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Les fondateurs de la Société historique du Vieux Montmartre en 1886 : retour aux origines

Publié le 10 décembre 2009 par Paristoujoursparis

Ils s'appelaient Bin, Lamquet, Jules Mauzin, Maurel, Noro, Rab, Sellier, Wiggishoff et Toussaint-Martel, et ils étaient préoccupés du seul désir de sauver Montmartre du vandalisme officiel ou particulier. Ils fondèrent la Société Historique et Archéologique du Vieux Montmartre en 1886.

A l'heure où certains aimeraient voir disparaître le Musée de Montmartre et la société qu'il abrite, il est bon de rappeler l'action de ceux que j'appelle affectueusement, les “vieux”. Ils étaient passionnés et voulaient conserver le charme de la butte.

C'est grâce à eux et et à tous ceux qui leur ont succédé, que nous pouvons nous promener à Montmartre et y retrouver une âme, une atmosphère, un cachet qui ne sont pas seulement des arguments touristiques!

Merci à Hélène de m'avoir signalé ce tecte extrait du Guide de l'étranger à Montmartre, paru en 1900.

LE VIEUX MONTMARTRE

Le 4 juin 1886, neuf Montmartrois se réunissaient au Rocher Suisse. Il y décidaient de fonder une société locale d’histoire et d’archéologie spéciale au XVIIIe arrondissement, et ayant pour but la recherche et la conservation des anciens monuments, des souvenirs historiques, des curiosités artistiques, pittoresques anecdotiques de Montmartre, Clignancourt, La Chapelle et leurs anciennes dépendances.

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Ces Montmartrois étaient M.M. Bin, Lamquet, Jules Mauzin, Maurel, Noro, Rab, Sellier, Wiggishoff et Toussaint-Martel, férus de l’historique de la vieille butte et tout d’abord préoccupés du seul désir de sauver la colline du vandalisme officiel ou particulier. La Société fut fondée, officiellement reconnue à quelques jours de là et fonctionna dès lors régulièrement sous le vocable : « Vieux Monmartre ». Son siège fut établi à la mairie. Il y est resté. Dès les premières réunions, le cadre de la Société s’élargit. A la seule idée de conservation pure et simple des épaves de l’antique Montmartre s’ajouta la pensée d’instruction et d’éducation historiques et archéologiques montmartroises.
Aux fondateurs de la Société, aux membres nouveaux, vite accourus, se joignirent rapidement de nombreux adhérents, c’est-à-dire des volontés nouvelles, une collaboration augmentée de force par le nombre et la valeur des intelligences.
Un fascicule, tout d’abord annuel, fut publié enfermant les éléments de travail de ceux des sociétaires plus particulièrement chargés des recherches d’archives ; un dépôt de documents, purement montmartrois, s’institua, en lequel chacun, aux séances mensuelles, se plut à apporter, gracieux, nombre de matières. Ce fut l’embryon devenu corps aujourd’hui et qui, en ses apparences modestes, constitue un dépôt des plus intéressants et instructifs.
Le « Vieux Montmartre » comprit aussi que les adultes ne devaient pas être appelés seuls à bénéficier de cette étude de Montmartre ; il voulut y faire participer les enfants des écoles communales de l’arrondissement. A cet effet, il les a conviés à des promenades archéologiques et historiques dans les rues intéressantes par leur histoire ou leurs maisons, promenades toujours précédées de conférences et instructives par les leçons données sur place.
Et chaque année, agrandissant son champ d’exploration, il a continué l’œuvre commencée, sans s’arrêter un instant, sans la moindre défaillance, uniquement préoccupé de son rôle d’instructeur et d’éducateur historique et archéologique de Montmartre.

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Aujourd’hui, il peut être fier de cette œuvre.
Le premier, il s’est créé dans Paris comme société locale ; le premier, il a poussé les esprits travailleurs et curieux du passé à l’étude de ce passé, en ce qui touchait plus directement le lieu qu’ils habitent, c’est-à-dire leur petite cité dans la grande ; le premier, il a réveillé le goût de la conservation des aspects intéressants du « pays », de ses maisons ou de ses monuments historiques. Il a secoué l’indifférence en matière d’archéologie locale ; il s’est élevé contre l’esprit de nivellement quand même, sous le prétexte de voies nouvelles à construire ou de quartiers à transformer. Il a eu cette idée, assez simple cependant, qu’une rue à élargir pouvait être augmentée de volume sans qu’il fut nécessaire de trancher impitoyablement, sous prétexte de ligne droite et qu’il était possible de donner à la dite voie une forme courbe, si un monument de valeur historique ou architecturale coupait la fameuse ligne droite projetée. Le premier, enfin, il a entrepris, dans le seul but de sauvegarde archéologique, la lutte contre l’ingénieur niveleur et rectangulaire.
Et bientôt, à l’imitation du « Vieux Montmartre », des sociétés similaire se sont créées : dans le XVIe, Ve, VIe, VIIIe, XIe, XIIe, XXe arrondissements et enfin à l’Hôtel de Ville même. Le « Vieux Paris » , la société mère, celle que tout parisien devrait soutenir de ses deniers autant que de ses vœux, à qui il doit et devra de voir Paris conserver son admirable caractère historique et archéologique, en se fondant officiellement, n’a été qu’une forme généralisée de notre modeste « Vieux Montmartre ».

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Le « Vieux Montmartre » entre autres monuments, a sauvé l’église Saint-Pierre de la démolition ; quand il lui est impossible d’éviter une modification de lieu s’accomplisse, il prend la précaution d’en retenir des vues sous tous les aspects, par le moyen de la photographie. Il a pu ainsi former une collection unique de vues photographiques qui, depuis 1886, constituent un historique topographique complet du XVIIIe arrondissement. Un comité de vingt-quatre membres dirige l’administration du « Vieux Montmartre » ; au surplus, il suffit de citer les noms de ceux qui y ont apporté le fruit de leurs études ou de leurs recherches pour être édifié sur la valeur de cette publication – de nul rapport d’argent et toute onéreuse – Fernand Bournon, Amédée Burion, Capon, Compan, Gaston Duval, le Dr Fourès, Félix Jahyer, Lucien Lazard, Eugène Le Senne, Lucipia, Toussaint Martel, Alexis Martin, Jules Mauzin, H. Monin, le Dr Ollivier, Sauvageot, Charles Sellier, Wiggishoff, c’est-à-dire des archivistes paléographes, des professeurs, des hommes de lettres, des chercheurs passionnés de la science historique, des érudits, des artistes connaisseurs du passé, des architectes savants. La table seule de ces fascicules serait elle-même intéressante par le simple énoncé des titres de ces articles ou de ces notes ressuscitant un passé endormi, redonnant la vie à une maison ou à un monument ; reconstituant une place, un lieu dit, un carrefour ; revivifiant des êtres ; rétablissant une fête et rappelant mille faits intimes ou publics de ces sociétés montmartroises à jamais vécues. Dans cette modeste société d’archéologie, nul ne manque à la tache commune ; chacun y sacrifie partie de son plaisir ou de ses occupations au dehors. Tous coopèrent, sous des formes diverses et chacun selon ses forces, au bon fonctionnement de l’œuvre et tous, également, uniquement préoccupés de la haute pensée de cette œuvre, n’y collaborent que dans le seul but de répandre au dehors, le plus largement, cet enseignement historique et archéologique de la butte dont ils apportent les éléments à chaque réunion du « Vieux Montmartre ».

Pierre Delcourt.

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