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Les manifestants préfèrent Facebook à la rue

Publié le 11 novembre 2009 par Fouchardphotographe @fouchardphoto

Grâce à une mobilisation sans précédent sur le site de réseau social, les autorités ont été obligées de faire machine arrière dans la confrontation qui opposait la commission anticorruption à la police.

Ne sous-estimons pas Facebook. Cette masse de gens “silencieux” qui y sont inscrits peut se transformer, le moment venu, en un groupe de pression de poids, voire en un “Parlement en ligne” capable de se substituer à la véritable Assemblée nationale. C'est ce à quoi nous venons d'assister avec l'affaire de la Commission pour l'éradication de la corruption (KPK) [la lutte qui oppose depuis plusieurs mois cette commission à la police a pris un tournant spectaculaire avec l'arrestation, le 29 octobre, de deux vice-­présidents de la KPK. Après une mobilisation immédiate de l'opinion, les deux hommes ont été relâchés]. Sur son mur de Facebook, le célèbre éditorialiste Wimar Witoelar a écrit que “le mouvement populaire de mai 1998 combattait un système [la dictature de Suharto], alors que celui de novembre 2009 est issu du système même [la démocratie]”. Toujours sur Facebook, Goenawan Mohamad [journaliste et écrivain très influent] s'interroge : “L'appareil judiciaire indonésien est-il à ce point dépravé ? Ou son état était-il autrefois tout aussi grave mais passé sous silence ?” Ces commentaires et d'autres mis en ligne par des centaines de milliers d'utilisateurs de Facebook [en quelques jours, plus d'un million de personnes ont signé sur ce site une pétition en faveur de la KPK] ont contribué à mettre un terme au conflit opposant la police et la KPK. La mobilisation citoyenne massive via Facebook témoigne d'une démocratie qui permet effectivement d'exprimer librement ses opinions et sa colère face à l'irresponsabilité des élites dirigeantes. Par élites, il faut entendre l'appareil judiciaire ainsi que la police, qui, dans son arrogance démesurée, a produit l'expression “lézard contre crocodile” [le lézard désignant la KPK et le crocodile la police – une expression dont se sont emparés par dérision les mouvements citoyens]. Le “Parlement en ligne” apparaît comme une solution au moment où la communication entre les diverses institutions étatiques et les citoyens est dans l'impasse. Il rend compte du désir et du besoin du public d'un nouveau sens de la justice. Porteur de signes encourageants, il incarne l'influence directe du peuple sur les actes du président. Il pousse le président à prendre des mesures au service du plus grand nombre, telles que la lutte anticorruption et la réforme de la bureaucratie. Mais, à long terme, la présence permanente de ce Parlement en ligne pourrait finir par stigmatiser l'incompétence d'un gouvernement incapable de faire fonctionner les institutions conformément aux besoins de la société. * Chercheur en sciences sociales et culturelles au LIPI (Institut indonésien des sciences).


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