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Le splendide

Publié le 28 novembre 2009 par Wilverge

Le splendide
Mysore, Inde.
Nous sommes chacun installés devant un masala dosa, une crêpe légèrement croquante garnie d'un curry de légume. On sent la texture, la chaleur, les contrastes entre la sauce rouge et la sauce blanche, sans même y avoir posé la langue, car, on le mange avec la main. Celle de droite, car la gauche est impure. Elle sert à se décrotter le nez. Et ici, elle semble servir souvent.
Quatre hommes sont assis à notre droite, autour d'une autre table. Ils boivent tous un thé chaï. Ils portent des moustaches. Chacun une. Ils nous observent parce qu'on est différent. On les observe parce qu'ils nous observent. Nous nous observons.
L'un d'eux se met à nous parler dans sa langue. On lui fait signe avec des mouvements de sourcils que nous ne comprenons pas. Ils sourient.
Un autre qui parle anglais sauve la situation. Il nous demande :
« - Connaissez-vous le Canada ?
- Ben oui! On vient de là!
- ? »
Deux beaux colons en terre inconnue. Le gars voulait dire « Kannada », la langue la plus parlée dans l'état de Karnataka, avec l'Urdu et le Telugu. Il y a deux langues officielles en Inde : l'Hindi et l'Anglais. Puis il y a vingt-deux autres langues reconnues officiellement et un paquet de dialectes. Alors, c'est mélangeant. Comme acheter un billet de train, choisir à manger dans la rue ou remplir la paperasse interminable pour obtenir une chambre. Mais heureusement que tout ça, ce n'est pas important. C'est seulement un monde à part…
On fait notre chemin parmi la foule qui parle différentes langues, toutes incompréhensibles à nos oreilles. Le bruit de fond nous transporte à l'entrée. Deux immenses têtes d'éléphants empaillées encadrent la porte principale, richement ornée. Le plancher de marbre nous mène de pièce en pièce. On se sent comme dans les films, les contes ou les aventures de Tintin. La richesse déraisonnable des lieux est envoûtante. Les vitraux sont grandioses et soutenus par d'imposantes arches d'acier importées d'Écosse. Certaines portes sont en cuivre ou tout simplement incrustées d'ivoire. Dans une pièce, le plafond est en bois de tek birman finement sculpté. Dans l'autre est disposé le palanquin du Maharaja, pesant 750 kilos dont 80 seulement en feuilles d'or. Un accessoire de style qui accompagne assez bien les cadres en défenses d'éléphant, les tigres en bronze ou les chaises en cristal. Un escalier de fonte en spirale mène au deuxième étage, un peu plus près des dieux qui peuplent les hauts plafonds. Le dieu de la pluie, assis sur un crocodile, parcourt les océans célestes et contrôle le côté sombre du ciel.
C'est le palace d'Ambavilas.
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Ça fait rêver n'est-ce pas ? Dire qu'avant, pour moi, un gars assis sur un crocodile c'était Steve Irwin et que celui qui contrôlait le côté sombre, c'était Darth Vader.
Bof.
Je préfère l'image magique et colorée que j'ai en tête aujourd'hui et que je retrouve dans ce que je contemple au quotidien.
Les vifs saris des femmes et leurs bijoux brillants. Leurs cheveux si noirs, leur peau si brune. Les vaches unies ou tachetées. Les murs des maisons, les décorations sur les autobus, les guirlandes de fleurs omniprésentes.
Le splendide
Les teintures dans les marchés, les épices et les flacons d'huiles essentielles. Les fruits et les légumes, oranges, verts, rouges. Les teintes des lentilles, des pois ou des haricots. Je touche les bananes soleil ou l'ananas piquant. Je regarde l'aubergine et je la trouve mauve. Mais c'est peut-être violet.
Le splendideLe splendide
Je regarde les épices et je les trouve belles.
Le piment, rouge ou vert, jamais jaune et toujours fort. Les poivres rondelets. Le gingembre mottoneux. La cannelle, agréable dans le chaï. La cardamome, la muscade, le cumin et leur petite touche. L'ail, à côté de son ami l'oignon. Le curcuma, le clou de girofle, pas loin de l'allée des outils. Le précieux safran, dans sa petite boîte. La moutarde, le sésame, en graine. Le laurier, la menthe, en feuille. L'aneth, odorant, différent.
Pas d'emballage, pas de code-bar. Du contact, de l'échange. On touche, on sent, on goûte à la vie hors de la pellicule plastique, sans le « all spices ». Et on aime.
Le splendide
C'est le marché de Devaraja.
-Will.


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