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Frémissements sur la dette

Publié le 01 octobre 2009 par H16

Une fois n’est pas coutume : la dette et les déficits budgétaires gargantuesques français, véritables marronniers sur ce blog depuis qu’il existe, commencent à intéresser d’autres chroniqueurs et les journalistes de la presse traditionnelle. Fait plus intéressant, pour une fois s’instaure un débat sur la « soutenabilité » d’une telle dette, et sur les éventuels remèdes qu’on pourrait apporter aux incontinences niagaresques de l’État.

Il faut dire que les montants en jeux ne sont plus aussi faciles à planquer sous le tapis que les années précédentes ; on pourra s’en convaincre avec mon billet précédent dans lequel Woerth nous annonçait, la bouche en cœur, qu’on se dirigeait vers un déficit record, que l’année prochaine, ce serait aussi historique – champagne ! -, et que les mesures homéopathiques proposées sauraient nous éviter le pire, si si,  qui, sans être certain, devient de plus en plus probable.

Mais ne vous inquiétez pas, on a trouvé un moyen de produire de la vaseline sans utiliser de pétrole, ce qui permettra une sodomie fiscale éco-responsable à l’empreinte carbone minorée.

La crispation des visages ministériels est à ce sujet fort rassurante.

Frémissements sur la dette

Si, pour être complet, l’on ajoute à la dette du budget celle des organismes sociaux, on obtient un tableau aux couleurs vives, tout en nuances :

  • 120 petits milliards de rien du tout pour l’Etat, soit un doublement depuis l’année dernière suite à une petite baisse de forme dans les recettes (flûte, mais c’est la criiiiise).
  • 25 milliardounets pour la Sécu, sachant qu’en 2008, nous étions à 10. Là encore, un doublement de la performance. On sent les athlètes de la gestion budgétaire bien en forme et partis sur une courbe exponentielle pleine de surprises !
  • 5 micromilliards pour les administrations publiques locales, parce que ce qui marche pour tous doit marcher pour chacun et qu’il n’y a pas de raisons que seul l’Elysée ait des petits fours au caviar, zut à la fin.

Et c’est sur ces constats que l’information filtre doucement.

On retrouve ensuite toute la panoplie de comportements relativement standard : l’optimisme détâché ( »La dette ? Même pas mal ! »), les appels (un peu confus) à la rigueur, les décontractés de l’impôt ou les Géo Trouvetou de la finance ( »la Taxe Tobin ? C’est trop bien ! »),  ceux qui attendent le messie, et ceux qui font leurs petits calculs.

Le débat est donc lancé : lever plus d’impôts ? Augmenter les taxes ? Un peu des deux ?

Pour ce qui est de lever plus d’impôts, ceux-ci (tout compris : entreprises, ISF, particuliers, …) couvrant en gros 40% du budget de l’état au maximum, il faudrait les augmenter de 50% (passer à 60% du budget) pour compenser seulement de moitié les déficits observés. Je laisse imaginer la joie des contribuables et des entreprises en voyant leurs mensualités augmenter subitement ou les trois « tiers provisionnels » passer aux trois « demis provisionnels », sachant

  • que cette augmentation ne couvre que la moitié des besoins : autrement dit, c’est überpénible, mais ce n’est pas suffisant du tout,
  • que tout chiffre inférieur ne serait pas visible dans les finances publiques,
  • qu’il faudra tout de même recourir à la dette pour boucler l’année,
  • que l’année suivante, c’est rebelote.

Et d’ailleurs, même en imaginant un arrêt total du remboursement de la dette (remis à plus tard, disons), tout en conservant une augmentation de 50% de l’impôt sur le revenu … le budget est encore en déficit !

Les effets de bords néfastes (faillites d’entreprises et personnelles, accroissement de la misère) sont gommés ici : point n’est besoin d’enlaidir la mariée, elle est déjà suffisamment moche comme ça.

On ajoutera aussi que ces impôts sont très loin d’être payés par tous. En fait, ils sont surtout payés par une quantité de personnes qui constitue, zut et rezut, le cœur de cible de l’action politique. Difficile de s’assurer du calme d’une population qu’on désanusse à la chaîne.

Le raisonnement vaut aussi pour les taxes, à la différence que leur multiplication et leur pénétration sur toutes les strates de la population permet de rendre les sommes prélevées beaucoup moins visibles.

C’est d’ailleurs la raison pour laquelle le gouvernement a choisi l’avalanche de taxes plutôt que l’explosion des impôts. Avantage évident : une explosion laisse toujours des victimes qui couinent fort, alors que l’avalanche étouffe tout le monde dans un silence sépulcral.

Reste qu’au vu de ces petites considérations, il faut bien se rendre à l’évidence : c’est cuit.

Autrement dit : on peut tortiller les chiffres comme on veut, la France ne pourra pas s’en sortir. C’est mathématiquement impossible. Il n’y aura pas de Superman Politique ou de Kamikaze Economique qui viendront sauver la situation, il n’y aura pas d’augmentations folles des impôts parce que les politiques ne sont pas fous et qu’ils sont temporaires, et il y aura bien avalanche de taxes parce que ça ne se voit pas (trop), … mais il n’y aura pas de bout du tunnel : la faillite est maintenant inéluctable.

Et ce qui est vrai en France l’est ailleurs : il y aura des dettes non remboursées, avec tout le cortège d’emmerdements que ça peut supposer pour tout le monde.

Oui, je sais, c’est dur à entendre. Mais c’est comme ça.

Trouvez-moi, sur le papier, un mécanisme qui permette de diminuer l’emprunte de la dette en France dans un horizon raisonnable (disons, à 10 ans), de ramener les déficits publics sous la barre des 3%, tout en conservant une population suffisamment riche et calme, et en maintenant vaguement les niveaux de prestations de l’état observé, exposez-le ici, pour rire, et je pourrai discuter.

Mais en attendant ce calcul extraordinaire, la seule conclusion est : c’est impossible.

Il y aura effondrement du niveau de vie, des prestations fournies (on le constate déjà, tous les jours), de la note de la dette française. Il y aura plus de chômage, beaucoup, beaucoup plus, plus de misère, et plus pauvres. Il y aura des pleurs et des grincements de dents.

Oh, je vois déjà quelques uns, rouspéter en s’emportant : « Quel déclinologue ! »

Soit.

Je lance un défi : proposez moi un programme économique, applicable hic & nunc, qui sorte la France de l’ornière.

« Les pompes vous donneront plus de temps, mais c’est une question de minutes. A partir de cet instant, quoi que nous fassions, le Titanic va couler !

- Mais ce navire est insubmersible!

- Il est fait de métal, monsieur. Je peux vous l’assurer, il coulera. C’est une certitude mathématique. »


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