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Balade au coeur d’un nouveau temple de la consommation

Publié le 11 octobre 2009 par Livmarlene
Balade au coeur d’un nouveau temple de la consommation

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Heureux qui comme Ulysse a son centre commercial géant ! Le 24 septembre dernier, le gigantesque Odysseum a ouvert ses portes. Il s’agit d’un centre “ludico-commercial” pour reprendre les termes de ses créateurs, un concept qui se veut unique sur le pourtour méditerranéen. Forcément, tout Montpelliérain qui se respecte doit aller y faire un tour au moins une fois, ne serait-ce que par curiosité.

Je ne fais pas exception à la règle, aussi, après avoir laissé passer les premiers jours et l’assaut prévisible de ce nouveau quartier, je me suis décidée à monter dans une rame du tram bleu. Je me cale contre une banquette et je regarde défiler les stations jusqu’au nouveau terminus. Le tram s’arrête, je m’apprête à descendre au milieu de nulle part avant d’entendre le commentaire d’un autre usager : “Il marque toujours un temps d’arrêt ici, mais la station est un peu plus loin.” Toujours ? Au bout de quatre jours, les gens ont déjà pris des habitudes ? Je prends un air détaché, genre “Je savais bien qu’on était pas arrivés”. La rame repart pour quelques mètres et soudain, c’est le choc !

L’impression d’arriver dans une gare, mais pas une petite gare de campagne version Cosprons-Les-Vignes, où le chef de gare cumule aussi les fonctions de maire, de médecin et de maître d’école ! Non, une gare, owf, pas comme la gare de Lyon quand même, mais à peine moins ! Si si !

Le premier pied posé en cette terre promise depuis si longtemps par les dirigeants de l’agglo amène un frisson qui voyage depuis le bas de mon dos. Atteignant mes cervicales, il se mue en des picotements dans mes yeux. La faute à mes nouvelles lunettes auxquelles je ne suis pas encore parfaitement habituée, ou peut-être au spectacle démesuré qui s’offre à mes mirettes.

C’est grand comme une ville, ça grouille de monde chaque recoin est investi du pas de porte d’une boutique. Au total, une petite centaine. La moitié, ce sont des boutiques de fringues ou d’accessoires de mode. Judicieusement intercalées, toutes sortes de sandwicheries, restaurants et salons de thés amènent des effluves globalement assez agréables de brioche et de chocolat chaud. Tiens, il y a même un spécialiste de la grosse bretzel molle, moi qui adore ça !

Il faut être honnête, en longeant la Promenade des Constellations, puis la Ceinture d’Astéroïdes, je trouve au lieu une certaine majesté dans sa démesure. Ça fait penser à Georges Frêche, à la fois excessif et indispensable (j’ai presque honte d’écrire ça).

Mais très vite, je me sens agacée, oppressée par tout ça. Un peu comme en écoutant une tirade un peu trop longue de Georges (ça équilibre). J’étais rentrée enthousiaste dans les premières boutiques, mais arrivée chez Geox, je n’ai même plus envie de voir si je trouve pour l’anniversaire de mon neveu des chaussures qui courent vite. Trop à voir. Et puis tout ça manque d’humanité. Certains diront avec emphase que l’Histoire d’Odysseum est devant lui. Moi je dis que rien ne vaut les rues pittoresques du vieux Montpellier, le bol d’air que l’on prend sur la place de la Comédie, ni l’Esplanade bordée de verdure.

Odysseum, c’est un agglomérat de boutiques en tous genres, collées à un hypermarché, un immense Ikéa, faisant lui-même face à un Décathlon. Rajoutez à cela une patinoire, un aquarium somptueux, un planétarium, un Gaumont Multiplexe, une piste de karting, un bowling, un mur d’escalade, un mini parc d’attractions pour les trois-douze ans, un parking de 2000 places et vous obtenez une immense pompe à fric ! En centre ville, on peut flâner pour le plaisir. Mais dans ce centre “novateur”, tout se paie et pas des clopinettes ! Sinon, on n’a rien à y faire.

J’ai lu sur le site officiel que Montpellier est fière d’être la première ville à avoir conclu un partenariat avec EDF, afin que l’électricité utilisée pour les parties communes d’Odysseum soient exclusivement produites grâce aux énergies renouvelables. Belle pirouette qui met un peu d’écologie dans cette sauce consumériste.

Sur 50 hectares, Odysseum illustre avec grandeur l’un des paradoxes de notre époque, qui veut moraliser la finance et réduire la quantité de déchets, mais qui dans le même temps fait des pieds et des mains pour stimuler la consommation afin de faire repartir une économie restée faiblarde depuis la fameuse crise des subprimes, il n’y a pas si longtemps.

On s’indigne devant la vague de suicides à France Télécom, attribuée à des méthodes de management peu soucieuses du respect des personnes. Et la seconde d’après, on se précipite dans un centre frico-commercial aussi éloigné de l’échelle humaine que peut l’être une une galaxie.

J’aime à penser que la beauté de notre espèce tient à la diversité des aspects qu’elle revêt ainsi qu’à ses nombreuses contradictions...


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