Suite au débat toujours en cours sur evolmontp (la liste de discussion des évolutionnistes de Montpellier) à propos d’une conférence sur le dessein intelligent qui doit se tenir à Montpellier la semaine prochaine, je me suis dit qu’il était temps de ressortir un vieux tableau de données qui traînait dans un coin de mon disque dur.
Pour remplir ce tableau, j’avais participé à un débat sur le dessein intelligent chez des vrais de vrais hardcore (la bande à Dembsky), et analysé un peu le contenu de réponses à une phrase simple : On est bien d’accord qu’on génère de la diversité par mutation au hasard, et qu’ensuite on échantillonne dans cette diversité avec des mécanismes, donc pas entièrement au hasard?
. Sur les trente et quelques commentaires qui avaient suivi, j’ai relevé pour chaque intervenant le nombre de fois ou différents « arguments » étaient utilisés.
Un petit mot avant tout.
Face à des partisans du dessein intelligent (autrement dit, des gens qu’on situe sur un continuum entre la folie furieuse et l’extrémisme religieux), on a le choix entre trois réactions possibles. Soit on ne fait rien et dans ce cas, on donne tacitement notre accord. Soit on censure, et on crée des martyrs (j’ai dit tout le mal que je pensais de cette solution). Soit on y va, on se met en face d’eux, et on leur balance de la science plein la tronche pour que le public puisse avoir l’autre côté du débat – et on fait ça de manière fun, pédagogique, et tout. C’est ce qui manquait quand Jean Staune a pu étaler ses pseudo-idées à Lyon. Quitte a leur balancer un truc dans la tronche, comme on en parlait récemment, depuis le temps qu’ils nous courent sur le haricot avec leur religiosité larvée, autant que ce soit un poing, ça sert à rien mais on en a tous envie (mais il s’agit de rester constructif).
Bref, donc, il faut aller empêcher ces gens la de s’exprimer, en leur volant leur public pour faire de la vulgarisation.
Autant regarder les choses en face, ça ne va pas être facile : c’est la que mes petites données me font bien peur.
Je passe sur la méthode précise pour obtenir cette figure (une AFC), disons simplement qu’elle met en relation des personnes (en bleu) avec des techniques d’argumentation (en rouge).
On observe trois clusters différents.
Celui qui tourne autour de DaveScot, que ceux qui traînent dans des milieux peu fréquentables connaissent (conservapedia, uncommon descent…), est focalisé sur l’utilisation du sophisme (je ne les ai pas listé séparément, mais c’est surtout de l’argumentum ad ignorantiam, de la rupture de corrélation, et autres non sequitur). Les attaques ad hominem ont été séparées de ce lot. Ce cluster utilise aussi largement les accusations d’incompétence (en matière d’évolution), et la transformation d’un fait plutôt neutre en preuve (exemple : si il y a de la dérive génétique, c’est qu’il n’y a pas de mécanismes, donc pas d’évolution, ergo deus est).
L’autre cluster est en bas à gauche (vers alanius), et se concentre sur l’autre partie des « arguments » habituellement utilisés : accusation de dogmatisme, absence de distinction entre théorie au sens scientifique et théorie au sens courant, et surtout réfutation systématique de toute preuve sous prétexte qu’on ne peut pas exclure l’effet du créateur.
A ce point, je remarque simplement que dans l’espace de dialogue du dessein intelligent, on trouve la droite chrétienne la plus réac’ et la plus la créationiste qu’on puisse imaginer, genre Sarah Palin et compagnie. Du coup, je simplifie un peu mes équations, avec dessein intelligent = créationisme déguisé.
Le dernier cluster, enfin, en haut à gauche, est probablement celui qui regroupe les cas désespérés : agression, tentative de ridiculiser l’opposant, et surtout surinterprétation : si tu dis que la compétition a un rôle, ils expliquent au monde entier que tu veux brûler les handicapés et ceux qui sont moins aptes que toi. Le premier chapitre du deuxième livre de Jean Staune finit sur cette image des scientifiques, en passant…
Les deux derniers groupes sont assez peu différenciés, et partagent des personnes autant que des arguments.
J’en tire deux idées. D’une part, si la communauté du dessein intelligent dans son ensemble ne vole pas très haut, on observe un intéressant phénomène de spécialisation sur certains arguments. D’autre part, débattre avec eux ne sert à rien, puisque toutes les interventions avaient pour but d’exclure l’élément hostile pour ensuite continuer à prouver l’œuvre de Dieu. Ce qui nous amène à une conclusion pratique : ne leur parlons pas. Allons dans leurs conférences pour prendre la parole, mais surtout parlons au public, et continuons la dissémination des connaissances…
Ce qui implique, bien sûr, de les laisser parler et d’être la pour exposer à ceux qui écoutent les failles de leurs arguments.