Une fois arrivés à la gare centrale de Tokyo on doit transférer du train au métro pour se rendre à notre hôtel. On se dirige vers les machines distributrices pour acheter nos billets. On observe le plan affiché sur le mur devant nous pour s'orienter. On reste là de longues minutes comme deux cons à fixer le mur, incrédules, la bouche grande ouverte. Sur la carte, 14 lignes se croisent et se recroisent dans tous les sens, reliant rien de moins que 282 stations! Il y a trop de boutons sur l'appareil, ça risque d'être long, on passe à la machine distributrice suivante pour se prendre un café, mais là encore, c'est pareil, il doit y avoir au moins 50 choix de café!
Tant bien que mal, on parvient au quartier de notre hôtel, Akihabara, aussi connu sous le nom d'Electric town, véritable paradis pour geeks, la mecque du gadget! On peut y trouver tous les bidules électroniques inimaginables et encore plus. Les librairies sur plusieurs étages vendent uniquement des mangas, les jeunes s'amusent dans des arcades du futur et les touristes font du shopping dans les centaines de commerces où l'on trouve les tout derniers PC. Les billboards n'annoncent pas la sortie des plus récents films, mais celles des jeux vidéo. Dans certains café, on peut regarder des compétitions sur nintendo. Dans la rue, des filles déguisées en personnages de jeux classiques passent des flyers : ce soir, 8-bit party! Musique de game boy toute la nuit, rien de tel que de se shaker le booty sur le dernier tube de Mario bros!
La pluie se met de la partie, on se réfugie dans le premier magasin que l'on croise, un sex shop de 6 étages! On a entendu de drôles de choses à propos des Japonais, paraîtrait qu'ils sont pas mal kinky, on décide de vérifier l'exactitude de la rumeur par nous-mêmes. Ça commence mollo, sur le premier niveau, costumes de bonnes, uniformes d'écolières, rien de trop choquant. On monte à la section gadget qui vibre avec ou sans fil, wow, même dans les trucs de cul ils sont hi-tech. On poursuit vers l'étage sado maso, casquettes de cuir coquettes et fouets hello kity, bon, rien de mal, il en faut pour tous les goûts! On allait passer rapidement la section vidéo, quand du coin de l'oeil, on aperçoit les dessins animés trois x. Des monstres venus de l'espace forniquent avec de jeunes filles, une orgie de super héros en plein vol au-dessus de la ville, un trip à trois de zombies putréfiés, ça nous fait bien rire! Mais là, juste à côté, on tombe sur une rangée de DVD où l'on peut observer des fillettes de 7 ou 8 ans faire du fitness en maillot, rien d'illégal, mais fuck quand l'on pense à l'usage que les pervers en font, c'est complètement dégueulasse. En redescendant, on trouve les mangas qui frôlent la promotion de l'inceste beaucoup moins drôles et les costumes d'écolières ne sont plus cools du tout. L'érotisation de la jeunesse semble tout à fait normale au Japon, merde, c'est malsain de s'exciter sur ces cochonneries-là et ça se vend beaucoup et partout, ici!
Pour se changer les idées et se marrer un bon coup, on décide d'aller dans un maid café, la toute dernière mode à Tokyo. Dans ces cafés, les serveuses sont costumées en bonne, un personnage qui revient souvent dans les mangas. Le client est accueilli par un "bienvenue à la maison, maître" pour lui donner l'impression d'avoir ses propres servantes. Nos domestiques se mettent à genoux pour nous servir et tous les clients chantent avec enthousiasme une contine en faisant des signes de coeur vers nos bières avec leurs doigts. Nous, on a un fou rire monstre parce que l'on ne comprend rien de ce qui se passe. On avait oublié que l'on ne parle pas un mot de japonais, que personne ne parle anglais et que ce n'est définitivement pas un endroit fréquenté par les touristes! On a l'impression de prendre le thé dans une maison de poupée. Les divans roses, les rideaux bleus poudre, les petites tasses jouets... Les deux filles qui dégustent des sundaes assis à notre droite ont la même styliste que fraisinette et à notre gauche, deux hommes d'affaires veston cravate jouent aux cartes avec leur bonne, des oreilles de lapin sur la tête! L'endroit le plus étrange où l'on a jamais mis les pieds, malheureusement les photos sont interdites.
Pour continuer dans le bizarre, on se rend dans un parc où tous les dimanches, de jeunes marginaux se regroupent habillés comme leurs héros de manga préférés. Aussi, il est supposé y avoir un groupe, le Rockabilly Harajuku City Gang, qui danse sur du rock tonitruant et qui sont vêtus de leurs plus beaux frocs de cuir, les cheveux crêpés à la Elvis sur l'acide! En cherchant les rebelles, on a certainement pris un mauvais tournant parce qu'en plein milieu du parc, on est plutôt tombés sur ce qui semble être un concours de beauté pour enfants. Des gamines en kimono et des petits bonshommes en samuraï tout fier de se faire prendre en photos. Plus loin un mariage, on devrait se perdre plus souvent comme ça!
Quand on trouve enfin les rockeurs, ils sont déjà bien bourrés, une dernière bière, quelques étirements, c'est du sérieux, LET'S ROCK!!!!
Les ados ont beau avoir passé plusieurs heures à se préparer ce matin, quand ont leur demande de les photographier, ils feignent d'être surpris comme s'ils étaient dans le parc comme ça, sans raison, hésitent comme de mauvais comédiens, acceptent d'un air désinvolte et prennent aussitôt leurs poses clairement étudiées depuis des semaines devant le miroir. Partout dans le monde, un ado ça reste un ado.
On se repose un peu les jambes dans un autre café, au deuxième étage d'un centre commercial avec vue sur la traverse piétonne la plus achalandée au monde, ça semble franchement nul comme ça, mais c'est assez impressionnant.
On finit notre étrange journée par une nuit dans un hôtel capsule. Il s’agit de toutes petites chambres modulaires empilées les unes par-dessus les autres, à peine plus grandes qu'un cercueil. Elles sont conçues pour les hommes d'affaires qui, ayant travaillé trop fort ou trop bu, ont raté le dernier train. À entendre les ronflements, la plupart ont trop bu! À l'intérieur, au plafond, c'est à dire à moins de 30 cm de notre visage, une télé et une radio, sur le sol, un matelas, un drap, un oreiller et c'est tout, pas de place pour les bagages et surtout pas d'espace pour nous deux. On a chacun notre capsule et notre casier dans lequel tout est fourni pour ceux qui n'avaient pas prévu y passer la nuit : brosse à dents, shampoing, rasoir, Q-tips et même un yukata, une robe de chambre japonaise.
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