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Juste un peu mort

Publié le 22 octobre 2007 par Frednetick

C’est un petit mot qui a bien des significations. Il fut utilisé avec assez peu de réussite durant la campagne présidentielle mais il refait surface aujourd’hui, habillé d’une autre de ses acceptions, étonnant retour.

L’ordre juste n’avait convaincu que les plus fervents partisans de ségolène Royal et pourtant cela renvoyait à une valeur forte de la vie publique, celle de la justice. Un ordre que l’on voulait teinté de la couleur de l’équilibre et du respect de normes morales et juridiques, auxquelles personne, même les puissants et les délinquants ne pourraient échapper.

Par un curieux hasard, la résurgence de ce mot, juste, se fait dans un contexte bien particulier, celui de la violence routière. Or depuis des années, les comportements routiers ont été peu à peu criminalisés. S’extrayant de la logique purement civiliste et cependant ultra favorable de la loi dite Badinter du 5 juillet 1985, quittant le doux cocon de la réparation pécunière pour s’aventurer sur les chemins parfois glissants de la répression pénale, la logique est aujourd’hui bien affirmée.

C’est dans ce contexte tendu, et qui le demeure malgré les “bons” chiffres de la sécurité routière1 , que les campagnes de prévention ont franchi des palliers successifs. Du Charles Trenet sur fond d’image de tôle froissée, de la mort d’un proche ou d’ami pour avoir oublié que celui qui conduit c’est celui qui ne boit pas et aujourd’hui une campagne qui repose sur un seul mot, juste.

Qui n’a jamais prononcé cette phrase “c’est juste un petit truc”? J’ai juste dépassé de 5 km/h la vitesse limite, j’ai juste doublé un peu tard etc.

Le terme n’a toutefois pas d’autre réelle acception que celui le reliant à la justice. La déformation que le language courant en fait est donc fort trompeuse puisque l’individu concerné substitue sa propre vision du juste à celle qu’on lui présente comme étant légale ou optimale. Le libre arbitre humain en conflit avec l’institution productive de norme. Par cette décision de ce qui est juste, en assumant cette petite différence au nom d’un sacro saint droit à juger au travers de sa propre vision, l’Homme modèle son environnement.

J’ai juste un peu trop bu, ce n’est pas si grave, presque raisonnable pourrait-on avancer.

C’est là que réside la force de cette nouvelle campagne. On peut rouler juste un peu vite, on peut rouler juste un peu près, on peut passer juste un peu à l’orange, mais on tue pour de vrai parcequ’on ne peut pas être juste un peu mort. On ne peut pas trouver de justification lorsque l’on choisit de s’affranchir des règles. Ou du moins on ne peut pas s’affranchir de sa responsabilité.

Si l’on exerce son libre arbitre pour s’affranchir alors on doit aussi admettre que cette liberté, comme tout pouvoir trouve son pendant dans les responsabilités qui nous incombent alors.

On roule juste un peu trop vite, on tuevraiment quelqu’un, on va juste en prison.

En Homme libre. dans sa tête du moins.

  1. qui ne sont pas si bons que cela au regard des autres situations européennes [Retour]

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