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La puissance motrice du feu

Publié le 16 septembre 2009 par Alexm

Le récent texte BibNum porte sur "la puissance motrice du feu" de Sadi Carnot (1824). Titre quasi-poétique mais qui résume bien la problématique de l'époque pré-électrique ou pré-dynamo : on chauffe avec du feu des chaudières qui font marcher des machines, quelle puissance recueille-t-on ? A partir de cette simple question Sadi Carnot (1796-1832), le fils de Lazare Carnot, va concevoir une théorie entièrement nouvelle – la thermodynamique.

Plusieurs éléments humains ou scientifiques m'ont marqué dans ce texte émouvant:

1)    la pratique précède la théorie : les machines de Watt fonctionnent avant que naisse leur théorie. D'un point de vue théorique, Carnot élabore une vraie conception intellectuelle ex-nihilo, à l'égal voire plus radicalement nouvelle que celle de Newton ou celle d'Einstein. Il a "soulevé un coin du voile", comme dirait ce dernier.

La puissance motrice du feu

2)    La différence fondamentale qu'ébauche ce texte entre le travail mécanique (F×l) ou hydraulique (mgh) et le travail de la chaleur – plus complexe, avec la notion d'entropie que Carnot esquisse et que Clausius formulera vers 1850.

3)    Le rappel des expériences assez récentes à l'époque, température qui diminue avec la pression (ex. en montagne la pression atmosphérique est plus faible donc la température aussi) ou qui augmente avec la pression (exemple actuel de la pompe à vélo qui chauffe) – l'auteur utilisera ces résultats pour imaginer les quatre étapes de son "cycle de Carnot".

4)    Le rendement maximal calculé par Carnot, entre le travail collecté (par la machine) et le travail introduit dans le système (par le chauffage); "la puissance motrice du feu" connaît ainsi une valeur limite r = 1 – T2/ T1, ou T1 est la source chaude et T2 la source froide. Ainsi, pour une machine de l'époque, T2 = 20°C = 293K source froide (ruisseau) T1= 100°C = 373K (eau bouillante), le rendement est limité à 21%.

5)    Malgré le 1) ci-dessus (la force et la nouveauté de la théorie), mais peut-être à cause de cela – l'incompréhension qu'a recueillie l'article de Carnot à sa parution. La page Wikipedia (article de qualité) relève qu'aucun des cours de machines professés à l'époque (Poncelet, Coriolis, Morin, …) ne relève et ne diffuse les résultats de Carnot. Ce n'est qu'en 1834, deux ans après la mort de Carnot, que Clapeyron exhume et commente ses résultats, puis Clausius en Allemagne. Si l'expression galvaudée "il est mort tombé dans l'oubli" signifie quelque chose, on peut la lui appliquer… d'autant qu'en tant que physicien il est souvent confondu avec son père Lazare Carnot, et il n'a même pas pu se faire un prénom, car celui-ci lui est ravi par son neveu, le président de la République Sadi Carnot assassiné en 1894 !


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