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L’entente Hydro-Québec / Power NB, un nouveau Meech ?

Publié le 05 janvier 2010 par Jclauded
Les premiers ministres du Québec et de sa province voisine, le Nouveau-Brunswick (NB), viennent de signer un accord important en vue de l’achat par Hydro-Québec (HQ) de tous les biens de la société Power NB. Cette entente du 29 octobre dernier doit se concrétiser par une loi de l’assemblée législative du NB avant le 31 mars 2010, suite à une consultation populaire. L’HQ vise le marché d’électricité américain qui croît sans cesse et veut renforcer sa position de fournisseur d’énergie propre aux américains du nord-est.
Les conditions de cette acquisition par HQ en font une très bonne affaire pour le Québec et pour le NB. Mais elle comporte un danger politique qui a été souligné récemment par l’ex-ministre péquiste Richard Le Hir dans le journal « le Devoir ». Il craint que « tout ce que le pays compte de démagogues et de pêcheurs en eaux troubles va se mobiliser pour fustiger une opération qui accroît sensiblement l’emprise de l’Hydro-Québec sur le marché de l’électricité dans le nord-est du continent ». Le Hir va plus loin et ajoute que le débat qui commence « risque de devenir le déversoir de tous les préjugés anti-Québécois qui prolifèrent et pestilencent au Canada ». En somme, pense-t-il, un nouveau débat à la « Lac Meech » nous guette.

Déjà les PM de Terreneuve et de Nouvelle Écosse regimbent.
L’entente HQ-NB est une première au Canada car c’est la première fois qu’une province veut prendre le contrôle et la gérance d’une société de la couronne appartenant à une autre province. NB Power doit devenir une société subsidiaire de HQ. Le sénateur canadien Lowell Murray, un des fiers artisans de l’entente du lac Meech, souligne, dans un document qu’il a préparé récemment, que le parlement canadien a des intérêts dans ce dossier et ne peut rester indifférent ne serait-ce qu’à cause de l’avenir du centre nucléaire de Point Lepreau qui fait partie de l’entente puisque le Canada a juridiction sur l’énergie atomique. Il y a plus, puisque l’entente touche d’autres juridictions fédérales comme le commerce interprovincial, le commerce international et le sujet du transfert d’une juridiction législative à une autre province.
La raison des critiques de Terreneuve et la Nouvelle-Ecosse est qu’ils craignent que des barrières soient élevées par HQ en rapport avec le transport de leur électricité vers les USA. Selon l’entente, l’opérateur actuel indépendant, qui assure le transport de l’électricité au travers du territoire du NB, sera acquis par HQ qui assumera ce rôle puisqu’elle détiendra toutes les interconnections du système intégré de transport d’électricité actuelles et futures au NB. On peut comprendre les craintes exprimées par les compétiteurs de HQ, qui, ne sentent pas rassurés et s’inquiètent malgré que la constitution canadienne prévoie que le parlement canadien peut intervenir et corriger une situation d’abus par une province en rapport avec l’énergie.
Ces provinces ne sont pas les seules qui se posent des questions. Il y a aussi les États américains de la Nouvelle-Angleterre et de New York. Comme importateurs et acheteurs, leurs intérêts résident dans la fourniture d’électricité par plusieurs sources à prix compétitifs. Déjà le PM du Québec, Jean Charest, a été convoqué par certains gouverneurs de ces États pour discuter des effets de l’entente sur leurs marchés futurs et réclamer des garanties d’HQ. Ces gouverneurs ne se montrent pas entièrement satisfaits et comptent sur le Canada pour assurer que l’entente HQ-NB réaffirmera les principes historiques et les pratiques passées des échanges commerciaux entre les deux pays.
En rapport avec l’autorité législative du NB, l’entente spécifie clairement que la souveraineté du NB demeure intacte exceptée dans le cas de la génération, de la transmission et de la distribution de l’électricité. Sur ce sujet, le NB a cédé ses droits, pour toujours.
Il est clair que le gouvernement du Canada doit intervenir avant que la législation soit présentée. Il ne peut oublier ses responsabilités pour des raisons politiques comme il semble tenté de le faire. Le temps est venu. Il doit jouer son rôle et, sans remettre l’entente en jeu, répondre de façon satisfaisante aux frustrations des provinces qui contestent l’entente et agir pour amenuiser les craintes des gouvernements des états américains du nord-est. Cela permettra d’éviter des poursuites judiciaires, sur un ou plusieurs des aspects de l’entente, qui pourraient en remettre l’application ad vitam aeternam.
De son côté, le gouvernement du Québec doit reconnaître l’importance des oppositions qui s’élèvent et tout faire pour les calmer et les accommoder.
En agissant promptement, nos gouvernements faciliteront la concrétisation de l’entente et la préparation de la législation dans le temps prévu. Ils nous feront éviter aussi un débat politique acrimonieux qui aura plus à faire avec le passé que le futur, et qui, comme écrit Le Hir, « ne pourra se solder que par la défaite des uns et des autres avec les risques politiques que cela comporte pour l’avenir du Québec et du Canada ».
Claude Dupras

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