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Des témoins dévoilent le droit d’asile (Observatoire pour l’accueil des demandeurs d’asile OASIS)

Publié le 11 novembre 2009 par Combatsdh

En France, le droit d’asile fait l’objet d’un traitement médiatique qui semble s’amplifier.

Au nom d’une politique de contrôle des migrations, l’Etat français peut-il renvoyer des étrangers dans leur pays en guerre, en Afghanistan, au Sri Lanka ou en Guinée?

Faut-il loger ou déloger les demandeurs d’asile sans abri qui vivent à la rue, sous nos ponts ou qui transforment malgré eux nos forêts en « Jungle » ?

Dans la communication du pouvoir en place, ce droit constitutionnel est clairement pris en otage ou noyé dans le courant dominant d’une politique d’immigration répressive très connectées aux enjeux électoraux. En parallèle, le gouvernement met en avant la générosité d’une France des droits de l’Homme qui accueille davantage de réfugiés que ses pays voisins. Cette tension entre accueil et répression est récurrente. Ainsi, comme d’autres avant lui, Eric Besson affiche sa détermination à expulser des Afghans en même temps qu’il clame que la France est le pays le plus généreux d’Europe en la matière.

La communication officielle des statistiques annuelles est tout aussi éclairante. Si le nombre de statuts de réfugié accordés chaque année en France est méconnu du grand public, celui des « reconduites à la frontière exécutées » fait l’objet d’une grande publicité. De la sorte, ce qui devrait faire notre fierté est honteusement passé sous silence, tandis que ce qui nous déshonore est annoncé comme un grand succès.

Ainsi va la schizophrénie d’Etat quand elle parle de ses étrangers. Soyons fiers d’être une terre d’accueil mais ne le crions pas trop, restons-en au principe flou. Soyons fiers de la fermeture de nos frontières, et précis à propos des sanctions qui frappent quiconque les franchit indument.

Mais, fait relativement nouveau, le droit d’asile s’incarne, il prend vie et se donne à voir à travers les témoignages, de plus en plus nombreux, de ces étrangers en quête d’asile. Afghans évacués de la jungle de Calais au journal de 20H00. Documentaire dans un centre de rétention à une heure de grande audience sur TF1. Rapports de recherche qui se multiplient dans le domaine des sciences humaines. Création d’une Cité nationale de l’histoire de l’immigration. Sites internet retraçant l’histoire des réfugiés portugais ou espagnols. Jusqu’à des bouts d’histoires de vie qui inspirent des fictions à grand succès telles que le film Welcome ou d’autres, plus méconnus.

Ces témoignages ont une vertu particulière : offrir un discours ancré dans le concret, le quotidien. Une approche qui rompt en partie avec les débats répétés et maîtrisés des politiques et des citoyens spécialisés. Nous assistons peut être à un mouvement propre à effacer peu à peu la buée que nos politiques ont réussi à déposer sur la vitre blindée qui sépare les citoyens des personnes en quête d’asile.

C’est dans cette tendance que s’inscrit le site internet de l’Observatoire pour l’accueil des demandeurs d’asile : www.droitdasile.org.

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Combats pour les droits de l’homme accueille tout naturellement cette présentation par David ROHI de de l’Observatoire pour l’accueil des demandeurs d’asile. Malheureusement la France n’est plus un OASIS pour les demandeurs d’asile.

Le site propose des rapports d’études sociologiques menées à Toulouse pour tenter de caractériser et d’analyser la réalité du droit d’asile. Les internautes pourront également y découvrir des témoignages (audio et vidéo) de demandeurs d’asile. Ces paroles de migrants nous donnent à effleurer la difficulté de leurs parcours. Leurs mots nous permettent de saisir leurs émotion, leurs points de vue, leurs  propres analyses de l’accueil que nous leur réservons et de la politique que nos dirigeants mettent en œuvre.

Les travailleurs sociaux et les associations qui les accompagnent au quotidien nous font également part de leur expérience de la loi et de l’administration. Ils sont les témoins privilégiés d’une réalité où s’entrechoquent une tradition d’accueil et un nationalisme parfois xénophobe, d’une réalité qui prend bien souvent en otage des demandeurs d’asile très précaires.

Cependant, comme toute lutte qui tente de redonner du pouvoir aux victimes d’une oppression, le site droitdasile.org n’est pas exempt de toute forme d’instrumentalisation. En effet, mettre en avant les témoignages de ceux qui subissent les restrictions de la politique française d’asile permet certainement de les reconnaître, d’accorder une légitimité à leurs visions et à leurs revendications. Mais c’est aussi un excellent moyen pour illustrer et légitimer les thèses des partisans d’une politique plus généreuse en matière d’accueil des réfugiés. Un outil pour  toucher l’affect du lecteur, de l’auditeur. Bref, une instrumentalisation qui, même armée de bonnes intentions, pose la question de la place des migrants dans les luttes et les débats qui font et défont leurs droits et leur avenir.

Dans l’histoire française de l’émancipation des migrants, quels combats avons nous menés où les premiers intéressés avaient le pouvoir de décider et de négocier les formes des rapports de force qui se sont construits ? Cette participation active des migrants est-elle une utopie ? Autrement dit, sont-ils armés pour ce combat ou peut-on les doter de ressources qui ne les dépossèdent pas pour autant de leur liberté d’action ? Sommes-nous capables de prendre des risques pour les accompagner dans des formes de mobilisation qui remettent les nôtres en question ? Sommes-nous en mesure de créer des espaces pour favoriser l’émergence de mouvements de migrants articulés à d’autres acteurs de la société civile ?

Autant de questions en contrepoint de notre initiative qui se rejoueront dans les mouvements citoyens à venir.

David Rohi,

Sociologue


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