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Allan Théo . Interview exclusive

Publié le 02 décembre 2009 par Flash-News

Rares sont les artistes qui ont commencé par faire une section littéraire, qui deviennent grooms, chanteurs à succès de variété, banquiers et … chanteurs « purs rock » !

Allan Théo que l’on a connu avec Emmène-moi a pourtant eu ce parcours diversifié, et c’est avec un plaisir non dissimulé que je fais cette interview avec lui.


Allan Théo . Interview exclusive

 

Allan, tu es parti de Grenoble, vivier de musiciens comme les Charts (dont on connaît maintenant en artiste solo Calogéro), pour « monter » à Paris.

Quel a été le moteur déclencheur de ce départ ?

Je faisais de la musique sérieusement depuis l'âge de 14 ans (ce qui est tard en réalité). J'adorais faire des petits concerts pour interpréter mes titres et ma copine d'alors était fan de chez fan. C'est elle qui m'a bourré le crâne pendant un an pour que nous allions à Paris. Elle me disait : « t'es une star ».

Honnêtement, sans elle, je n'aurais pas bougé de Grenoble, je n'aurais pas osé concrétiser mes rêves de grands concerts et de reconnaissance. Evidemment, je me prenait plus pour une grosse merde qu'une « star » mais quand on te fait un lavage de cerveau, tu ne vois plus que le chemin qu'on te montre.

Alors je suis parti en éclaireur avec une valise et une guitare, passé ma première nuit dans un hôtel « plus minable tu meures » et fait mon petit bonhomme de chemin.

Tu es auteur, compositeur, et aussi musicien, tu joues de quels instruments ?

J'ai commencé par la flûte de Pan (13 ans) puis le piano, mon énorme passion d'alors et ensuite la guitare. Ca fait quatre ans que je joue de l'électrique alors que ça faisait dix ans qu'on m'avait offert une Ferder mexicaine. Et ça fait un an que je me suis mis à la basse.


Allan Théo . Interview exclusive

 

On a lu partout que c’est Jacques Martin qui t’a mis le pied à l’étrier, qu’elle est la version réelle des faits ?

C'est le programmateur de l'émission de Jacques Martin qui m'a repéré et proposé d'enregistrer un disque.

C'est Jacques Martin qui m'a changé la vie en m'invitant sur son émission en tant qu'artiste alors que j'étais groom dans les coulisses.

Alors que tu as été imprégné des The Doors et des Pink Floyd, que tu aimes le jazz,  ton premier album Emmène-moi était très variété avec quelques consonances espagnoles, as-tu été maître du jeu dans le choix des titres et de sa création ?

Oui mon père est dingue de rock. Alors évidemment, je n'aimais pas ça. Ce qui me paraît hallucinant aujourd'hui. Je me suis tourné vers le Jazz car cette musique m'apportait la liberté sur mon piano. Mais dans mes oreilles c'était plus divers (de Mickaël Jackson à Francis Cabrel, de Mylène Farmer à Technotronic) j'étais comme beaucoup d'ado, plein de préjugés. Il y avait de la musique « écoutable » et de la « grosse daube ».

Certains passaient au travers (Technotronic par exemple) d'autre pas et je suis passé à côté de Prince, Depeche mode, Pantera... que j'ai découvert plus tard quand je n'avais plus besoin de me donner un genre pour construire mon identité.

Pour ce premier projet de disque, j'ai choisi le single Emmène-moi parmi trois chansons déjà existantes. Quand j'ai écouté ce qu'on me destinait à interpréter, j'ai eu beaucoup de doutes. Rien à voir avec ce que composais. Mais je savais que j'étais loin de comprendre les rouages de l'industrie musicale, il fallait que j'apprenne, que je m'affranchisse de mes préjugés. J'ai choisi Emmène-moi car elle a quelque chose de planant. J'ai ensuite travaillé en studio pour construire l'album.

C'était la première fois que mon prod se lançait dans le disque alors j'ai eu la chance de pouvoir faire l'intermédiaire entre les considérations marketing et la direction de l'album. Ecrire les textes, être au cœur de la création musicale a été très formateur. Ainsi j'ai pu glisser de l'espagnol, varier les styles tout en tentant de répondre au mieux aux attentes du prod.

Le succès a été foudroyant, (Emmène-moi, Lola, Soñar …) avec au total 1 million de disques vendus, que ressentais-tu en toi à ce moment là ?

Une euphorie.

Tout le monde t'aime et pense que tout ce que tu touches se transforme en or. De la tune qui tombe du ciel, le bonheur.

Mais beaucoup de stress aussi. Pas de week-end, c'était boulot non stop.

Je recevais tous les matins par fax des pages remplies de rendez-vous (interview, télé, photos, radios, dédicaces etc.) avec l'envie de bien faire, toujours mieux. En même temps, un sentiment grandissant de malaise.

On m'aimait pour une musique qui n'était pas vraiment moi.

On m'adulait et me félicitait mais j'avais toujours l'impression qu'il ne s'agissait pas de moi mais d'un personnage médiatique.

Pas cool comme sensation quand tu as tout quitté pour avoir une reconnaissance.

Deux années de triomphe, puis, tu as voulu « électriser » ta musique, casser l’image de celui qui était défini comme « un Boys Band à lui tout seul » (rappel : c’était le moment des 2be3, G-Squad, Worlds Apart …), est-ce que cette rupture, avec le recul, te semble avoir été le bon choix au bon moment ?

Passé le succès du premier album, alors que j'avais pas mal de liberté, on m'a interdit de voir des compositeurs, de m'orienter vers un style plus pop rock. Guitares folk et battement à la Oasis (que j'aimais de plus en plus), c'était ce que je voulais faire.

Au lieu de ça, mon prod voulait que j'adapte des succès latinos en français. Commercialement c'était pas con, y'en a d'autres qui ne font que des adaptations et ça marche très bien pour eux. Mais je ne pouvais plus penser uniquement en terme de succès.

L'accomplissement personnel était devenue ma priorité pour gommer mon mal-être. Pour moi, l'album qu'on voulait me faire faire était une régression.


Allan Théo . Interview exclusive

 

Tu es parti au Québec, pour te réaliser dans un son plus Pop Rock, et enregistrer l’album Soupir, parle nous de cet opus où on peut trouver des résonances à la Rodolph Burger (comme par exemple sur Après toi), et comment a t’il été perçu.

En réalité j'ai enregistré l'album Soupir en France. J'étais en plein procès pour me libérer d'un contrat artistique qui m'empêchait d'aller signer dans une autre maison de disque. Alors j'ai auto-produit Soupir. Le résultat a été un album façonné en totale liberté. Je voulais que les musiciens qui bossaient avec moi soient heureux de faire partie d'un projet où on allait pas encore leur dire « faut faire des efforts, y'a pas beaucoup de budget ». Et je pense qu'ils ont été heureux.

Je suis très fier de cet album.

J'ai pu bosser avec des auteurs de grands talents et j'ai récupéré ma casquette de compositeur.

En France, personne n'a voulu de cet album. Evidemment, Allan Theo qui fait des tubes pop joyeux qui se la ramène avec un album folk pas boum boum ça a fait peur.

Il n'y a que ma maison de disque au Québec qui a signé cet album.

Mais en réalité, après quelques confessions, ils m'ont signé uniquement pour que je n'aille pas ailleurs. Que je me ramasse bien la gueule (ils n'ont fait pratiquement aucune promo) et que je fasse de nouveaux des tubes radios avec eux sur le prochain album.

C'est ça la réalité commerciale, je ne peux pas leur en vouloir.

L'industrie du disque n'a rien à voir avec la musique. Je le savais et je me suis pris cette réalité dans la gueule au premier virage. Après, bien sûr, il y a des gens curieux qui tombent sur cet album et qui m'envoient des mails et des courriers de félicitations. Quand même, faire les choses du mieux qu'on peut, ça peut toucher. Mais cette période a été dure. J'avais investi énormément dans ce projet et financièrement j'ai tout perdu. C'est le jeux.

Il m'a fallu dix ans pour estomper mes dettes et étrangement, malgré tout, je ne suis pas arrivé à me détourner de mon chemin.

On entendu parler d’un album en espagnol qui était prévu, qu’en a t’il était réellement ?

J’ai fait quelques titres en espagnol sur l’album Emmène-moi mais le projet d’un album en Amérique latine, bien qu’envisagé, n’a pas vu le jour.


Allan Théo . Interview exclusive

 

Au moment de cette coupure médiatique, quels étaient les raisons données par les animateurs et programmateurs de ne plus te recevoir sur les plateaux ?

En réalité, j’ai toujours eu de bons contacts avec les médias. C’est juste que je n’avais pas le matériel qui convenait avec mon image.

C’était trop tôt, y compris pour moi-même.

Sortir d’une équipe qui ne pense qu’au fric pour se lancer dans un projet purement artistique, c’est une révolte. Une révolte contre un système bien rôdé. Je n’étais plus en mesure des faire des concessions, il ne fallait pas me parler de Emmène-moi. Alors m’inviter en télé tu penses, je me suis rasé le crâne quand même !

Les radios ?

Les radios elles veulent des chansons qui plaisent au gens à coup sûr. Allan Theo + chansons folks pas commerciales, quel intérêt ?


Allan Théo . Interview exclusive

 

En 2005 tu montes Théo-group, qu’elle envie te tenaillais avec cette démarche ?

Je voulais goûter de nouveau à la scène. J'ai passé des annonces dans les sites de musiciens, dans les écoles de musiques en cachant mon nom et en mettant des liens pour écouter mes titres sur le net. Voir si des musiciens pouvaient accrocher sur ma musique et avoir l'envie de la défendre sur scène.

Je voulais que rien ne soit faussé par mon image médiatique.

Et le Theo-group est né.

Un an et demi de petit concerts. Le plus incroyable c'est que sur la fin on a joué à Paris Plage et Solidays. Solidays c'était trop fort : on a gagné un concourt lancé par NRJ 12. On a gagné et c'est sur la scène que le régisseur m'a reconnu. T'aurais vu la tronche du journaliste qui nous filmait depuis un moment !

Ca a été très gratifiant pour moi car c'est notre musique et mes chansons qui étaient le moteur du groupe.

En 2007, redevenu seul tu sors « Théo », était-ce l’aboutissement entre le chanteur de tubes, et le chanteur d’un groupe ?

J'avais fait l'album THEO avant de monter le groupe et en grande partie avec le guitariste et réalisateur Antoine Delecroix.

C'est lui qui m'a réellement amené le son électrique que j'avais dans la tête sans pouvoir le jouer (je ne faisais pas encore de l'électrique). Déjà là, j'ai envoyé nos maquettes dans les labels en cachant mon nom. Et on a été signé.

Antoine m'a suivit dans la création du groupe. Je pense que pour un psy, j'aurais été un bon sujet à étudier. J'avais besoin de tout reprendre à zéro et je ne me suis rien épargné. Toutes les victoires qui ont suivies, si modestes soient elles, l'on été grâce à la musique et la détermination.

A cette période, Allan Theo n'existait plus. Moi je voyais bien le Theo-Group progresser, enregistrer un album. Mais les membres du groupe étaient fatigués des petits concerts et la musique que je leur apportait ne risquait pas de leur ouvrir les portes des télés et des médias de masse.

Finalement, mon potentiel médiatique m'avait rattrapé. Je me suis aperçu que j'étais le seul à croire en ce groupe, à vouloir lui donner du temps pour qu'il grandisse. Eux avaient des besoins de grandeur et malheureusement, il n'y avait pas d'énergie de groupe, pas d'échange dans la création.

Si ma musique ne leur convenait pas, il n'y avait pas de moyen de nous créer un son à nous. J'avais initié l'enregistrement d'un album. J'avais une idée assez précise du son que je nous destinais. Mais au bout d'un moment Antoine m'a avoué qu'il ne voyait pas comment me restituer ce que je lui demandais.

Je me suis pris une putain de tarte!

Lui a une culture très britpop et il est très fort là dedans. Moi je voulais quelque chose de plus lourd. Il faut dire que ça faisait un moment que je m'étais mis à écouter une musique que l'on pourrait apparenter au Métal (Soulfly, Ektomorf, Linkin Park, RATM, Deftones etc.)

C'est pas que je voulais faire du métal mais bon, Oasis c'était loin derrière.

Alors j'ai tout arrêté.

Te verrais-tu rechanter avec un groupe, ou envisages-tu maintenant une carrière uniquement solo ?

Tu sais, je me suis aperçu que je commençais à me cacher derrière un groupe qui n'en était pas un. Je ne dis pas que je suis contre l'idée de faire partie intégrante d'un groupe mais il faut aussi que j'assume ce que je suis et ce que je suis devenu. J'ai économisé comme un dingue pour m'acheter du matos et j'ai monté mon studio à la maison.

Je suis en train d'enregistrer tout seul mon prochain album.

Finalement, toutes ces années à écumer les studios, à faire chier les réalisateurs et ingé sons m'ont permis d'apprendre. Je n'aurais pas pu faire cet album ne serait-ce qu'il y a deux ans.

Où en es-tu à ce jour ?

Aujourd'hui j'ai encore deux titres à réaliser.

Quels sont tes projets ?

J'ai l'intention d'aller démarcher mon album en maison de disque sous mon nom Allan Theo. J'ai aussi un projet de clip bien personnel.

Peux tu plus développer ?

Ha non, je ne peux pas, surprise !

Avec qui aimerais-tu collaborer ?

Il va falloir je trouve un moyen pour mixer l'album car mes compétences ne vont pas aussi loin. J'aimerais collaborer avec quelqu'un qui trempe dans le rock bien lourd. Pour qu'il mette une grosse baffe à mes titres.


Allan Théo . Interview exclusive

 

Si on regarde les courts-métrages sur ton site, on voit que tu débordes d’humour, pourtant, ça ne ce ressent pas dans tes chansons, tu l’expliques comment ?

Je ne sais pas. La série des « Allan Theo is back » m'a fait un bien fou. J'en avais raz le cul d'entendre « Tu devrais faire une nouvelle version d'Emmène-moi pour revenir ».

Pas un prod ou agent que je croise qui me pousse vers l'avant. Alors je leur ai envoyé un petit message à ma façon et le premier épisode est né.

Je ne me suis jamais autant marré de ma vie.

Rire de moi a été un exutoire.

Maintenant, ce n'est pas la source de mon aspiration.

Le retour à une vie simple avec l'héritage de la célébrité a été assez douloureux car on ne te prend pas au sérieux, il faut toujours que tu prouves que tu n'es pas qu'un guignol de la télé. Que tu as fait des études, qu'on peut te faire confiance. Heureusement, j'ai croisé des gens qui m'ont fait confiance et je me suis intégré dans un circuit plus conventionnel. Reste que j'avais tout de même un certain recul. Je pouvais sentir les mesquineries, les trahisons et les coups bas qui règnent dans des bureaux.

L'énergie du métro, la réalité des rues de Paris, tout ça a alimenté mes chansons alors évidemment, le nouvel album ne sera pas du tout loufoque.

Je suis d'une nature mélancolique de toute façon, y'a rien à faire. Des fois ça part sur scène. Alors, j'ai pas l'intention de m'arrêter.

Si tu devais définir ton parcours, comment le résumerais-tu ?

J'ai failli répondre chaotique mais ce n'est pas vrai. Il y a une continuité. Je l'ai senti lorsque je me suis amusé à réécouter tous mes albums à la suite … c'est là que je me suis rendu compte que chaque album amenait sur le suivant. Ce qui veut dire que malgré mes doutes, mes erreurs nécessaires, j'ai arpenté le même chemin depuis le début. C'est rassurant et ça fait peur.

Quelles sont tes passions dans la vie ?

Bon, la musique ok, ça tu t'en doutes.

Le sexe.

Ouais tu diras comme tout le monde, pour ne pas passer pour un obsédé je dirais : « Oui comme tout le monde ».

Si tu avais une priorité à défendre ou à partager avec ceux qui vont lire cette interview, que leur dirais-tu ?

Achetez des bouquins qui traitent du sexe, des lubrifiants, des jouets et éclatez-vous putain !

A quelle question que l’on ne t’a jamais posée aimerais-tu répondre ?

Pourquoi tu fais tout ça ?

-   je n'en sais rien et je n'espère jamais le découvrir pour toujours courir après.


Allan Théo . Interview exclusive

 

Pour conclure cet entretien, quel mot te vient à l’esprit ?

Liberté.

Merci Allan pour cet échange, j’employais le mot « rare » au début de cette interview, tu l’es d’autant plus, que tes réponses sont vraiment venues du plus profond de toi.

1000 mercis à toi, et au moment voulu, on parlera de ton nouvel album.

Site Allan Théo

Site Allan Théo Rock

(interview m.p. / copyright flash-news)


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