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La clémence fiscale de l'Etat

Publié le 04 janvier 2010 par Juan

En avril dernier, Eric Woerth avait mis en place une cellule dite de dégrisement, pour accueillir les exilés fiscaux moyennant clémence et discrétion. L'opération fit choux blanc. A tel point que, l''été dernier, le ministre du budget avait dû brandi, sans la montrer, une liste d'environ 3000 contribuables français qui avaient exilé en Suisse 3 milliards d'euros. Eric Woerth les avait menacé de sanctions s'ils ne régularisaient pas leur situation d'ici le 31 décembre 2009. Cette liste des 3000 contribuables émanerait d'une liste bien plus large de 130 000 noms dérobés pas un ancien informaticien de la banque HSBC.
1. Le 3 janvier, le ministre du budget a annoncé qu'il prolongeait cette opération de clémence fiscale, mais différemment: "non pas au travers d'une cellule spécialisée, mais en donnant à l'administration fiscale les moyens de travailler dans ce même état d'esprit". On savait déjà que les sanctions étaient négociables et modestes (pas d'arriérés au titre des années antérieures à 2003, taux de pénalités négociables, etc). Cette fois-ci, le ministre veut étendre les capacités de clémence fiscale aux services courants :
2. Un bilan précis de l'opération 2009 est attendue dans le courant du mois de janvier.
Pour le moment, Eric Woerth s'auto-congratule sur des éléments très approximatifs : "Au 8 ou 9 décembre, on était à plus de 500 millions d'euros de fiscalité. Ça veut dire grosso modo trois milliards d'euros de capitaux concernés", a-t-il déclaré lors du "Grand Rendez-Vous" d'Europe-1/Le Parisien/Aujourd'hui en France. Les repentis seraient "plutôt 3.000 que 1.500".
Faut-il comprendre que l'intégralité des sommes identifiées en août ont été rapatriées en France et fiscalisées comme il se doit ? Que nenni !
3. Les propos d’Eric Woerth sont faussement flous. Pour les exilés concernés et leurs conseils, ils sont très clairs. Eric Woerth veut pérenniser l’amnistie, sans l’avouer. Dimanche soir, le mot n’est pas lâché, concédé, avoué. La démarche adoptée depuis le printemps n’a pas porté ses fruits, si l’on compare ses résultats avec ceux de nos voisins italiens. En Italie, une amnistie fiscale totale a permis de rapatrier et/ou régulariser quelques 95 milliards d’euros. Et le gouvernement Berlusconi espère récupérer encore 30 milliards d’euros supplémentaires d’ici la clôture de l’opération en avril prochain. Les fraudeurs devaient rapatrier leurs biens placés à l'étranger (capitaux, titres, bijoux, yachts...), s’acquitter d’une taxe libératoire de 5 % de leurs valeurs, en échange de l’absence de pénalités. Fin 2009, le ministère italien des finances estimait à 4 milliards d’euros le montant d’impôts ainsi récupérés.
En France, Woerth préfère l’amnistie douce et discrète, négociée de gré à gré dans les couloirs de Bercy. Le ministre reste critiqué. L’ancien président de HSBC France, Gérard de Bartillat, estimait récemment que « En agissant ainsi, la France fait plus qu'une faute. Nous allons perdre des dizaines de milliards, l'équivalent d'un gigantesque plan de relance". Selon lui, le patrimoine des exilés français placé en Suisse représenterait plus de 100 milliards d'euros, "dont au moins 10 milliards pourraient directement tomber dans les caisses de l'Etat grâce à une taxe appliquée sur le modèle italien".
Il sait de quoi il parle. La banque HSBC est à l’origine du (petit) fichier de 3000 contribuables français brandi par Eric Woerth depuis août dernier.


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