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Mînâkshî

Publié le 16 novembre 2009 par Wilverge

Mînâkshî
Madurai, Inde.
Madurai est une des villes les plus anciennes de l'Inde. Grand centre littéraire durant les trois premiers siècles de l'ère chrétienne, elle s'épanouira au niveau commercial avec les Grecs et les Romains. Elle évoluera entre prospérité et conquêtes, habitée par Marco Polo entre 1288 et 1293, gouvernée par plusieurs rois avec des noms que vous ne retiendriez pas jusqu'en 1801, elle passera sous le contrôle de la compagnie anglaise des Indes orientales, avant de redevenir propriété indienne. Deux cents ans plus tard vinrent damoiselle Nadège et sir William les conquistadores pour un séjour d'échange culturel et économique avant de poursuivre leur chemin vers un grand port de la mer d’Arabie.
L'arrivée dans ce nouveau monde est difficile. Portant notre avoir sur le dos, il nous est impossible de chercher seuls un endroit où dormir. Les soi-disant tailleurs nous suivent en nous montrant des hôtels que nous avions déjà vus, dans le but d'avoir une commission sur le prix de la chambre. Et leur pourcentage n'est pas déduit du prix de la chambre, mais bien ajouté à celui-ci. Alors le lendemain, nous cherchons un autre endroit sans sac, incognito.
Assis sur le trottoir (communément appelé parking en Inde), on observe la scène qui défile. Sans pop-corn, nous regardons ce métrage perpétuel qu'est la vie ici. Un film trois dimensions ; les gens, la beauté, le bordel, sans avoir l'air zouf avec des lunettes deux couleurs.
Dans la ville en général, on est transporté par le flot de gens, de véhicules, ou de vaches. Au pied du temple de Mînâkshî (seules les voyelles sont protégées du soleil), on est transporté par la tradition, l'importance de la religion. Les femmes sont élégantes. Joliment vêtues de leurs plus beaux saris, elles portent dans leurs coiffures des guirlandes de fleurs de jasmins. Les familles se rassemblent pour visiter le monument le temps d'une prière ou deux. Les gens s'arrêtent devant l'entrée, ferment les yeux et joignent les mains, puis repartent.
Un jeune garçon nous offre une flûte de Pan en plastique à vingt roupies alors qu'il la vendait dix à un indien non loin de nous. Nous disons non, comme à la vendeuse de crayons de bois. Nous sommes des êtres sans cœur.
Une vieille dame quête de l'argent d'un signe de main vers la bouche. Elle est plissée comme une prune oubliée. Nous disons non. Nous sommes des êtres ignobles, contrairement à une élégante Indienne qui lui offre une pièce. La vieille dame prend l'argent, marmonne quelques mots et tire la pièce au pied de l'arbre décoré.
J'échappe un blasphème.
À côté de cet arbre, un homme porte une longue barbe, une jupe blanche et un turban sur la tête. Rien d'autre. Un trait de craie blanche est appliqué sur son front, ainsi qu'un point rouge. Il est intrigant.
Comme l'architecture du temple l'est. Tellement inesthétique que ça devient beau. Les gorupams sont surchargés de sculptures. Il y a des dieux, des animaux, et des singes vivants.
Mînâkshî
Mînâkshî
Ces temples attirent des touristes et de nombreux pèlerins. Madurai est parfois surnommée l'Athènes de l'Orient. C'est pourquoi pour la dixième fois, je dis non à l'offre de « free top view » à l'homme qui insiste sur le fait que c'est « no money » et qui nous suit. Les choses gratuites n'existent pas dans ce monde, et certainement pas en Inde, et certainement pas avec la tête que l’on a.
Mais voir les temples du haut d'un édifice m'intéresse. Alors le lendemain, on décide de tenter le coup. Je me dis que ça doit être comme les thés marocains gratuits, que l'on sert dans une maison perdue dans une médina labyrinthique, en haut d'un escalier étroit dans une pièce éclairée d'un seul rayon de soleil. Et que je n'ai toujours pas de tapis. Alors ça devrait aller.
Mînâkshî
Bref, on se ramasse sur le toit d'un emporium et l'on profite de la vue sur les temples, parlant de tout, mais surtout de rien avec le commerçant qui nous accompagne. La séance de photo terminée, on doit redescendre les quatre étages et nous savons que c'est à ce moment que ça peut devenir pénible.
L'homme nous montre des sculptures d'éléphants, des pièces de bronze, des tapis. Il nous offre d'acheter un verre de thé chaï, un café.
Puis Nad pointe du doigt une magnifique porte en acier digne du Moyen Âge.
« - Cette porte vous intéresse?
- Non, c'est trop gros dans un sac.
- Oui, mais on peut arranger la livraison.
- Désolé, on n'a pas vraiment besoin d'une porte dans notre pas-de-maison.

Et là, j'ai un rendez-vous téléphonique pour mon pas-de-travail. Faut qu'on y aille. »
Plus facile qu'au Maroc, car il n'offre pas l'irrésistible thé à la menthe gratuitement. On vend plutôt le thé chaï qui goûte les tétines chèvres pour nous retenir. Erreur.
Les gens malhonnêtes que nous sommes vont terminer nos échanges économiques plus loin, c'est-à-dire faire le shopping de Nad. Elle doit camoufler ses formes plus que jamais si elle ne veut plus attirer toute l'attention.
-Will.


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