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L'immobilier doit-il être soumis à libre-concurrence?

Publié le 10 décembre 2009 par Nemo

L'immobilier doit-il être soumis à libre-concurrence?

C'est la réflexion que m'inspire ce billet de l'Hérétique qui s'attèle à analyser les raisons de la paupérisation de la population française et surtout, du creusement des inégalités.
Louis Maurin, dont il reprend les écrits, démontre brillamment, chiffres à l'appui, ce creusement des inégalités en faveur de 0,01% des plus hauts salaires (qui) ont augmenté de 69 % entre 1998 et 2006".
A côté de cela, ce qu'il est intéressant de noter, ce sont les fortes inégalités de situation à salaire égal selon la localisation géographique sur le territoire.

A. Une raison à cela: l
a part exponentielle des dépenses immobilières dans le budget des ménages.
Exponentielle dans le temps et dans l'espace:

  • Dans le temps: il n'est un secret pour personne que les prix de l'immobilier se sont envolés même si, crise financière oblige, les prix auraient légèrement baissés sur les derniers mois sans pour autant compenser le dixième de la flambée à laquelle nous avons eu droit, notamment en 2003. Mais ce qu'il y a de plus douloureux pour le ménage moyen, c'est que ces prix se sont envolé bien plus rapidement que les niveaux de salaires grevant cruellement le budget quotidien.
  • Dans l'espace: selon que vous vivez à Poitier, à Brest ou à Paris, le prix au mètre carré passe du simple au double, voire plus. Par exemple, à Brest, vous pouvez espérer trouver un appartement de 30 m² à 302 EUR par mois lorsqu'il vous faudra débourser un minimum de 670 EUR pour l'équivalent parisien (informations seloger.com). Et encore, je vous fais grâce des comparaisons en termes de qualité de l'environnement.

Plusieurs raisons à cela: une offre insuffisante face à une demande croissante.
On s'entasse, on s'entasse mais sauf à ne construire que des immeubles de cent étages, arrive nécessairement le moment où l'on affiche complet.
Elément aggravant: des établissements financiers s'amusent à procéder à des investissements immobiliers de locaux destinés à rester vacants afin de provoquer la rareté et augmenter artificiellement les prix du marché. C'est un des visages de la spéculation immobilière.
Selon le DAL:

En 1962 Paris comptait 20 000 logements vacants selon le recensement. Aujourd’hui Paris compte 136 554 logements vacants, soit un logement sur dix.

Autre facteur aggravant: une extrême parisianisation de la vie française qui tarde à se décentraliser. La vie économique, administrative et politique se joue à Paris même si l'effet pervers de cette ultra-concentration provoque par incidence l'augmentation des prix de l'immobilier et tend à repousser des acteurs économiques en périphérie, voire en grande couronne francilienne. Effet tâche d'huile garanti.
Devant ces éléments, la question se pose de savoir donc si le marché de l'immobilier devait naturellement être soumis à la libre concurrence ou si il devait être au contraire en être exclus afin de réglementer l'accès au logement et de permettre une égalité effective à tous, quitte à gommer les différences de revenus.
B. Face à cela, la question que l'on devrait se poser est: le marché de l'immobilier offre-t-il des garanties effectives de libre-concurrence?
Oui et non. Sur le marché de la vente, l'affirmative semble s'imposer mais sur le marché de la location, il s'agit d'une toute autre affaire. Une fois, l'offre aux mains de quelques groupements, une situation d'oligopole se crée. Oligopole qui n'a d'autre intérêt que de voir les prix s'envoler afin de maximiser les retours sur investissements, d'où la forte influence de la spéculation immobilière. Plus les prix s'envolent, moins le citoyen lambda est à même d'acquérir ou même de louer un bien immobilier.
On est connaît les effets premiers:
embourgeoisement de la population, appauvrissement des banlieues, une forme d'élitisme se crée. Mais des effets secondaires viennent s'ajouter à cela: à la fracture immobilière vient s'ajouter la fracture sociale: l'emploi se trouve toujours en centre-ville mais le logement y est prohibitif. Tout le monde ne peut accepter de sacrifier une partie de sa vie familiale pour subir deux heures de transports en commun, si ce n'est plus. D'où une difficulté croissante aussi pour les populations intra-urbaines d'accéder à des services à la personne (et l'on retrouve encore la boucle rareté, augmentation des prix, etc.), baby-sitting, repassage, nettoyage, etc...
En conséquence, dès lors qu'une forme de concentration du marché se crée, la libre-concurrence n'est plus. C'est malheureusement l'un des travers possibles de certains marchés, tout comme le marché de la location immobilière.
Dès lors, la question ne se pose plus vraiment s'il faut ou non réglementer les prix partout où il y a situation de spéculation et/ou d'oligopole.
La meilleure approche est à mon sens peut-être de reconnaître qu'il y a des éléments de première nécessité pour lesquelles la spéculation doit être purement et simplement interdite.
Se nourrir, se loger, se chauffer, se soigner font certainement partie de ceux là.


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