce des premiers cas de grippe porcine au Mexique, le groupe français se félicitait de l'ouverture d'une usine de fabrication de vaccins anti-grippe, à l'occasion de la visite de Nicolas Sarkozy. Le communiqué de presse était éloquent... et rétrospectivement troublant :

Grippe Mexicaine: SANOFI SAVAIT??? Contrat 9 Mars 2009...
par Alf-Red
D'autres s'inquiètent des atteintes aux libertés publiques que certaines mesures gouvernementales envisagées laisseraient peser sur notre pays. Le quotidien Libération a frappé fort en publiant une pétition sur le sujet, signée par des responsables médicaux, politiques et du corps judiciaire: jugement en huis clos avec un juge unique, supression des débats contradictoires, prolongation des détentions provisoires sans audience ni débat, transferts des jugements de mineurs en correctionnelle, suspension des délais de prescription. Hasard du calendrier (?), la garde des Sceaux présentait mercredi en Conseil des ministres un projet de loi organique relatif au Défenseur des Droits. Et que dire de probable vaccination obligatoire, quand ledit vaccin a été produit en masse et sans recul ?
15 morts au Gabon, c'est tout ?
Alain Joyandet s'exprimait sur Public Senat. Le secrétaire d'Etat à la Francophonie a excellé dans son exercice habituel de langue de bois. Au Gabon, selon lui, il n'y a pas de sentiment anti-français, mais simplement quelques "quiproquo." Au Gabon, selon lui, les institutions ont été respectées. Au Gabon, toujours selon lui, les 3 morts officiels, 15 d'après l'opposition, c'est un incident "sérieux". Mais les élections se sont déroulées "finalement" dans un "climat", selon lui, l'élection a été "acceptable". Interrogé sur le sens de sa présence, unique parmi les pays occidentaux, au cérémonies du 40ème anniversaire de la dictature du Colonel Khadafi, Joyandet a cette première phrase remarquable :"les intérêts de la France passent avant tout."
Taxe carbone, la fin ?Mercredi, Nicolas Sarkozy a clos ses "entretiens", en recevant Martine Aubry à l'Elysée. Jeudi, le président français tentera de convaincre, lors d'un déplacement "organisé" dans l'Ain, figurants à l'appui. Lundi, en marge de son déplacement au Brésil, Nicolas Sarkozy avait déclaré que "toute grande réforme nécessite un effort d'explication". François Fillon a tenté de corriger sa bévue - il avait annoncé trop tôt la semaine dernière que la taxe carbone ne serait que 14 euros la tonne de CO2 - en précisant quelques unes de ses modalités cette semaine: baisse d'une partie de l'impôt sur le revenu, et financement de nouveaux "modes de transports alternatifs en zones rurales". L'impréparation demeure. Pourtant, Nicolas Sarkozy s'est engagé sur la taxe carbone voici 20 mois... Question de priorités ? Tout le monde sait qu'à moins de 32 euros, la taxe carbone sera inefficace.
Pierre Méhaignerie (UMP) a remis le couvert, mercredi, sur la politique fiscale du gouvernement. Il suggère de supprimer l'ISF et "une partie du bouclier fiscal", en contre-partie de la création d'une nouvelle tranche supérieure de l'impôt sur le revenu. Il n'est pas sûr que le député UMP ait gain de cause. cela fait déjà deux fois (au printemps, puis au coeur de l'été) qu'il tente d'infléchir la position du gouvernement Sarkozy.
La réalité reste encore le meilleur opposant à Nicolas Sarkozy.
Ami Sarkozyste, où es-tu ?

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