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Copenhague = de la difficulté d’être terrien

Publié le 06 janvier 2010 par Mercure

Copenhague = de la difficulté d’être terrienL’échec de la conférence de Copenhague sur le climat aurait, selon les journalistes, étonné beaucoup de monde, étant donné les immenses espoirs que l’humanité avait placé en elle. Pour ma part, je suis très étonné de cet étonnement. En effet, dans un article du 18 novembre, j’évoquais déjà la certitude de son échec (La mondialisation à l’américaine a bel et bien échoué - voir son lien en fin d’article) et je n’étais pas le seul à en être convaincu.

La citoyenneté terrienne n’existe pas, ou du moins pas encore. À Copenhague, le dernier jour de la conférence, les dirigeants des tribus non fédérées de la planète ont confirmé indirectement, mais très fermement, cette réalité aux habitants de la planète. Évidemment tout le monde le savait bien, mais n’en avait peut-être pas tiré toutes les conséquences.

Ce que ces tribus ont pratiqué jusqu’ici sous le nom usurpé de “mondialisation“, pour tromper le vrai monde, n’a jamais existé. On aurait dû plus simplement appeler ces pratiques, “libre échangisme“. De son côté, l’organisme désigné par les initiales OMC, également tribal, qui tente avec difficulté de discipliner ces échanges, on devrait plutôt l’appeler : Office des marchandises colportées. Cet “office” n’est en effet que cela, car il ignore totalement les cultures, les religions, les ethnies, bref, tout ce qui caractérise vraiment le Monde et tout ce qui rend chaque pays et sa population, différent des autres, et surtout : unique. C’est la raison même de son échec. Tout ramener à l’économie comme si elle constituait l’unique raison de vivre de l’humanité signe une intelligence de robot incapable de saisir la profondeur de la vie sociale, et réagissant exclusivement à des commandes numériques écrites machinalement par des automates universitaires. Difficile de croire que ce sont des économistes. Tout diplôme ne renvoie qu’à lui-même !

En effet, les seuls aspects de l’union du monde humain qui intéressent ceux qui prétendent savoir gouverner la planète, sont à présent les échanges commerciaux de marchandises et de monnaies, sous le doux nom de Phynance. Les autres sujets ne sont là que pour distraire l‘opinion publique des véritables objectifs des puissants. Nous sommes désormais gouvernés par des automates, qui croient être des humains pensants. Le sort de la planète et de ses habitants leur est totalement indifférent en dépit des discours brillants qu’ils nous administrent, simples dictons, aphorismes et mantras, appris par cœur et répétés à l’envie.

On peut assez facilement comparer les tares de leur essai d’unification du monde à celles de la construction de l’Union Européenne, modèle réduit de la planète, avant qu’elle ne se dote en novembre d’un président et d’une représentante aux Affaires Étrangères. Auparavant, cette Union était seulement économique, avec la monnaie unique depuis 2001, et souffrait précisément de l’absence de toute structure politique contraignante. C’est précisément cette absence qui a déterminé le lamentable échec de la conférence de Copenhague. On peut affirmer en toute lucidité que sans une telle structure, il sera impossible de mener une bataille réussie contre le changement climatique en cours.

Mais dans les salles animées de la rencontre, un autre grand absent semblait avoir été oublié : La crise mondiale, laquelle, malgré toutes les annonces mensongères de sa fin prochaine, continuait son processus de destruction parmi les hommes et les entreprises. Le sujet n’en semblait plus actuel. Personne n’en parlait. Mais c’était là une fausse quiétude.

Elle se trouvait tapie dans l’ombre de chacune des phrases prononcées par les intervenants. Chacun de leurs mots dissimulait le spectre de la croissance en panne, et de la tension vers une nouvelle économie plus forte encore, pour faire vivre des dizaines de millions de chômeurs sur la planète, et cela sans que tous ces discoureurs ne se rendent compte le moins du monde que c’était précisément cette croissance à marche forcée qui avait fabriqué la menace climatique, le sujet du jour. Quelle incohérence et quelle contradiction ! Tous ces pourcentages de réduction de CO2 n’étaient analysés que comme autant de pourcentages de chômeurs en plus pour leur pays. Dans ces conditions comment croire que tous ces beaux messieurs avaient franchi terres et mers pour discuter d’efforts qui ne pourraient que compromettre l’autre grand sujet qu’ils avaient en tête ? Pourquoi ne pas avoir reporté cette conférence à plus tard, une fois tous les chômeurs remis au travail ?

Il est donc regrettable que la crise n’ait pas été officiellement à l’affiche, au lieu de l’avoir laissé inavouée dans les replis cervicaux des grands de ce monde. On aurait évité une hypocrisie de plus. On aurait compris. On aurait pardonné l’échec.

Crise et climat, les deux “C“, sont en effet deux aspects indissolublement liés dans leur sort commun. Copenhague est un échec, mais le “G22“, également précédé du même espoir de voir les peuples de la planète se réunir et travailler ensemble pour résoudre une crise systémique qui perdure, débouche aujourd’hui sur le constat que rien n’a changé, faute de décisions réellement mondiales. Premier échec que l’on cherche à cacher, car il marque la persévérance du monde dans l’hypocrisie et l’incompétence, filles d’idéologies persistantes.

182 ou 183 chefs d’États réunis pour prendre une décision, quelle pitié ! Dans les assemblées de députés des pays démocratiques, la règle de la majorité, bonne ou mauvaise, permet de prendre des décisions applicables à toute la nation. Comment s’imaginer qu’il pourrait en être autrement dans une assemblée mondiale dont les participants se sentent observés par leurs peuples, auxquels, bientôt, ils demanderont de les réélire, et qui subissent au moment même les affres d’une crise mondiale qui n’en finit pas, malgré les apparences et les discours.

On est donc fort loin d’une réelle mondialisation, car elle ne pourrait vraiment commencer qu’à partir d’une unification politique concrète, et l’on peut être sûr que la question climatique  ne sera résolue que sous la condition de la création d’une autorité mondiale. C’est peut-être une utopie, et je ne suis pas assez naïf pour ne pas voir toutes les implications et par conséquent toute les difficultés d’un tel projet, mais c‘est seulement à ce prix que l’humanité sera sauvée ou non. Il ne sert donc à rien de le nier pour se donner simplement à nouveau des raisons d’en reculer l’échéance.

On comprendra maintenant pourquoi la comparaison avec l’Union Européenne permettait de décoder la poutre dans l’œil de la conférence.

Pourtant, de la déception de Copenhague a jailli un nouveau cautère sur nos jambes de bois. On dit maintenant partout que, finalement, l’impasse de Copenhague n’était qu’un début, mais que les bonnes décisions seront prises à la prochaine conférence mondiale, l’année prochaine à un autre Marienbad, laquelle en programmera sans doute elle-même

Copenhague = de la difficulté d’être terrien
une autre à un autre Marienbad du monde, et ainsi de suite jusqu’au moment où la planète des Hommes partira à la dérive et que la pénultième conférence soit prévue sur un radeau de la Méduse.

Tout le monde aux chaloupes … !


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