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Le dialogue social ne doit-il être une obligation qu'à partir du 11 eme salarié ?

Publié le 26 octobre 2009 par Slovar
Le dialogue social ne doit-il être une obligation qu'à partir du 11 eme salarié ?Tous les salariés sont semble t-il, tous, concernés par le même droit du travail. Néanmoins, il faut savoir que pour les très petites entreprises (moins de 10 salariés), le code du travail n’impose ni élections professionnelles, ni dialogue social.
Pour avoir passé les 3/4 de ma vie professionnelle dans des entreprises de 2 à 10 salariés, je peux même vous dire que la notion de dialogue social est considérée comme "vulgaire" et "déplacée" dans ces entreprises. Alors, quant à parler de représentation du personnel ....
Ceux qui ont travaillé ou travaillent dans des TPE connaissent tous la fameuse phrase citée dès l'embauche : "Quel que soit votre problème, ma porte vous est toujours ouverte ..." et d'ajouter "ici les syndicats et les syndiqués ne sont pas les bienvenus".
L'idée, fortement répandue, y compris dans les rangs politiques de gauche, serait que l'employeur et le salarié sont dans les TPE sur un pied d'égalité et échangent de façon courtoise et constructive. Des très nombreux témoignages de salariés de ces entreprises indiquent plutôt des relations tendues et une attitude plutôt "maître à bord après dieu" de la part des employeurs de TPE. Et si un certain nombre de patrons de PME se conduisent tout à fait correctement avec leurs salariés, il n'est pas justifié de porter au pinacle la totalité.
La pression sur les salariés est beaucoup plus forte qu'ailleurs et même si les banques se montrent particulièrement rétives à leur apporter des financements, il est fréquent que la mauvaise humeur du patron soit collectivement partagée par des remarques sur la motivation des troupes, le fait que LUI (le patron) travaille le samedi et même parfois le dimanche alors qu'EUX, les salariés se prélassaient à leur domicile.
Sans parler bien entendu de la traditionnelle colère liée à l'arrivée des montants de l'URSAFF, du Garp ou de la TVA dont les salariés font les frais !
Sans oublier en ce qui me concerne, la plus belle sortie de l'un de mes ex employeurs : "On ne devrait payer les salariés que lorsqu'on est payé par les fournisseurs"
En clair, on est très loin de la belle histoire que nous narre Jean-François Roubaud, président de la CGPME :
"En effet, dans une TPE, la proximité entre le chef d'entreprise et ses salariés se vit au quotidien. Vouloir coûte que coûte plaquer un système lourd et inadapté à ce type d'entreprise revient à nier la dimension humaine qui fait la richesse du dialogue social construit jour après jour. Eriger en modèle le cadre institutionnel et notamment les instances représentatives du personnel ne correspondant clairement pas aux entreprises de moins de 11 salariés, serait une erreur profonde" - Source CGPME
Erreur profonde mais pour qui ?
Les TPE représentent le plus gros bastion des entreprises françaises et la situation des salariés ne ressemble pas vraiment à .. la dimension humaine qui fait la richesse du dialogue social construit jour après jour
" A la mi-2008, plus d'un million d'entreprises de moins de 10 salariés étaient recensées, employant un cinquième des salariés français, soit 3 millions. Les trois quart d'entre eux dépendent du secteur tertiaire. Sur 10 salariés de TPE, 4 sont employés, 3 sont ouvriers, 2 sont professions intermédiaires et 1 est cadre. Les TPE sont de grosses consommatrices d'emplois précaires : 14 % des salariés y occupent un CDD, 24 % sont à temps partiel et 10 % sont des contrats aidés. Ces derniers sont tout de même en recul ces dernières années : ils représentaient 11 % en 2007 et 22 % en 1999. Par ailleurs, près des deux tiers d'entre eux sont en contrats d'apprentissage" - Source JDN
Plus précisemment
" ... / ... En juin 2008, 23,5% des salariés des TPE travaillaient à temps partiel, contre 15,5% dans les entreprises de 10 salariés ou plus. Plus d'une TPE sur cinq n'employait que des salariés à temps partiel.
"Structurellement, les TPE recourent fréquemment à ce type d'emploi, même si depuis juin 2002, année de la mise en place des 35 heures pour les entreprises de 20 salariés et moins, la proportion de salariés à temps partiel a reculé tous les ans", souligne la direction des études (Dares) du ministère. Les CDD, en hausse continue depuis 2006, concernaient 14,1% des salariés des TPE à la mi-2008, près de deux fois plus que dans les entreprises plus grandes. Les industries agroalimentaires, le commerce et la réparation automobile ainsi que les services aux particuliers y avaient le plus recours.
... / ... Mi-2008, 22% des TPE recouraient à une aide de l'Etat au titre de la politique de l'emploi (hors allègements généraux de cotisations ciblés sur les bas salaires). Une proportion inférieure à 2007 (23%) et proche de celle, "historiquement basse", de 2006 (21,2%), contre plus de 30% en 2000.
... / ... Plus de trois emplois aidés sur quatre (77%) dans les TPE relevaient en juin 2008 d'une formation en alternance, contre 70% en juin 2007 et 39% en juin 2000. Les contrats d'apprentissage, concentrés surtout dans la construction, le commerce et les services aux particuliers, ont connu un vif essor, représentant 64,5% des contrats aidés contre 59,7% en 2007 et 31,4% en 2000.
Mi-2008, plus d'un million d'entreprises de moins de dix salariés employaient trois millions de salariés, soit un cinquième des salariés du privé (hors agriculture). Une part importante de l'emploi salarié dans les services aux particuliers, l'immobilier et la construction se trouve dans des TPE. - Source AFP/ Google
Alors : "la dimension humaine qui fait la richesse du dialogue social construit jour après jour" serait-elle une panacée qui remplacerait -elle une représentation collective institutionnalisée du personnel ?
Le dialogue social ne doit-il être une obligation qu'à partir du 11 eme salarié ?Ne rêvons pas, dans les TPE comme dans toutes les entreprises, il existe le même lien de subordination qui exclut toute égalité entre l'employeur et l'employé
"Le lien de subordination est un des trois éléments caractéristiques du contrat de travail avec la fourniture d'un travail et sa contrepartie, la rémunération. Il permet notamment la distinction du contrat d'entreprise.
... /...Définition juridique (Cass. soc., 13 novembre 1996, Bull. civ., V, n° 386) : « … le lien de subordination est caractérisé par l'exécution d'un travail sous l'autorité de l'employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d'en contrôler l'exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné ; … le travail au sein d'un service organisé peut constituer un indice du lien de subordination lorsque l'employeur détermine unilatéralement les conditions d'exécution du travail » - Source Wikipedia
En fin de compte, une majorité de patrons de TPE considèrent que la taille de leur entreprise doit les exonérer de toute contrainte de dialogue social. La CGPME justifie par les éternels propos paternalistes, la situation :
"Jean-François Roubaud, président de la CGPME, s'est entretenu au Ministère des Affaires sociales et du Travail avec Xavier Darcos. Il lui a notamment fait part de sa désapprobation face à ce qui s'apparente à un ultimatum.
En effet, alors que les partenaires sociaux se sont engagés dans un groupe de travail paritaire sur "le renforcement de l'effectivité de la représentation collective du personnel dans les entreprises de moins de 11 salariés et la mesure de l'audience syndicale dans ces entreprises", le Ministre des Affaires sociales a menacé de reprendre la main en l'absence d'un accord à la fin du mois.
Sur le fond, la Confédération considère qu'une représentation collective institutionnalisée du personnel dans les TPE ne se justifie pas. En effet, dans une TPE, la proximité entre le chef d'entreprise et ses salariés se vit au quotidien. Vouloir coûte que coûte plaquer un système lourd et inadapté à ce type d'entreprise revient à nier la dimension humaine qui fait la richesse du dialogue social construit jour après jour. Eriger en modèle le cadre institutionnel et notamment les instances représentatives du personnel ne correspondant clairement pas aux entreprises de moins de 11 salariés, serait une erreur profonde.
Il convient à cet égard de souligner qu'une représentation collective institutionnalisée du personnel ne constitue en rien une garantie de climat social apaisé ainsi que vient de tristement le rappeler l'actualité récente. C'est pourquoi plutôt que faire peser de nouvelles contraintes sur les TPE, la CGPME a insisté sur la nécessité d'alléger les institutions existantes en fusionnant délégués du personnel, CE et CHSCT dans les PME entre 50 et 300 salariés. - Source Communiqués CGPME
Une information pourtant très importante a été, à notre sens négligée par les media, alors qu'elle peut avoir un fort impact sur la vie de millions de salariés qui travaillent quotidiennement dans les TPE françaises : "Le ministre du Travail exige des avancées rapides sur la mesure de la représentativité dans les TPE"
Explication par le site du journal Les Echos :
" Le ministre du Travail exige des avancées rapides sur la mesure de la représentativité dans les TPE et sur l'égalité salariale.
Xavier Darcos veut des résultats, et vite. Invité de l'Association des journalistes de l'information sociale (Ajis), le ministre du Travail a sommé les partenaires sociaux d'accélérer leur négociation sur la mesure de la représentativité dans les TPE (moins de 10 salariés). Celle-ci, prévue par la loi d'août 2008 sur la modernisation du dialogue social, devait, en théorie, aboutir avant l'été, mais syndicats et patronat viennent à peine de lancer un groupe de travail ! Les fortes divergences patronales sur ce sujet sensible expliquent ce retard et la Rue de Grenelle perd patience. Si leur prochaine séance de discussion, mardi, ne permet pas d'avancées notables, « je réunirai les partenaires sociaux et leur proposerai une voie de sortie, voire je créerai des contraintes de calendrier » , a expliqué Xavier Darcos, agacé par l'attitude patronale : « Je n'ai pas eu l'impression que le Medef soit très mobilisé. En gros, ils disent, ne venez pas nous casser les oreilles avec ce sujet, on a d'autres soucis avec la crise. Je ne peux pas l'accepter. » La réponse du Medef n'a pas tardé. « Je ne comprends pas cette fermeté. Nous avons ouvert le chantier et il n'y a pas d'urgence réelle sur ce thème. Pourquoi risquer ainsi de braquer les patrons de TPE déjà frappés par la crise ? », a rétorqué Stéphane Brousse, conseiller spécial de Laurence Parisot sur les TPE-PME ... / ... " - Source Les Echos
En fait, Xavier Darcos ne fait qu'exploiter un désaccord entre organisations d'employeurs. En effet :
" Les premières discussions n'ont démarré que le 13 octobre, et de manière laborieuse, le Medef refusant d'en faire une priorité, alors que l'Union professionnelle artisanale (UPA) est très demandeuse. Dès 2001, l'UPA a signé avec les syndicats un accord, attaqué en vain en justice par le Medef et la Confédération générale des petites et moyennes Entreprises (CGPME), prévoyant de "renforcer l'efficience de la représentation du personnel" dans son secteur. L'UPA propose à cette fin la création de commissions paritaires territoriales par branches d'activité " - Source Daily Bourse/AFP
Et que dit la CGT
La loi du 20 août 2008 a fait reposer la représentativité des organisations syndicales sur l’audience que leur donnent les salariés aux élections de comité d’entreprise ou de délégués du personnel. Pour les très petites entreprises où le code du travail n’impose pas d’élections professionnelles, elle a stipulé qu’une loi à venir détermine « les moyens d’y renforcer l’effectivité de la représentation collective du personnel et d’y mesurer l’audience des organisations syndicales ». Elle a prévu qu’une négociation nationale entre les organisations patronales et syndicales à ce sujet devait se conclure avant le 30 juin 2009.
En raison des atermoiements du MEDEF et de la CGPME, cette échéance n’a pas été respectée. Néanmoins, lors de la délibération sociale du mois de juin, le patronat avait proposé la mise en place d’un groupe de travail « pour accélérer le processus ». Mais de nouvelles manœuvres dilatoires ont conduit à ce que ce groupe ne se réunisse pour la première fois que … le 13 octobre.
Lors de cette réunion, la CGT a rappelé que l’enjeu consiste à permettre aux 4,2 millions de salariés des très petites entreprises, aujourd’hui dépourvus de tout droit, de construire leur représentation collective et de bénéficier de droits sociaux acquis par leurs homologues des grandes entreprises. Elle a proposé que les organisations patronales et syndicales prennent un double engagement :
- ouvrir la négociation dès la prochaine réunion du 27 octobre ;
- conclure la négociation avant la fin de l’année 2009.
L’effectivité de la représentation collective du personnel des très petites entreprises passe par la mise en place d’instances de représentation élues sur une base inter-entreprises.
Aussi, la CGT a demandé que cette négociation porte sur les 6 points suivants :
- les attributions de ces IRP ;
- les périmètres de constitution ;
- les prérogatives et droits des élus ;
- la composition ;
- les moyens de fonctionnement ;
- les modalités d’élection par les salariés concernés.
Des propositions et demandes convergentes ont été avancées par la CFDT. ... / ... " Source CGT
Alors, débat inutile qui "risque de braquer les patrons de TPE déjà frappés par la crise ? "
Ce n'est pourtant pas l'avis du Ministre : "Précisant que cette question concerne 22% des salariés du privé, M. Darcos a déclaré que "selon la situation qui nous sera donnée, s'ils (les partenaires sociaux, ndlr) n'ont pas trouvé d'accord, je reprendrai la main". "S'ils ne se sont pas mis d'accord, je réunirai les partenaires sociaux à mon ministère et je leur proposerai une voie de sortie, voire je créerai des contraintes de calendrier" Les Echos
Le Ministre, qui est forcément en relation avec le Président, sur ce sujet, ira t-il vraiment jusqu'au bout ?
Nous avons déja une indication sur la détermination du Chef de l'Etat sur l'application du droit social : "Le respect du droit social Français est non négociable..." déclarait Nicolas Sarkozy le 13 Juin 2009, devant ... les salariés de Molex !
Les quelques trois millions de salariés attendent de voir la suite et ... la valeur de la détermination gouvernementale !
Crédit et copyright image
Les Echos Le Cercle Economie

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