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La barbe, ogre identitaire

Publié le 26 novembre 2009 par Francisbf

Une barbe, c'est un peu le même fardeau que le mariage pour une femme : on y dissout son identité.

On se perd dedans.

Vous êtes né. Vous avez grandi, voulu tuer votre père et épouser votre mère, êtes devenu une bête au ping-pong, fan des Spice Girls, puis d'Alice Cooper, avez commencé une collection de timbres, lu l'intégrale de Gotlib et de Panaït Istrati, avez fait de la manutention dans un aéroport pendant vos études d'esthéticien, êtes devenu accro aux jeux de rôle, bref vous êtes construit votre personnage, et un beau jour, dans un accès de flemme, vous vous laissez pousser la barbe, et paf, tout ce que vous étiez est oublié, vous êtes devenu le barbu.

Défini par vos seuls poils. C'est un peu triste.

J'ai toujours un peu de mal à me considérer comme barbu. Après tout, j'ai vécu 80% de ma vie sans l'être à temps plein, hein.

Puis en fait, je m'en fiche un peu. Comme je disais, je me la suis laissé pousser parce que ça me permettait de me lever plus tard le matin. Il suffit d'entretenir un peu de temps en temps avec quelques coups de ciseau là où ça dépasse, et hop.

C'est comme ça. C'est pareil pour les filles, ceci dit, c'est celles qui se laissent pousser les poils sous les bras qu'on remarque, pas celles qui se défrichent les aisselles à grands coups de produits toxiques (loués soient les produits toxiques). Mais même elles, on les définit pas par ça. Bon, généralement, on les appelle « la hippie, là » ou « l'allemande de l'est », mais ça ne tient pas qu'à leurs poils. Y'a tout un tas d'autres facteurs.

Mais les barbus ne sont que barbus.

Ou alors, il faut qu'ils se soient vraiment beaucoup illustrés dans un autre domaine. Et encore, la barbe vient rapidement dans leurs traits dominants.

Que retient-on en deuxième de Barbe-Bleue ou de Landru ? Qu'ils étaient barbus.

De Karl Marx ou Darwin ? Barbus aussi.

Et c'est un processus à peu près irréversible. On s'y noie nous-mêmes. On finit par être ce qu'on voit en nous, des barbus, uniquement des barbus. On ne se voit plus sans. Si on se tond par accident d'un peu trop près, on se cache le temps que ça repousse, parce que vraiment, voir le menton d'un barbu, c'est ridicule.

Dévorés par nos barbe.

C'est affreux.

Je ne suis pas une barbe, je suis un homme libre !

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