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Les congés en raison de problèmes de santé mentale explosent au Québec

Publié le 24 novembre 2009 par Phelicity
Alors que les congés de maladie en raison de problèmes de santé mentale explosent au Québec, les victimes sont souvent les dernières à admettre qu'elles ont un problème.
Oeuvrant dans le journalisme, Katerine Brisebois raconte qu'elle était un « vrai petit pitbull ». Performante et perfectionniste, elle était partout.
On avait besoin de ses services en région? Elle partait en région. « A un moment donné, en deux ans, j'ai déménagé dans cinq villes différentes », a-t-elle relaté.
Puis un jour, elle a cassé. « Un jeudi, le médecin m'a annoncé que j'étais en dépression majeure. Et quelle a été ma première pensée? Le travail. J'avais tel dossier sur mon bureau, telle et telle personne à rappeler, ça ne se pouvait pas que je m'absente là, tout de suite, pour longtemps », s'est-elle rappelée.
« En plus, quand les gens apprennent que t'as un burn-out, ce n'est pas comme pour une autre maladie : les petits messages et les appels de prompt rétablissement, moi, je n'y ai pas eu droit », a ajouté Mme Brisebois.
Et c'est sans parler de la reprise du travail, alors que le malaise est palpable.
« Quand j'ai été remise sur pied, j'ai tenté d'être affectée à d'autres tâches, mais j'ai eu une fin de non-recevoir. J'ai démissionné », a-t-elle déploré.
Au cours des sept dernières années, Katerine Brisebois a voyagé beaucoup, fait des piges pour les Nations unies, fait un peu de travail humanitaire et découvert les mérites de la méditation.
La porte-parole de l'Association canadienne des compagnies d'assurances de personnes, Claude Di Stasio, a indiqué qu'au Québec, les problèmes de santé mentale représentent 40 % de toutes les prestations versées aux employés.
Pour le Québec, en 2007, cela représentait 590 millions $. « Les problèmes de santé mentale arrivent au premier rang des prestations versées, bien devant les problèmes cardiovasculaires ou musculo-squelettiques, les fameux problèmes de dos, par exemple », a mentionné Mme Di Stasio.
Les assureurs privés sont très préoccupés par l'ampleur du problème, a dit Mme Di Stasio, et sont de plus en plus conscients de l'importance de la prévention. « On sait très bien qu'une personne en arrêt de travail pendant trois mois a toutes les chances de réussir sa réinsertion; après six mois, le retour est difficile; après deux ans, à peine 5 % reprennent le boulot », a-t-elle fait valoir.
A la Commission de la santé et de la sécurité du travail (CSST), les données sont tout aussi alarmantes. En 1996, les problèmes de santé mentale entraînaient, annuellement, des déboursés de 6,5 millions $. En 2007, on en était à 15,1 millions $ , en 1995, la CSST a relevé 895 « lésions », comme elle les appelle. En 2007? Pas moins de 1 209.
« L'invalidité liée à la santé mentale est de plus longue durée que pour d'autres pathologies et ça ajoute au problème, a relevé le vice-président principal aux assurances collectives à l'Industrielle Alliance, Jacques Parent. A la veille de rentrer au travail après trois semaines de vacances, on est toujours un peu nerveux, imaginez quand ça fait trois ou quatre mois que vous n'y êtes pas allé. »
Le président de l'Ordre des conseillers en ressources humaines agréés, Florent Francoeur, a signalé qu'il ne faut pas se faire d'illusion. « Il serait de bon ton de dire que ce sont pour des motifs humains que les entreprises se penchent davantage sur ces questions, mais ce n'est pas le cas : les entreprises voient leurs coûts d'assurances exploser, et ça inquiète beaucoup », a-t-il soutenu.
« Lors des crises précédentes, les employeurs se disaient qu'ils n'avaient qu'à mettre des gens à pied au creux de la vague et à les réembaucher ensuite, mais les pénuries actuelles de main-d'oeuvre incitent maintenant à plus de prudence, a-t-il poursuivi. On cherche maintenant à sabrer ailleurs, notamment dans les coûts de plus en plus élevés liés aux assurances. »
Au surplus, les nouvelles vont vite, a aussi fait remarquer M. Francoeur. Aucune entreprise n'a intérêt à être identifiée, dans un milieu donné, comme un endroit où les gens tombent comme des mouches.
En France, qui aura envie d'aller travailler chez France Telecom, alors que 26 de ses employés se sont suicidés au cours des 18 derniers mois? En tout cas, là-bas, on ne prend plus cela à la légère : pas moins de 80 000 salariés ont dû répondre à un questionnaire sur le stress et 1 000 personnes, choisies au hasard, feront l'objet d'une entrevue individuelle, afin d'en savoir plus sur le malaise profond de l'organisation.

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