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Comment perdre un milliard de dollars

Publié le 12 septembre 2009 par [email protected]

Geostat

http://en.wikipedia.org/wiki/File:Geostat.gif

Animation modélisant le mouvement d’un satellite sur l’orbite géostationnaire (orbite de Clarke)

Si vous aviez pu faire, vers 1950, un dépôt de brevet au plan international pour cette image, vous seriez désormais le détenteur de l’une des plus grosses fortunes du monde ! Le principe de ce projet figure à la page 157 d’un petit livre, en apparence fort anodin, mais qui eût pu conférer à son auteur, Arthur C Clarke (1917-2008), une richesse phénoménale. Intitulé The exploration of space et publié à Londres en 1951 (chez Temple Press Ltd), cet ouvrage reprend une idée déjà présentée par Clarke dans son article Extra-Terrestrial Relays, paru dans le magazine Wireless Book, en octobre 1945.

Plus connu du grand public, par la suite, pour sa contribution au scénario du célèbre film de Stanley Kubrick, 2001 l’Odyssée de l’espace, Clarke est en effet le père du concept d’orbite géostationnaire, ou du moins de son application à un système planétaire de télécommunications (le précurseur de cette notion de satellite géosynchrone est Herman Potočnik, en 1928). Et si Clarke avait pensé, en homme d’affaires très « terre à terre » –malgré la nature « céleste » du projet décrit dans ce livre– à prendre des brevets au plan mondial, les royalties s’élèveraient sans doute maintenant à des milliards de dollars, vu l’importance stratégique de cette orbite géostationnaire. Un satellite dont l’orbite est située dans le plan de l’équateur et se déplaçant d’ouest en est (comme la Terre) possède en effet une vitesse angulaire identique à celle de notre planète. Un observateur terrestre aura donc l’impression de voir ce satellite toujours immobile au-dessus de lui, d’où l’appellation d’orbite « géostationnaire » pour désigner le mouvement du satellite, en apparence « fixé » dans le ciel. Fait par Clarke dès 1945, le calcul montre qu’un tel satellite doit avoir une orbite circulaire, à près de 36000 km d’altitude, orbite décrite bien sûr en 24 heures, durée de la rotation terrestre (c’est précisément le but recherché). Sur le schéma historique de Clarke, on peut lire ainsi : « radio relay, 24 hour orbit, 26000 miles radius ». Si l’on dispose d’un ensemble de trois satellites géostationnaires au moins, placés aux sommets d’un triangle équilatéral, il devient alors possible d’établir un réseau mondial de télécommunications, via l’espace, couvrant pratiquement toute la planète (aux limitations près inhérentes aux débits informationnels des satellites). Cette idée de Clarke s’applique donc à la radio, à la télévision, à la navigation aérienne et maritime, au téléphone, aux télécommunications militaires, aux réseaux d’échanges d’informations entre ordinateurs éloignés… pour tous les pays : voilà ce que prévoyait A.C Clarke dès 1945, et pourquoi cette notion, valant une véritable fortune, aurait pu offrir un pont d’or à son auteur ! Lequel perdit ainsi un milliard de dollars pour ne pas l’avoir brevetée, puis narra que le seul argent rapporté par cette idée fut un chèque de quelques dollars, octroyé par Wireless Book, pour la publication de son article dans cette revue, en 1945 ! Autre consolation symbolique : l’orbite géostationnaire fut baptisée « orbite de Clarke » par l’Union Astronomique Internationale. Le paradoxe ? Précurseur d’une idée valorisable en milliards de dollars, Herman Potočnik est mort en 1929 dans la misère…

[A suivre]

 

2001 l'Odyssée de l'espace
 Le film de Stanley Kubrick, sur un scénario d’Arthur C Clarke

Pour approfondir :

http://en.wikipedia.org/wiki/Clarke_Orbit#cite_ref-2

http://www2.jpl.nasa.gov/basics/bsf5-1.php

http://bouillondecultures.blogspot.com/2008/03/hommage-arthur-cclarke-1917-2008.html [ comporte un lien pour télécharger les scans de l'article original de Clarke dans  Wireless Book : http://www.astrosurf.com/luxorion/Documents/satgeostat.exe ]


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