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Reprise des négociations

Publié le 07 octobre 2009 par Alainhdv

Pendant plusieurs mois, ce blog est resté en panne de chroniques. La vie ne s’était pas arrêtée pour autant, mais mon année a été quelque peu mouvementée au niveau journalistique et de l’emploi. Il n’y a rien là de très original et ce parcours chaotique est fortement lié à la mort programmée de notre profession dans ce qu’elle a de libre et d’indépendant.
Me voyant imposer un statut « libéral » pour le plus grand bénéfice d’employeurs occasionnels, je goûte depuis deux ans à la difficile réalité de l’intermittence du journalisme. Cela ressemble fort à celle du spectacle, sauf qu’aucun statut n’existe pour ces travailleurs, qui se retrouvent de plus en plus sur le carreau.
Cela n’empêche nullement de regarder le monde, ni d’écrire, car validité de la carte de presse ou non, le journalisme est un état et une raison de vivre, plus qu’une profession répondant à un code selon les critères de Monsieur Paul Emploi, qui ne peut de toute façon rien pour nous.
Si j’aime mettre en valeur la vie des gens et parler « des trains qui arrivent à l’heure », il n’est pas question d’abandonner une certaine faculté d’indignation devant des situations qui méritent à mon sens d’être soulignées. Ces sujets ne manquent pas et les occasions de colère sont hélas fort nombreuses.
Bénéficiant depuis peu de longs temps de « loisirs forcés », je regarde plus la télévision, ce qui m’instruit en positif comme en négatif. Il y a longtemps que mon opinion est faite sur le traitement réducteur de l’information sur les chaînes généralistes, qui sont aussi les plus regardées. Si des efforts sont faits nous dit-on pour maintenir un certain niveau de qualité, je suis effaré par la médiocrité de nombreuses émissions aux heures de grande écoute, où l’on ne retient que la distraction et la futilité dans un vide abyssal de la pensée. Cela évoque une opération de décervelage généralisée ou plutôt de crétinisation des masses.
Je supporte peu la manière désinvolte dont on traite la langue, ce qui ressemble à un assassinat permanent. « C’est pour faire plus vivant ou moderne », m’expliquent avec suffisance des collègues, ravis d’abandonner leur dictionnaire aux oubliettes. À la suite de l’ami Georges Brassens, je suis sans aucun doute « foutrement moyenâgeux » ou « ringard » comme on dit joliment aujourd’hui, mais je ne puis m’habituer au niveau de langage volontairement atrophié de nos dirigeants et élites nationales. Il est vrai que l’exemple vient du Palais et que tout avocat qu’il fut, notre président manie un verbe des plus pauvres avec une syntaxe en souffrance et une conjugaison en ruine. La concordance des temps n’est plus qu’une chimère et les phrases à rallonge sont polluées par des relatives n’ayant rien à voir avec le style de Proust. La langue employée est en effet plus proche de celle du Petit Nicolas, que Gosciny avait créé par pur divertissement, que de Madame de Lafayette. Nous ne pouvons oublier que le prince fait un bien mauvais procès à cette pauvre « Princesse de Clèves », dont l’écriture n’est autre qu’un modèle de style depuis quelques lunes. Cela n’a certes rien à voir avec le sabir banlieusardisé modèle SMS, que l’on nous impose aujourd’hui, mais c’est au moins plus clair.
Cet exemple venu d’en haut est des plus dommageables et il fait malheureusement école. Mes oreilles ont été récemment agressées par une intervention de notre ministre de l’Économie, qui tentait de rassurer les foules sur le catastrophique budget de l’État pour l’année à venir. L’exercice était des plus périlleux et l’on se demande comment ceux que l’on appelle grands parviennent à croire à la parole qu’ils diffusent. L’atmosphère du paquebot de Bercy n’est pas plus favorable à la langue de Molière et la syntaxe présidentielle a hélas déteint sur celle qui fut une grande avocate d’affaires internationale. À moins que comme à la cour de Versailles, il ne s’agisse d’une mode et que ce soit du dernier chic de s’exprimer comme le prince. Ou alors les conseillers qui rédigent discours et interventions ont tous eu les mêmes professeurs, forgés au moule d’après 68 où l’on professait une haine de la langue bourgeoise.
Avec son esprit taquin qu’on lui souhaite de conserver longtemps, l’hebdomadaire Télérama relève des fautes d’orthographe dans les circulaires du ministère de l’Éducation Nationale (un comble…), tout comme dans les justifications du ministre. N’en déplaise à Monsieur de Closets, il est inutile de réclamer une réforme simplificatrice de la grammaire et de l’orthographe, elle s’applique déjà de façon généralisée au quotidien. Les académiciens en ravalent leur dictionnaire, les professeurs de lettres (s’il en reste) n’ont pas fini de s’arracher les cheveux et un jour viendra où plus personne ne se comprendra.
Comment s’étonner que l’on trouve de plus en plus en plus d’enfants ne sachant ni lire ni écrire à l’entrée en 6e ? Et nombre de copies du Bac ou à l’université démontrent piteusement que nombre d’étudiants ne savent pas écrire. Boileau au secours, ils sont devenus fous !


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