Magazine Journal intime

Pour qui se prennent certains profs ?

Par Argoul

Après les 3 ans, les 17 ans. Veille du bac en section ‘S’. La philo est une matière marginale, mais qui devrait ouvrir sur le monde et replacer les maths à leur place d’outil merveilleux - mais de simple outil. Il ne dit rien sur les fins et il est utile de comprendre pourquoi. Or ne voilà-t-il pas qu’une certaine prof, loin de faire la pédagogie de sa matière, noie le poisson sous une déferlante de “corrigés” et autres documents “de méthode” qui sont aussi abscons qu’inutiles ?

Est-ce par revanche sur ces élèves matheux qui sont censés “mépriser” la philo comme trop “littéraire” ? Est-ce par souci de se faire mousser en jargonnant ésotérique, pour bien marquer l’ignorance des élèves ? Toujours est-il que ce genre d’attitude, jamais remise en cause, jamais évaluée par le système, illustre les ravages de certains profs sur des élèves poussés à la compétition. Seuls s’en sortiront ceux qui seront aidés par des adultes compréhensifs qui repousseront les P.S ou P.O et les D1 et D2 dits “de méthode” (ouaf ! ouaf !) pour éclairer simplement : comment lire un sujet, comment bien définir les mots, comment argumenter.

Bien sûr, personne n’ose rien dire : ni les parents qui craignent que leur enfant soit sanctionné par une prof vexée, ni le Mammouth qui passe son temps à concocter des “rapports” sans jamais inspecter personne (quoi, deux fois dans une vie peut-être ?), ni la hiérarchie directe, qui craint bien trop “les syndicats”, ceux-ci crispés sur leurs petits zacquis - comme si bien faire son métier était une intolérable atteinte à l’égalitarisme.

Il faut être confronté à la chose pour se mettre en colère. Illustrons donc les dérives de certains profs dont j’ai l’exemple sous les yeux.

Le jargon : “La problématique est l’ensemble constitué par l’analyse de sens explicite et implicite du préjugé contenu dans le sujet (P.S.), et d’un implicite particulier constitué par ses présupposés, ses implications et ses connotations, et la remise en cause de l’ensemble des affirmations faites pour expliquer ce préjugé (énoncées dans le développement D1) grâce à une série d’interrogations qui permettent de comprendre pourquoi la question contenue dans le sujet se pose.” Ouf ! Vous n’avez rien compris ? Eh bien mettez-vous à la place d’un élève de 17 ans qui va devoir plancher dans quelques mois au bac… Il y a un sadisme de l’abstraction et de l’ésotérisme chez certains soi-disant “éducateurs” qui remplace très probablement le fouet d’hier. Un sadisme de la phrase à la Proust, sans le talent. Une prof de philo qui se sent ignorée ou méprisée, se prend pour Sartre et pond un “Etre et néant” à chaque phrase. Bravo la pédagogie !

La noyade : près de 130 pages A4 tapées en caractères Times n°10 en interlignes minimum, juste pour faire de la “méthodologie” et “illustrer les sujets”. Et nous ne sommes qu’à la moitié du PREMIER trimestre !… Qui va lire tout ça, tout comprendre du jargon, et être capable d’appliquer ladite méthode ? Ne serait-il pas plus simple de faire des corrigés oraux et de ne donner que le canevas logique du raisonnement sous forme papier ? Ah, mais ça ne sera pas “de la faute” de la prof qui aura fait “tout son possible” pour tout dire, preuves écrites à l’appui, parapluie bien ouvert ! Sans jamais se mettre à la place de l’élève, naturellement. L’élève est un “objet” qui n’a qu’à subir, n’est-ce pas ? Est-ce cela la “neutralité administrative” ? Objectiver les sujets - comme on dirait en bonne philo ? Bravo la pédagogie !

L’ineptie : un corrigé de devoir est donné à chaque fois en 12 à 13 pages A4 petits caractères et petits interlignes - soit plus de 26 pages manuscrites format feuille d’examen ! Est-ce bien raisonnable ? Faut-il bavasser comme ça pour rendre un “bon” devoir de philo ? Ne faudrait-il pas limiter les corrigés à la moyenne des devoirs effectivement rendus, soit 5 ou 6 pages manuscrites (3 pages tapées) ? S’adresse-t-on vraiment à des élèves de section ‘S’ ? Bravo la pédagogie !

Les erreurs factuelles : “Pascal, dans son livre “Pensées” écrit…” N’importe quoi ! Pascal n’a JAMAIS écrit un livre qu’il aurait intitulé “Pensées”. Ce sont des fragments épars, rassemblés par ses éditeurs, qui ont été appelés ainsi. Au lieu de jargonner inutilement, pourquoi ne pas appliquer sa propre méthode à soi-même - et être précis quant aux vérités affirmées ?

Le blocage : plusieurs pages de “défauts à éviter” empêchent l’élève de se lancer d’emblée. Toute action est aussitôt inhibée par la peur de faire ce qu’il ne faut pas - alors qu’il faut d’abord faire et être corrigé pour véritablement “apprendre”. La prof, manifestement, se défausse de sa fonction véritable : elle régurgite un savoir universitaire, elle “n’enseigne” rien. Conclusion, l’élève de ‘S’, déjà pas très à l’aise avec les mots, n’ose même plus écrire ni penser qui ne soit “répétition de cours”. Les corrections des devoirs sur table le poussent d’ailleurs en ce sens, le conformisme étant largement valorisé et l’originalité bannie. Serait-elle prise pour une “attaque personnelle” contre ce qu’a dit le prof ? Bravo la pédagogie ! Quelle attitude défensive ! Quel désir de transmettre ! Quelle vocation pédagogique !

J’ai le souvenir, pour ma part d’une prof de philo qui ne se prenait ni pour Sartre, ni pour un membre d’élite de la secte des philosophes, ni pour un être tellement supérieur qu’il ne condescende point à s’abaisser à expliquer en mots compréhensibles la méthode qui aide à réfléchir. Mais nous ne sommes plus à la même époque, n’est-ce pas ? Les vieux profs, dans une vieille société, sont des gens crispés, constipés, aigris. Oh, sans doute pas la majorité, allons, mais une trop forte proportion !

Comment ne pas comprendre qu’on rêve de remettre au pas ces méprisables méprisants ?


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