Le clivage droite / gauche classique apparaît de moins en moins satisfaisant pour comprendre les lignes de partage qui structurent le paysage politique français. De plus, l’émergence récente de l’écologie politique introduit une nouvelle variable importante, celle du rapport à notre société de production / consommation. Cette variable remet complètement en question le rapport droite / gauche… même si les écolos sont souvent plutôt de gauche.
Nous allons ici proposer une autre grille de lecture de ce paysage politique, en étant bien conscient de son caractère partiel, et donc forcément critiquable.
Nous avons retenu deux paramètres :
- La place de l’Etat, du collectif et de l’individu dans la société
- Le rapport à la production et à la consommation : faut-il aller vers une société plus sobre (en énergie, en production, en ressources), ou le productivisme doit-il rester le modèle dominant ?
Pour plus de lisibilité, nous excluons donc la variable « valeurs sociétales » (solidarité, innovation, respect des traditions, fraternité, liberté…) de cette grille.
Si l’on essaie de donner un peu de contenu à cette grille, on peut considérer que son champ est cadré par les 4 positions suivantes :
- Si l’on combine Etat faible / productivisme, on obtient la vision d’une société innovante, dans laquelle l’esprit d’entreprise est encouragé, l’individu prime sur le collectif, et le marché économique fonctionne de manière « optimale ».
- La combinaison Etat fort / productivisme nous donne une société et une économie régulées par un Etat fort, avec un collectif et une solidarité importantes, le tout s’appuyant sur une production et une consommation de masse.
- Etat fort et sobriété : une décroissance de l’économie organisée et planifiée par un Etat fort, avec une forte dimension sociale et collective.
- Etat faible et sobriété : il s’agit ici de la vision d’une société qui a rompu avec le productivisme en revenant au local (« vivre et travailler au pays »), grâce notamment à la mobilisation des citoyens.
Cela donne le schéma ci-dessous, avec évidemment une multitude de positionnements idéologiques intermédiaires entre ces quatre visions très contrastées. On remarque aussi la zone « croissance verte », souvent employée par les responsables politiques actuels comme étant la formule gagnante pour concilier efficacité économique et respect de l’environnement.
Amusons nous maintenant à placer sur ce schéma les noms de quelques responsables politiques français. Avec cette grille de lecture, il est évidemment plus facile de positionner les Verts, qui se définissent beaucoup par rapport à la question de la sobriété. Le fait de ne pas tenir compte des valeurs (traditionnelles ou progressistes ?) donne évidemment un aperçu un peu inhabituel du positionnement des uns et des autres.
Quelques remarques à la lecture de ce panorama :
- Les Verts ne sont pas encore tous sur la même ligne, loin de là. La question du rôle de l’Etat dans la société apparaît être une ligne de divergence importante.
- Vers le centre du schéma, on voit la proximité de certains acteurs, entre aile gauche de l’UMP et frange libérale du PS. Assez peu de divergences sur le fond, peut être les contours d’un futur parti centre / gauche / écolo ?
- Intéressant aussi de souligner la proximité de l’extrême droite et de l’extrême gauche sur la place de l’Etat et le rapport au productivisme (si l’on avait introduit la variable « valeurs » dans le schéma, leur proximité aurait bien sûr été bien moindre)
- Enfin, à l’UMP, en ces temps de régime présidentiel fort, difficile de mettre en évidence des positionnements très tranchés : quand on a parlé de la ligne « Sarkozy » et de celle des anciens chiraquiens, on a presque fait le tour !