Une fois de plus, dans la même lignée que les deux articles précédents, je vais rentrer
dans le vif du problème, et quelle épineuse question que celle de la valeur d'un être humain. Le plus souvent à la source de nos plus grands drames, de nos plus grandes déceptions et
dépressions. Si dans les premiers articles j'ai enrobé mon discours dans une pseudo-théorie plutôt molle, depuis "Soyons honnêtes!" je tente d'appeler "un chat: un chat", et c'est donc sans
détour que je me questionne aujourd'hui sur notre vraie valeur en tant qu'être humain.
Dans "Aïe, les autres", je dénonçais que nous attendions souvent le jugement des autres pour étalonner notre valeur. Nous tentons souvent de faire en sorte que ce jugement soit bon et doux
à nos oreilles. Avouons que lorsqu'une personne nous dit: " Tu fais plus jeune que ton âge. Tu es bien belle. Tu as fait du bon travail. Tu es bien forte. Quel
courage remarquable. Tu es si gentille....", ou tout simplement: "Merci", nous volons au-dessus de notre tête enfin récompensée à notre "juste valeur". Alors, parlons-en de cette
VALEUR, qu'elle est -t-elle ?
Nous sommes six milliards sur Terre, que représentons-nous individuellement sur ces six milliards ?
1- Pour les capitalistes, chaque être humain vaut son actif (capital accumulé). On se fît au constat de l'accumulation de richesses. Peu importe comment ce capital a été accumulé
(fraude, vol, héritage, travail acharné, chance, etc...) vous valait votre poids en or. Je n'aime pas cette vision car elle fait des pauvres et des sans âbris, entre autres, des personnes
sans valeur.
2- Pour les économistes, la valeur de chaque être humain s'évalue en fonction de la richesse qu'il apporte à sa communauté par son travail. Dans nos systèmes capitalistes, ce travail est
rémunéré. Ainsi, la valeur de l'être humain dépend de ses revenus ou de la "noblesse" de son travail. Les notions d'effort, de compétence, d'intelligence, de valeurs morales sont
mises de côté, seule la Loi de l'offre et de la demande, ou du prestige traditionnel de certaines professions, donne de la valeur à chaque être humain. Je n'aime pas plus cette vision que
la précédente puisqu'elle retire toute valeur à tous ceux qui n'ont pas de travail et à tous ceux dont le métier n'est pas prestigieux.
3- Les humanistes vous diront qu'une vie n'a pas de prix. Que toute communauté a le devoir de soigner et de sauver toute vie, peu importe si le coût est élevé. Évidemment les
humanistes posent ici un principe non négociable et surtout sans étalon de référence. Je n'ai rien contre cette approche, j'y reviendrai d'ailleurs plus loin. Par contre, je trouve la
vision un peu hypocrite. Tout d'abord parce que nous savons que les plus riches sont mieux soignés que les plus pauvres. Ensuite parce que, chaque jour, plusieurs personnes meurent
sans que nous y soyons sensibles, simplement parce que nous ne les connaissions pas. Pourquoi donc essayer de sauver tant de gens quand une majorité de personnes ne se sentent pas
concernées par tous les décès ? Pourtant, nous ne pouvons quand même pas établir la valeur d'un être humain au nombre de personnes qui le pleure. Dans le cas contraire, une
personne publique (artiste, politicien, personne médiatique, ...) aurait plus de valeur que la personne seule sans famille ni amis. La valeur d'un être humain ne peut pas reposer sur
le nombre de liens sociaux existants, je rejette donc cette approche.
4- Pour les sociologues et anthropologues, chaque être humain a une valeur inestimable puisque chaque être humain représente la pérénité de notre espèce. Houplà ! Mon cousin Guy qui
n'a pas pu avoir d'enfants, ainsi que mon amie Martine qui a décidé de ne pas en avoir, viennent-ils de perdre toute valeur avec cette vision ? Ceux qui ont dix enfants ont-ils plus
de valeur que ceux qui en ont qu'un seul ? Non, je ne peux pas acheter cette vision, une de moins !
5- Pour la religion, notre valeur dépend de notre Foi, de notre pratique religieuse, de notre application des textes sacrés. Mais, qu'en avons-nous fait ? Chacun utilise ce qu'il veut
des textes sacrés, tout en se disant conforme pour être en paix avec soi-même. Il n'y a plus d'universalité religieuse, chacun interprète à sa guise les textes, ou tout simplement n'y fait
aucun cas parce qu'avec le temps notre société s'est laïcisée, tout en gardant quelques références religieuses par ci, par là. Comment s'y retrouver dans cette pluri-application des textes
? On se marie devant Dieu en ayant "consommé" bien avant. On divorce dans le temps de le dire. L'adultère est toujours présent. On peut tuer en ayant des circonstances
atténuantes (santé mentale, légitime défense, etc...). Bref, difficile d'avoir des points de repères dans cette vision qui s'effiloche au fil des ans. Une autre vision
directement à la poubelle.
6- Proche des humanistes, mais je ne sais pas à quel groupe l'attribuer, il y a la vision de ceux qui disent que la vie est une valeur fondamentale non négociable. Le simple fait de
vivre est une valeur en soi. Le fait d'être un être vivant avec tout ce que ça implique comme "mécanique" physiologique, métabolique, ... est suffisant pour dire que l'être
humain a une valeur. La plus belle preuve est que malgré toutes nos connaissances nous n'avons pas encore réussi à reproduire des êtres humains sans parties véritablement humaines.
J'aime cette vision parce que si le simple constat d'être en vie était notre priorité de pensée quotidienne, nous serions en permanence habités par un bien-être ressourçant. Nous
sommes en vie ! Waow, nous pouvons respirer, manger et boire, quel bohneur ! Plus besoin du jugement des autres pour exister ou se sentir quelqu'un. Plus besoin de
paraître, simplement constater que nous sommes en vie et être.
Trop facile me direz-vous ? Pourquoi faudrait-il que le bien-être soit difficile à atteindre ? Si nous pensons compliqué, il est clair que tout deviendra difficile. Voyons la
réalité en face, nous sommes une goutte d'eau dans l'océan (un sur six milliards). Si nous cherchons notre valeur en nous comparant les uns avec les autres, nous n'en trouverons
pas. Il y aura toujours quelqu'un de différent, qui fait ce que nous ne faisons pas et qui est ce que nous ne sommes pas, mais nous ne pouvons pas être, ni faire, ce que tous les autres
sont et font à la fois. Aucun être sur Terre n'est capable d'un tel exploit. Réunir tous les genres esthétiques, toutes les compétences et toutes les richesses de la planète en un
seul être est impossible. Alors à quoi bon chercher de la valeur en nous comparant aux autres ou en se faisant comparer et juger par les autres ?
Tout ceci étant dit, j'en arrive à la conclusion que notre seule véritable valeur est notre vie. Peu importe comment on vit, il n'y a qu'une façon de définir la valeur d'un être humain:
est-il en vie ou est-il mort ? Tout le reste n'est qu'un tas d'approches, de visions, de notions établies par des grands penseurs qui ont influencé notre société. Vous savez...
ceux qu'on se plait à citer les phrases en public pour paraître intelligent...