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Bénéficiaires du RSA, donc fichés

Publié le 16 septembre 2009 par Juan

Nous nous étions émus, comme d’autres, des conditions de contrôle du RSA qui allaient peser sur ses bénéficiaires. En résumé, les « autorités compétentes » ont tout loisir, d’après le décret d’application du RSA, de contrôler l’intégralité des ressources, patrimoine et avoirs du bénéficiaire. Les formalités de contrôle du RSA sont plus strictes et intrusives : en vertu du décret d'application "n° 2009-404 du 15 avril 2009 relatif au revenu de solidarité active", le contrôle peut se dérouler à l'insu du bénéficiare. Toute "personne morale", publique ou privée, disposant d'informations électroniques sur le bénéficiaire du RSA pourra être sollicitée, sans information préalable du bénéficiaire contrôlé. Toute personne morale compétente sur des sujets aussi variés que l'automobile, le matériel hi-fi, les déplacements, les hébergements en hotels, ou le vendeur d'une automobile. Mais ce n'est pas tout. Pour instruire les demandes, un fichier (un de plus) a été créé. Des données personnelles, tantôt existantes chez d'autres administrations telles le pôle emploi, tantôt nouvelles, sont toutes collectées et enregistrées dans un nouveau fichier, bien plus complet que les projets EDVIGE et autres STIC : le «@RSA », créé par décret en juin dernier.
Le fichier @RSA, le côté obscur de la Solidarité Active version sarkozyenne
Avant d’être un revenu complémentaire, le RSA est donc d’abord un fichier national, administré par la CNAF (Caisse Nationale des Allocations Familiales). Il devrait concerner 11% de la population active, soit 4 millions de personnes. Une assistante sociale du travail a réalisé une étude édifiante, publiée par le Mouvement Antidélation, et relayée par Actuchomage.
Ce fichier sera alimenté et consultable par un nombre incroyable, et peu maîtrisable, d’administrations publiques et de services sociaux : les CCAS, les fonctionnaires départementaux, les associations et organisations à but non lucratif ayant délégation RSA du conseil général , les CAF (ou les caisses de Mutualité Sociale Agricole), et même Pôle Emploi. Les deux précautions prévues sont maigres : primo, la CAF départementale donnera les accréditations. Deuxio, elle ne conservera pas les données plus de 5 mois après l’instruction de la demande et leur transmission « au département et aux organismes chargés du service de la prestation ».
La particularité du fichier RSA tient aux informations nouvelles qu’il est censé répertorier, notamment en vue d’aider l’administration à traiter le dossier. En effet, le RSA bénéficie à deux catégories de personnes : celles soumises à une obligation d’insertion (ex-RMI), et celles bénéficiant déjà d’un emploi. Pour faire le tri, 13 items complémentaires, parfois surprenants, doivent être renseignés sur le demandeur. En particulier, la seconde rubrique relative aux obstacles à l’insertion doit être renseignée par un simple Oui ou Non.

1- Situation antérieure à la demande de revenu de solidarité active et justifiant celle-ci ;
2- Déclaration de la personne sur l’existence ou la perception de difficultés susceptibles de faire obstacle à son insertion professionnelle :
a) Problèmes de santé ;
b) Reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé ;
c) Difficultés de lecture, d’écriture ou de compréhension du français ;
d) Difficultés à faire les démarches administratives ;
e) Endettement ;
f) Autres types de difficultés.
3- Bénéfice d’actions d’accompagnement et nature de cet accompagnement ;
4- Difficultés de disponibilité liées à la garde d’enfants ou de proches dépendants ;
5- Informations relatives au logement et à la capacité du foyer à faire face à ses charges ;
6- Informations relatives au niveau d’études et aux compétences professionnelles ;
7- Informations relatives à la situation professionnelle actuelle et à celle recherchée ;
8- Informations relatives à la mobilité.
Outre l’ampleur du fichage, la question de l’instruction des dossiers est posée : le traitement des demandes est ainsi transféré à un processus de tri informatique, sur la base d’informations saisies sans procédure contradictoire.
Big Brother est là, qui en doutait ?
La réponse incomplète de la CNIL
Le site actuchômage a récemment publié une réponse d’Alex Turk, président de la CNIL, que le site associatif avait saisi. La réponse est éloquente. A l’exception des droits aux pensions alimentaires, la CNIL botte en touche : elle rappelle que le fichier du RSA, qui répertorie toutes ces données, ne doit être utilisé qu’aux fins de contrôler l’attribution du RSA (sic !). Le problème était ailleurs, dans la constitution même dudit fichier. Maigres résultats, la CNIL fait valoir cependant trois "avancées" :
  • La violation du secret bancaire ne peut être invoquée, puisque ce sont les bénéficiaires du RSA eux mêmes qui sont censés fournir les informations requises.
  • Suite à l’intervention de la CNIL, la direction générale des affaires sociales a fait retirer du formulaire d’inscription les questions relatives aux pensions alimentaires .
  • La CNIL a également obtenu qu’une mention du droit à l’information des bénéficiaires soit intégrée sur les formulaires d’inscription.

Ami sarkozyste, où es-tu ?


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