Le désert lunaire contient quelques molécules d’eau – © NASA
L’annonce a fait le tour de la Terre à la vitesse de la lumière : une équipe internationale d’astronomes a trouvé de l’eau… sur la Lune. Cette belle découverte ne doit pas cependant faire oublier que la Lune est l’un des déserts les plus désertiques de tout le système solaire !
Une équipe scientifique franco-américaine, après l’analyse des données enregistrées par la sonde Deep Impact lors de son passage non loin de la Lune, a annoncé cette semaine la découverte d’eau… sur la Lune ! L’eau sur la Lune, c’est, si l’on ose écrire, une vieille lune… Déjà Hergé, dans son album “On a marché sur la Lune”, faisait découvrir à Tintin et Milou une grotte emplie de glace… Ainsi, l’eau lunaire fait régulièrement, depuis quelques décennies, la “une” des médias. Un fantasme qui s’explique par la valeur symbolique de l’eau, pourvoyeuse de vie au cœur des plus désertiques des déserts. L’eau sur la Lune (ou sur Mars, un an sur deux), nous “vendent” les agences spatiales lorsque vient le temps des arbitrages économiques de leur politique spatiale, c’est la promesse de futures épopées planétaires pour les vaillants explorateurs que sont les astronautes. L’eau lunaire, en effet, pourrait servir, non seulement de boisson, mais pas seulement : en dissociant hydrogène et oxygène de la molécule d’eau, les astronautes pourraient créer, quasiment ex nihi… l’eau, du carburant pour les fusées et leurs bases spatiales, et l’air nécessaire à leur respiration… Bref, l’eau, c’est la molécule miracle.
Au début du XXe siècle, lorsque l’administration Bush a tenté de relancer les vols habités en déshérence en visant la Lune comme futur objectif des astronautes, l’eau a été opportunément “trouvée” par la Nasa aux pôles lunaires, où elle était sensée exister en grande quantité… immense réserve promise à une future base lunaire, prévue pour 2025. Puis, les astronomes ont sonné la fin de la récréation en démontrant que ces hypothétiques réserves gigantesques de glace n’existaient pas… Aujourd’hui, donc, l’eau est de nouveau découverte sur la Lune et, de nouveau, sa présence enflamme les esprits : ne voilà t-il pas la course à la Lune relancée ?
Pas vraiment. A l’heure où le lucide rapport Augustine remis au Président des Etats-Unis démontre que la Nasa n’a plus les moyens de ses rêves dispendieux et peu en adéquation avec les préoccupation des terriens, et que le retour à la Lune, après avoir été annoncé en 2018, puis 2020, 2022, 2025, allait probablement être repoussé à 2030 ou 2035, l’annonce de la découverte d’eau lunaire prête à sourire. Car si cette trouvaille est cette fois, semble-t-il, confirmée, le “buzz” interplanétaire que cette découverte a provoqué est quelque peu déroutant, ou, pour utiliser une litote, excessif. En effet, la quantité d’eau trouvée dans les mers lunaires est ridiculement faible et ne sera à l’évidence jamais exploitée par personne : comme l’explique Olivier Groussin, astronome à l’observatoire de Marseille, la quantité relative d’eau trouvée correspond en gros à un litre par hectare de désert lunaire ! En clair, la Lune est bel et bien désertique, infiniment plus sèche que les plus désertiques déserts terrestres… Reste, scientifiquement, une belle expérience : ces quelques “gouttes de rosée”, selon l’expression heureuse de notre collègue Sylvestre Huet dans Libération, trouvent semble-t-il leur origine dans l’interraction entre le vent solaire, composé de protons, avec l’oxygène contenu dans le régolite lunaire. Le bombardement de l’oxygène par ces ions lourds créérait ces molécules d’eau… De quoi étancher la soif métaphorique des astronomes, ivres de connaissances, mais, malheureusement, pas celle, plus littérale, des astronautes.
Serge Brunier/ France Info