Si le parti communiste et le peuple ne sont pas d’accord, il n’y a qu’à dissoudre le peuple (Bertolt Brecht)
Une nouvelle Eire : votetoujours, tu m’intérèsses
Sur fond d’hymne à la joie, Koz se réjouit de la victoire du « oui » au référendum irlandais (67%). Il ose surtout cette analyse que je trouve éminemment culottée :
« Je reconnais certes sans peine la nature un peu hétérodoxe de ce deuxième référendum, mais je m’en accommode fort bien parce qu’il est davantage conforme à la volonté populaire majoritaire. Le reste n’est qu’une coalition opportuniste d’oppositions minoritaires. Ceci dit en toute amitié, bien sûr.
L’argument mélencho-villieriste selon lequel on organiserait autant de référendums que nécessaire pour que le peuple dise oui ne tient pas. Il ne tient pas, parce qu’on n’imagine pas un troisième vote. Un troisième vote après deux « non » populaires, et malgré les concessions faites, n’aurait pas été politiquement envisageable. » Ah bon – en est-il si certain ?
En d’autres termes, Koz développe l’idée qu’un référendum qui se solde par un non doit être conforté par un second, alors qu’un référendum qui se termine par un oui, lui, ne peut être qu’un choix final. Il confond sans doute l’église et le bureau de vote.
Jamais Koztoujours n’aura aussi bien porté son nom.
Deux millions de rebelles à mater
J’aurais envie de lui répondre :
« Un question ultra-orientée et bien entendu, aucune garantie de transparence du résultat qui de toute manière ne voudra rien dire. En plus, c’est une atteinte au caractère démocratique de notre système politique. »
Cela vous ferait alors penser à un billet d’Autheuil, son collègue hérétique. Ce dernier signe lui aussi un billet similaire dans sa construction doctrinale à propos du vote citoyen sur l’avenir de la Poste (2 millions de votants, dont votre serviteur – qui a voté « non »). Je le cite :
« Aucune liste d’électeurs, un question ultra-orientée et bien entendu, aucune garantie de transparence du résultat qui de toute manière ne voudra rien dire. En plus, c’est une atteinte au caractère représentatif de notre système politique. Les seuls qui ont la légitimité pour décider, ce sont les autorités politiques légitimement élues lors de vraies élections. [sic : c'est un pléonasme et en plus c'est faux. On devrait parler ici de légalité et non de légitimité ] Accessoirement, des référendums peuvent être organisés, mais dans des conditions qui n’ont rien à voir avec la consultation bidon sur le statut de la Poste. »
Les considérants d’Authueil sont parfaitement exacts* – je n’ai guère d’illusion sur le caractère hautement manipulable de cette consultation et je suis un fervent défenseur de la démocratie représentative. En revanche, je maintiens que le caractère massif de la participation dépasse le cadre de la gauche militante : comparez donc, cher Autheuil, avec les 90 000 malheureux qui se sont déplacés pour voter la révolution de la rose au PS.
J’aurais envie de lui répondre :
« Je reconnais certes sans peine la nature un peu hétérodoxe de ce référendum, mais je m’en accommode fort bien parce qu’il est davantage conforme à la volonté populaire majoritaire. «
Nation est en travaux, République est fermée : descendez à Stalingrad
Il y a également un élément qui me perturbe : dans un système où les autorités politiques « légitimement élues » ou plutôt légalement élues s’assoient avec joie sur la volonté souveraine de la Nation, à commencer – au hasard – par les résultats d’un certain référendum perdu sur la Constitution européenne, voire n’hésitent pas – suivez mon regard – à les faire revoter, en quoi l’apparition de référendums sauvages est -elle répréhensible ?
Le fameux référendum d’initiative populaire, présenté par pétition, ne présentera-t-il pas les mêmes problèmes que ceux que vous évoquez ?
En Belgique, on considère que ce n’est pas un délit pénal de tenter de s’évader d’une prison. C’est une caractéristique humaine de rechercher la liberté. En quoi je n’aurais pas le droit de m’exprimer sur un sujet sur lequel on ne me consulte délibérément pas ?
* Sur le fond de son billet, je ne le partage pas. Le précédent de France Telecom montre que La Poste risque de devenir une machine à traire utilisée par des cadres surpayés pour se propulser ailleurs, non sans avoir démoli la base de l’entreprise en fermant d’autorité certaines branches et certains métiers. La Poste est invendable ? Pas si sûr : qui pourra protester quand un manager viendra expliquer que la rentabilité implique de fermer un bureau sur 2. C’est parfaitement rationnel, mais cela s’appelle le desservice public.
Lire aussi dans la Kiwibulle : Edgar.
Autheuilconsultation populaireEuropeIrlandeKozLa PosteNonSodomieSujets: Banderille, Toréador critique la Droite | 21 Comments »