J’ai écrit pour sortir d’embarras matériel — rien que le mot écrire me fait vomir, ce prétentieux vocable. « Il écrit » — à fesser ! Immonde ! Le malheur a voulu que la nature me refuse un don expérimental, scientifique et me donne ce tour hystérique émotif — Don ? c’est beaucoup dire — Poète encore comme Lamartine ou musicien comme Mozart… Mais jabotteur ? confidentieux… Pouah ! Shakespeare prétend que nous sommes faits de la même étoffe que nos rêves. Les miens n’étaient pas d’écrire des romans ! Ah foutre ! Je le fais comme une bourrique qu’on fouette ! Cela me fait mal à la tête — m’empêche de dormir — me fait bourdonner — bref c’est un sale supplice dégoûtant. Ma vocation était médicale — mon idéal : Semmelweiss ou même Axel Munthe — mais Céline ? foutre quel pauvre fatigué raté ! On ne m’en dira jamais autant de mal que j’en pense — on ne saura jamais le chagrin qu’il m’a fait !”
- Céline, dans une lettre adressée à Albert Paraz
