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Copenhague

Publié le 22 décembre 2009 par Christophefaurie

Pourquoi la conférence de Copenhague a-t-elle suscité chez moi si peu d’intérêt ? Peut-être parce que je m’attendais à ce qui s’est passé. Le phénomène ressemble beaucoup à celui que l’on retrouve dans la conduite du changement.

Anxiété de survie artificielle

Ce qui a frappé peu d’observateurs, c’est la capacité du monde à s’inquiéter sans raison apparente. Un des succès de la science est de nous faire peur avant que quoi que ce soit nous arrive. Bien sûr, une catastrophe, par exemple un désastre en Asie du sud est déclenchant une guerre et ébrenlant cette région explosive, aurait conduit plus rapidement à un accord. Mais la science a tout de même réussi à enfermer toutes les nations du monde dans une même pièce pendant plusieurs jours.

De l’émotionnel au rationnel

Ce qui a encore moins frappé les observateurs, c’est que nous savons mettre le problème en équations.

  • Éviter une augmentation de température de plus de 2°, c’est 1000md$, l’ordre de grandeur du plan d’aide aux banques américaines de l’année dernière, dont 50% pour les pays en développement.
  • Les techniques de réduction des émissions sont connues. Nous sommes parvenus à réduire l’émission des CFC, qui attaquaient la couche d’ozone, bien plus vite que prévu. Il peut en être de même pour les gaz à effet de serre. Parmi ceux-ci, le CO2 ne représente que 50% des émissions. Il y a aussi (Unpacking the problem) :
  1. La déforestation
  2. Le méthane, émis par les animaux, susceptible d’être réduit par un régime alimentaire adapté.
  3. Le carbone, qui résulte de l’usage du Diesel et des systèmes de chauffage des pays pauvres (bois).
  4. Les HFC produits par quelques industries et qui pourraient être traités comme les CFC.

Curieusement tous les changements procèdent de cette façon : après une phase irrationnelle, une modélisation du problème puis des équations émergent et le changement se réduit à leur résolution. C’est ce que je vois, mission après mission, c’est aussi ce qu’observe Governing the Commons.

Anxiété d’apprentissage

Si Copenhague a échoué, c’est que l’anxiété de survie n’est pas tout. Il y a aussi l’anxiété d’apprentissage. La réduction de l’émission de gaz à effet de serre demande une réorganisation de l’économie et de la vie des nations.

Le premier réflexe humain est de tricher (« innovation » de Merton). En dépit de l’accord de Kyoto les émissions ont augmenté de 20% en dix ans, notamment parce que les industries polluantes ont été installées dans les pays en développement et que l’économie russe s’étant effondrée dans les années 90 a pu vendre ses droits à émettre aux pays occidentaux. La caractéristique des énergies sales, c’est qu’elles coûtent extrêmement peu à utiliser, c’est donc le choix naturel du marché. Les énergies propres ne peuvent se développer sans volontarisme étatique. (The green slump.)

L’avenir

Finalement, peut-on faire une prévision ?

Premier point : en dépit du grand battage qui est fait, on serait en face d’un petit problème, 1000md$ est une relativement petite somme à l’échelle du monde.

Quant aux anxiétés d’apprentissage, je les vois ainsi :

  • Les pays en développement ne bougeront pas s’ils ne reçoivent pas d’argent. Il y a un débat sur le montant des versements. (Closing the gaps.)
  • Le régime dictatorial chinois, contrairement aux démocraties, peut aisément mettre en œuvre un changement brutal ; en outre il semble vouloir faire de la Chine un champion de l’énergie propre. Il est possible que ce que nous percevons des réticences chinoises ait des motifs essentiellement tactiques (faire payer l’Occident pour l’affaiblir ?). (A long game.)
  • L’Amérique affronte des difficultés plus complexes : le changement appauvrirait massivement certaines catégories de sa population, dont le vote contrôle le sénat (Pauvres Américains). L’absence de structure de solidarité empêche que le choc soit réparti sur la nation. C’est le modèle américain qui gène le changement. Il risque donc d’être long. (L’Amérique et la réglementation des émissions : Cap and tirade.) Or, le monde ne bougera pas sans l’Amérique.

(à suivre)


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