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Le duo à la tête de l'UE : qui sont-ils ?

Publié le 01 décembre 2009 par Labreche @labrecheblog

© ReutersLes noms des deux nouvelles têtes de l’UE ont été dévoilés à la suite de l’accord survenu lors du sommet informel du 19 novembre. Si Catherine Ashton entre bien en fonctions ce 1er décembre, date d’entrée en vigueur du traité de Lisbonne, l'installation d'Hermann van Rompuy a été repoussée au 1er janvier 2010 pour laisser s'achever sereinement l'actuelle présidence suédoise.

Hermann van Rompuy

Economiste de formation et de métier, impliqué en politique depuis les années 1970, au parti chrétien-démocrate flamand, Hermann van Rompuy n'est venu que tardivement à l'exercice du pouvoir en Belgique, comme ministre du budget dans les années 1990, et surtout comme premier ministre depuis décembre 2008. Après moins d'un an à gérer la crise politique belge, Hermann van Rompuy devient donc le principal visage de l'Union européenne, à 62 ans, pour un mandat de deux ans et demi, renouvelable une fois.

Le nouveau président du Conseil européen est chrétien-démocrate par conviction profonde, y compris religieuse. Ceci l'a amené à écrire sur sa foi chrétienne1, ou plus récemment à intervenir à l'université de Louvain au sujet de la pensée sociale du pape Benoît XVI, au cours de laquelle il a exprimé des réserves concernant les règles de droit sur l'avortement et l'euthanasie active (deux pratiques légales en Belgique), déclarant que « les mœurs peuvent changer les lois »2. Il est par ailleurs opposé à l'entrée de la Turquie en Europe, et l'a affirmé en particulier lors d'une intervention au parlement belge en décembre 2004 : « la Turquie ne fait pas partie de l'Europe et ne fera jamais partie de l’Europe » avait-il alors déclaré, estimant que « les valeurs universelles qui sont celles de l’Europe, mais qui constituent aussi des valeurs fondamentales du christianisme, faibliront avec l’entrée d’un grand pays islamique comme la Turquie »3. Ces propos ont paradoxalement joué en sa faveur dans sa récente nomination, soutenue par la chancelière allemande et le président français.

Enfin, Hermann van Rompuy avoue une véritable passion pour le haïku, et a d'ailleurs récemment illustré le trio de présidences de l'Union par l'un d'entre eux :

Trois vagues
déferlent ensemble dans le port
le trio est chez lui

Les talents de poète de Hermann van Rompuy4 évoquent irrésistiblement les mots de Barthes, sur l'engouement des Occidentaux pour le haïku : « Le haïku a cette propriété quelque peu fantasmagorique, que l'on s'imagine toujours pouvoir en faire soi-même facilement. (…) Votre phrase, quelle qu'elle soit, énoncera une leçon, libérera un symbole, vous serez profond ; à moindres frais, votre écriture sera pleine5. »

Catherine Ashton

À 53 ans, elle est le premier Haut représentant pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, et dirigera le nouveau service diplomatique de l'Union (5 000 personnes). Une surprise, y compris pour elle-même, qui ne s'était pas déclarée intéressée par le poste, et n'a aucune expérience de son nouveau domaine d'action. Diplômée d’économie, Mme Ashton était en effet jusque là, depuis octobre 2008, commissaire de l'Union pour le commerce en remplacement de Peter Mandelson. Auparavant, au Royaume-Uni, sa carrière politique l'avait amenée à occuper des postes ministériels à partir de 2001, d'abord chargée de l'éducation, puis des affaires constitutionnelles, et enfin de la justice ; puis Gordon Brown avait nommé Mme Ashton présidente de la chambre des Lords en 2007.

Rien de tout cela n'a constitué un obstacle à sa désignation par les chefs d'État et de gouvernement européens. En effet, Catherine Ashton n'a pas été désignée pour ses compétences : le Royaume-Uni, qui souhaitait initialement que Tony Blair exerce la présidence, a exigé pour lever son opposition que l'autre poste en jeu revienne à un Britannique, seule qualité à laquelle Mme Ashton devra donc de représente l'Union pendant les cinq prochaines années. Ajoutons d’ailleurs que le choix de Mme Ashton ne fut entériné qu’après que David Miliband et Peter Mandelson, actuellement membres du gouvernement Brown (respectivement aux affaires étrangères et au commerce) eurent tous deux refusé le poste.

Notes :
(1) Het christendom, een moderne gedachte (Le christianisme, une pensée moderne), Louvain, Davidsfonds, 1990 ; Op zoek naar wijsheid (À la recherche de la sagesse), Louvain, Davidsfonds, 2008
(2) Université de Louvain, 19 octobre 2009 (compte-rendu).
(3) « Le premier président de l'UE est-il turcophobe ? », Zaman, 26 novembre 2009
(4) On peut trouver d'autres traductions de ses haïkus sur le site de La Meuse.
(5) Roland Barthes, L'empire des signes, Genève, Skira, coll. « Les sentiers de la création », 1970, rééd. Seuil, coll. « Points », 2005


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