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Qui de l'os ?

Publié le 24 septembre 2009 par Didier54 @Partages
Qui de l'os ?Curieux moment, l'autre jour, au boulot. Je dois lire trop de polars.
Je fume ma clope dehors. Il fait bon. Je sors d'un épais travail, m'apprête à entrer dans un autre. Je profite quelques instants de la pause. Le soleil est sympathique quand j'avise près d'un mur un truc blanc. Beige, plutôt. Je m'approche. Je crois voir un os. Et hop, me voilà en train de tricoter une histoire. Petite parcelle de créativité en pays du béton et entre deux réunions.
J'y suis revenu le soir, à la maison rentré. Si cela vous branche, pouvez proposer des suites !
L'os, donc.
Retrouvé au pied d'un grand ensemble immobilier qui fut naguère un hôpital militaire. Reconverti en administration. Il n'a aucune raison d'être là. A cet instant. Il est découvert par hasard. Il se trouve qu'en ce moment, il y a des travaux sur les bâtiments. Pas dans les fondations, mais sur les toits. On refait la toiture. L'os semble surgir du sol.
Un type ramasse machinalement l'os. Vaque à ses occupations. Oublie. Redécouvre l'os, il l'a mis dans sa poche. L'a nettoyé vite fait. Il le scrute. Puis vaque de nouveau à ses occupations. Oublie. Y revient. Ca le turlupine.
Par hasard, quelques jours plus tard, près de la machine à café. Un des ouvriers qui refait le toit. La discussion s'engage. Ils se vouvoient. Le type, appelons-le Guillaume, Guillaume, donc, tranquille employé de la dite administration, célibataire, impliqué dans la vie sociale de l'entreprise en qualité de secrétaire de l'amical du personnel, évoque avec l'ouvrier sa découverte. L'autre hausse les épaules. Mais Guillaume a perçu la fraction de seconde. Cette fraction où l'ouvrier, appelons-le Gaétan, Gaétan, donc, 51 ans, marié, trois enfants, passionné de sports mécaniques, tatouage sur le poignet droit, cette fraction où Gaétan s'est perdu dans un quelque part qui ressemblait à de la planique.
Un ou deux jours après, l'os dans sa poche, Guillaume aperçoit Gaétan qui range ses outils et s'apprête à partir. Mal rasé. Mal luné, aujourd'hui. La presque même fraction de seconde le saisit et Guillaume le sent. Ca papote d'autre chose. Disons que Guillaume phrase et que Gaétan s'affaire en grommelant. Mais ça finit par se détendre. Et se poursuit dans le café voisin. Un demi pour Gaétan, un thé glacé pour Guillaume. Ca se détend, oui.
Quelques jours plus tard, des fouilles démarrent. Sous les toits. Une brigade scientifique de la police cède assez rapidement la place à une escouade d'archéologues. Stupéfaction en effet : l'os faisait bel et bien partie d'un cadavre. Humain. Les premières investigations, narquoises, penchaient pour un animal. On pensait que c'était un oiseau qui avait récupéré ça profitant qu'on refaisait la toiture. On interrogea les ouvriers. L'un d'eux confessa que c'est lui qui avait jeté l'os. Qu'il y en avait d'autres là-bas. Mais le patron avait demandé que chacun la boucle. Sinon les primes et les heures supplémentaires sautaient.
L'enquête, moins narquoise, découvrit que l'os et le cadavre étaient en fait des centaines de cadavres, des milliers d'os. De plusieurs époques.
Dans un premier temps, on pensait que c'est tout simplement l'hôpital qui ne prenait guère de gants. Et entassait là les mourants. Les os cassés. Mais aucun os n'était fracturé. Ou alors c'étaient des factures guéries. Un commissaire décida de ne laisser qu'un jeune inspecteur sur l'enquête, une vague de cambriolages sévissait dans la ville, il avait besoin de ses hommes.
Le jeune inspecteur pilotait les archéologues. Qui découvrirent des os et des cadavres dans d'autres endroits de l'immense bâtisse. Des centaines de m2 de combles furent passés au peigne fin. On s'arrêta quelques semaines plus tard, on estima qu'on avait découvert 7 839 morts.
On pensa à la guerre de 39 - 45.
On pensa aussi à celle de 14 - 18.
Mais le policier, intrigué, demanda qu'on pousse plus loin les calculs.
On pensa également à celle 1870.
On ne pensa pas qu'une guerre était plus vraisemblable qu'une autre.
On sut assez vite que les ossements dataient pour certains de l'une, pour d'autres de la seconde, et pour les derniers de la troisième.
C'est la symétrie qui fut troublante. Il y avait 2 613 cadavres par guerre. Des liens ADN furent établis. La symétrie devint effrayante. Et chaque guerre avait son représentant de la même famille.
Le jeune inspecteur, appelons-le Benoit, Benoit, donc, 26 ans, frais émoulu de l'école, premier poste, célibataire, reconverti policier après avoir envisagé de devenir vétérinaire humanitaire, découvrit qu'il avait des liens avec l'une des familles.
Il sentit comme une écorce qui s'arrachait à l'intérieur de lui.
870 familles et la sienne étaient concernées.
Il se promit de trouver la vérité.
Sa hiérarchie l'encourage à enterrer l'affaire.
Lui pense que des familles portent à ce jour de lourds secrets, il sent le poids des disparitions dont on ne sait rien. Il insiste. Plonge dans les archives. Rencontre des passionnés d'histoire. Apprend que des crimes ont été commis bien avant que l'hôpital militaire soit compris. Que les corps n'ont pas tous été retrouvés. Rencontre des scientifiques, qui lui expliquent comment un os peut surgir de terre des années et des années plus tard.

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