Réflexion onze (23 décembre 2009)
Paradis fiscaux - Au-delà du secret bancaire ... Les trusts
Depuis le G20 d’avril 2009, le débat s’est concentré sur la question du secret bancaire en oubliant celle de l’anonymat garantie par les trusts. En effet, l’opacité des paradis fiscaux ne se limite pas à la question des comptes bancaires. Certains d’entre eux offrent aux particuliers et aux entreprises de nombreux autres services qui permettent de dissimuler leur identité à l’administration fiscale et aux autorités judiciaires de leur pays d’origine. Prête-noms, sociétés écrans, trusts, fondations… tous ces montages aux intitulés et aux formes juridiques multiples n’ont en fait qu’un objectif : l’évasion fiscale ou le blanchiment d’argent.
Comment ça fonctionne ?
Un trust (fiducie) est un montage juridique par lequel un particulier ou une entreprise (fiduciant ou « settlor ») transfère irrévoquablement la propriété de fonds ou de biens à une autre personne (fiduciaire ou « trustee ») chargée de les gérer dans l’intérêt d’un ou plusieurs bénéficiaires. Pour le fiduciant, l’avantage du trust est qu’il est irrévocable, contrairement au mandat de droit français, ce qui en fait un mécanisme recherché en matière de succession. Ce dispositif n’est pas condamnable si l’identité des trois parties prenantes est connue.
Quels sont les avantages ?
Mais, dans la plupart des paradis fiscaux et judiciaires, l’anonymat des donneurs d’ordre et des bénéficiaires est justement au cœur du dispositif. En effet, la particularité du trust, de droit anglo-saxon à l’origine, est de ne pas être soumis à enregistrement car il est considéré comme un simple contrat et non comme une entité juridique, soumise elle à déclaration, à l’instar des sociétés, personnes morales, etc. Comme dans la plupart des pays, il n'est pas prévu d'enregistrer les trusts, l’anonymat des fiduciants et des bénéficiaires est ainsi totalement garanti. Dans les paradis fiscaux et judiciaires, cela permet tous les dérapages. Par exemple, quand le bénéficiaire n’est autre que le fiduciant lui-même ! Destiné à leurrer l’administration fiscale et les autorités judiciaires, le trust permet d’obtenir un résultat très proche du secret bancaire absolu.
Que proposer ?
Il faut mettre fin aux sociétés écrans et aux prête-noms en rendant obligatoire la tenue par chaque État ou territoire d’un registre national des trusts et autres structures juridiques qui concourent à l’opacité du système financier. Ce registre doit préciser le nom de leurs bénéficiaires réels, de leurs opérateurs et de leurs donneurs d’ordre, et rester ouvert aux autorités fiscales, douanières et judiciaires des autres États.
Où sont les trusts ?
Ces mécanismes de prête-noms font la fortune des îles anglo-normandes comme Jersey, Guernesey et l’île de Man qui dépendent en partie de la Couronne britannique mais aussi de la City de Londres qui est, de manière plus surprenante, la première pourvoyeuse de trusts. Des services équivalents existent également en Europe continentale, comme par exemple les fondations au Liechtenstein à l’origine d’un scandale récent. Des entreprises comme Michelin, Adidas et Elf sont en effet soupçonnées d’y avoir placé 800 millions d’euros pour échapper à l’impôt. L’opacité entourant ces montages juridiques est telle qu’il est impossible de chiffrer leur nombre et encore moins les sommes qu’ils détiennent. Un rapport du Parlement européen a d’ailleurs listé, en avril 2009, les différentes formes de prêtes-noms et leur localisation.
http://www.stopparadisfiscaux.fr/content/au-del%C3%A0-du-secret-bancaire%E2%80%A6-les-trusts
http://www.journaldunet.com/economie/magazine/dossier/paradis-fiscal-la-liste-de-tax-justice-network/city-de-londres-une-plateforme-financiere-pratique.shtml
Saucratès