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Le portage salarial : comment, combien, pourquoi ?

Publié le 06 janvier 2010 par Aubonheurdesmots

Portage On recense aujourd’hui en France entre 12 000 et 15 000 portés, c’est-à-dire des personnes qui se font payer leurs prestations via une société de portage. En France, la formule est restée confidentielle pendant de nombreuses années, pourtant le portage semble faire aujourd'hui des heureux parmi cette nouvelle race de « salariés indépendants ».

Pour tester le marché en minimisant les risques, le portage est une solution. Il permet de concilier salariat et activité indépendante. Les activités adaptées au portage sont celles qui offrent une prestation intellectuelle (conseil, audit, communication, formation, traduction, réalisation de sites internet…), excepté les professions réglementées, les commerçants et les artisans.

1/ Comment ?

Le portage salarial, c’est quoi ?

Il s’agit d’un statut bien adapté à ceux qui étaient salariés auparavant et qui veulent se lancer dans la création d'entreprise. Cette formule permet en effet à un indépendant (« porté ») d’effectuer différentes missions pour le compte d’un client tout en étant salarié d’une société qui le représente. Cette société dite de « portage » encaisse le montant des missions de l’indépendant, lui fournit différents services, le déclare aux différents organismes sociaux (Assedic, caisses de retraite, Sécurité sociale…) et lui verse un salaire, calculé en fonction des missions qu'il aura effectuées. Le porté est ainsi salarié de la société de portage qui transforme ses honoraires en salaires et qui lui établit un contrat de travail.

Nombreux sont les anciens salariés et actuels demandeurs d'emplois à utiliser cette formule qui permet de bosser en freelance sans avoir à créer une entreprise.

Un certain nombre d’étapes doit être respecté pour concrétiser ce mariage à trois, entre la société de portage, le client et le futur créateur.

- Le créateur doit déjà avoir des clients ou tout au moins des prospects. C’est à lui et à lui seul de trouver des missions ou des contrats et de fixer le montant de ses interventions.

- Après avoir trouvé sa première mission, le créateur signe un contrat de travail avec la société de portage choisie qui fixe les règles du jeu entre la société de portage et lui. Il s’agit selon les cas d’un CDD, d’un CDI ou d’un contrat à temps partiel.

- En parallèle, il est conseillé d’établir un devis (proposition commerciale) à faire signer par le client qui définit clairement les modalités techniques, tarifaires et délais convenus oralement.

- Le porté effectue sa mission. Il peut travailler chez lui ou dans les locaux de la société de portage.

- Une fois la mission terminée, la société de portage facture le client et reverse les honoraires perçus au porteur de projet sous forme de salaire.

Sans la signature d’un contrat de travail entre le porté et le porteur, le dispositif ne peut exister. Le paysage juridique du portage a été, par ailleurs, brouillé par quelques affaires et des cas de dérive exceptionnels. Toutefois, on ne saurait vous conseiller d’étudier à la loupe le contrat de travail. Pour la première mission, il est fréquent que le porteur propose un CDD renouvelable pour une durée limitée à dix-huit mois. Passé ce délai, si vous avez fait la preuve de votre capacité à enchaîner les missions et à générer un chiffre d'affaires suffisant, la dite société vous offrira alors un CDI à temps partiel...

La rémunération du porté

Les pratiques sont multiples. Le porteur prélève souvent entre 10 et 15 % de commission sur le montant total de la facture du porté. À cela s'ajoutent les charges sociales patronales et salariales. Au total, le porté reçoit un salaire net équivalent de 45 à 55 % des honoraires facturés hors TVA.

Certains signalent que leurs frais de gestion dans une société de portage sont inférieurs à 10 % car ils bénéficient d’une dégressivité liée à l'augmentation de leur chiffre d'affaires. Attention, certaines sociétés appliquent généreusement la dégressivité sur la totalité du chiffre d'affaires, tandis que d'autres s'en tiennent aux tranches supérieures.

Le porté dispose-t-il d'un salaire mensuel ? Là encore les pratiques sont multiples. Certaines sociétés font dépendre l'obtention d'une rémunération des heures de mission effectuées chez le client. Chez d’autres, le porté perçoit un fixe conventionnel mensuel défini par le Syntec, auquel s'ajoute un salaire tenant compte des dépassements de chiffre d'affaires facturé. En effet, un consultant travaille quand il est en prospection ; il devrait être rémunéré pendant ces périodes, pas seulement quand il exécute sa mission. Et si le client ne paie pas sa facture ? Le salaire doit ou devrait être versé au porté comme le prévoit la charte du SEPS.

Le droit aux Assedic

Oui. Un consultant à son compte peut cumuler l'allocation de chômage et ses premiers revenus, à certaines conditions. Un consultant à son compte peut cumuler l'allocation de chômage et ses premiers revenus dès lors que ceux-ci ne dépassent pas 70 % du montant du salaire qui a servi de calcul à son indemnisation, et ce, pendant dix-huit mois au maximum.

2/ Combien ça coûte ?

Revenons sur cette fameuse commission prélevée par la société de portage qui représente un des points clés du choix. Si le taux de frais de gestion tourne généralement autour de 10 % du chiffre d’affaires, sa fourchette s’étend de 3 % à 15 %.

Le fameux taux de frais de gestion (ou commission) appliqué par la société de portage est souvent ce que l’on regarde en premier quand on veut recourir au portage salarial. Le secteur commence à compter pléthore de sociétés et l’on peut se prêter au petit jeu d’une étude de marché. Cependant, derrière ces différences de taux, peuvent se cacher des différences de services qui peuvent se révéler de coûteuses options par la suite.

Un taux de frais de gestion de 10 % me paraît raisonnable. Méfiez-vous des sociétés de portage qui affichent des tarifs très bas. Plus le chiffre d’affaires du salarié porté est élevé, plus le taux de frais de gestion baisse. Vous me direz, cela va de soi mais tout simplement passer des factures très régulièrement permet d’obtenir un taux de frais de gestion plus avantageux. D’une part, car des missions régulières font augmenter votre chiffre d’affaires et comme vu précédemment, un chiffre d’affaires élevé fait baisser le taux de frais de gestion.

Montant minimum des facturations

Certaines sociétés de portage ne prennent les portés qu’à partir d’un minimum de facturation, d’autres acceptent les petites facturations mais le répercutent sur le taux de frais de gestion ; cela signifie que vous aurez des difficultés à obtenir un taux inférieur à 10 % si votre mission facturée au client ne dépasse pas un certain montant. Certaines sociétés vous diront d’emblée qu’elles sélectionnent leurs portés d’après leurs activités, certaines étant plus porteuses et rentables pour eux.

Date de versement du salaire au porté

Il existe deux modes de fonctionnement pour le paiement du salarié porté. Soit un salaire mensuel selon le minimum de la convention collective et une régularisation du solde au moment du recouvrement des factures. Soit uniquement sur recouvrement des factures et dans ce cas autant être réellement à son compte. Ou encore d’autres règlent dès que vous leur avez transmis l’ensemble de vos factures à la fin de mois. Cette option peut prendre différents noms : « préfinancement », appelée aussi « factoring » ou « avance de trésorerie ». Mais attention, si le client ne paie pas au final, à vous de vous renseigner si le « trop perçu » sera déduit du prochain salaire, ou si la société de portage a contracté une assurance contre les impayés.

Modalités de paiement des factures par le client

Certaines sociétés de portage exigent que le client paie un pourcentage d’acompte dès la commande. Cet acompte tourne souvent autour de 30 % du montant total. À vous de vous renseigner, si vous souhaitez ne pas imposer cette condition aux clients, que le taux de frais de gestion n’augmente pas.

La situation géographique

La situation géographique importe finalement assez peu aujourd’hui : avec les moyens de communication (téléphone, internet, extranet), tout peut se faire à distance, ou presque. Inutile donc de choisir la société de portage la plus proche de chez soi. Il est préférable de rencontrer l’équipe de la société de visu au moins une fois pour établir un meilleur contact et juger de son sérieux. Et d’avoir un conseiller attitré pour éviter la désagréable impression d’être un simple numéro de dossier face à un interlocuteur qui change constamment. Soyez davantage vigilant sur ce dernier aspect (personnalisation du traitement du dossier, réactivité et efficacité) que sur la localisation de votre société de portage. Si vous souhaitez participer à d’éventuelles formations proposées par la société de portage, vous sentir moins « isolé », optez pour une société de portage assez proche de votre domicile.

Gestion des frais professionnels

Renseignez-vous sur ce qu’englobent les frais professionnels (téléphone, fournitures, frais de prospection commerciale, repas avec un client…). Demandez-vous si vous aurez beaucoup de frais à déduire, faites les estimations les plus précises possibles pour déterminer la formule qui vous convient le mieux dans ce qu’offre la société. Mais dans tous les cas, vous devez pouvoir facturer des frais de mission à votre client (frais de déplacements, d’hébergement, de restauration… nécessaires à cette mission).

Travailler avec d’autres salariés portés

Des sociétés de portage permettent de travailler en réseau. Ce service est parfois inclus dans les frais de gestion ou peut être payant. Ce service vous permet de rentrer en contact avec d’autres portés de la dite société dans d’autres domaines que le vôtre (communication, informatique, marketing, gestion, ressources humaines…) ou dans le même domaine pour venir en complément en cas de surcharge d’activité ou incapacité temporaire de répondre à vos missions. Cela peut être intéressant par exemple pour s’associer dans le cadre d’une réponse à un appel d’offres.

Autres services proposés

Les cartes de visite et papier à en-tête (pour vos devis, courriers, etc.) – mais autant le faire soi-même, et le faire passer en frais professionnels et qui plus est se mettre mieux en valeur en personnalisant ses documents au maximum -, location de bureaux (pour réaliser une présentation devant des clients potentiels, organiser une formation), épargne salariale (comme bon nombre d’entreprises, quelques sociétés de portage développent l’épargne salariale pour les portés), protection sociale (mutuelle, régime de prévoyance qui permet de constituer un capital décès), accès à son compte personnel par extranet, 1 % logement…

Les portés formateurs

Dans le cadre d’une activité de formation, il faut vous assurer que la société de portage a obtenu un numéro de déclaration d’existence. Celui-ci permet de signer une convention de formation entre le client et la société de portage. Formalité indispensable pour que l’entreprise faisant appel au consultant porté puisse faire passer les frais en formation continue pour ses salariés. Cela peut être un argument non négligeable pour prospecter.

Quelques pièges

Dans le cas où la société de portage peut ou veut : - rajouter des frais pour l’assurance responsabilité civile, la taxe professionnelle, la visite médicale annuelle… Cela est déjà compris dans les charges patronales et salariales déduites du salaire ou dans les frais de gestion ;

- facturer une inscription à l’embauche ou des frais d’ouverture de dossier ;

- faire payer l’édition d’une facture ou d’une feuille de paye. Ce serait un comble puisque la société de portage prélève déjà des frais de gestion pour cela. Mais d’après des témoignages de portés, cette pratique se voit parfois ;

- facturer une simulation de feuille de paie, notamment lorsque vous prenez contact avec une société de portage pour déterminer si elle vous convient. Au contraire, certaines sociétés de portage bienveillantes mettent en ligne un tableau de calcul pour vous permettre de voir votre salaire en fonction des honoraires facturés au client et de vos frais ;

- rajouter des frais de relance des clients pour le recouvrement des factures. Ils n’ont pas lieu d’être puisque le rôle d’une société de portage étant de vous décharger de la facturation, ce service doit par définition être compris dans les frais de gestion de base ;

- contraindre le porté à afficher de la publicité pour la société de portage sur sa voiture personnelle.

3/ Pourquoi avoir choisi le portage salarial

Plusieurs motifs peuvent se présenter :

- la paperasse qui est ennuyeuse et prend du temps

- certains jugent préférable de se consacrer à la prospection de nouveaux clients,

- l’assurance personnelle de responsabilité civile professionnelle, qui coûte très cher (c’est la société de portage qui contracte une assurance pour l’ensemble de ses portés).

Le portage, n'est-ce pas, avant tout, un service qui a un prix ?

Oui, sans doute, tout comme recourir à un avocat ou à un expert-comptable. C’est un choix professionnel, qui libère des formalités administratives et peut conduire à mettre en place une communauté d'échanges avec d'autres consultants.

On peut l’avoir fait:

- ne serait-ce que pour le versement de salaire dès les missions effectuées sans avoir à attendre le paiement des factures par le client,

- pour avoir l’impression de se sentir moins « seul »,

- d’être finalement toujours dans une société avec un statut de salarié,

- par défaut

- Même si certains signalent de ne pouvoir déduire du chiffre d’affaires que 10 % de frais par mois, ce qui peut être insuffisant quand on doit changer son ordinateur, acheter certains logiciels, ils n'envisagent pas pour autant de procéder autrement et trouve au portage salarial plus d'avantages qu'à d'autres statuts qu'ils avaient choisi avant d'y recourir.

La loi de modernisation du marché du travail (article 8) a légalisé le portage salarial et depuis le 25 juin 2008, le portage a un statut légal : il en est mentionné dans le Code du travail (l'article L. 1251-64) dans le chapitre consacré aux contrats de travail conclus dans une entreprise de travail temporaire.

Ce billet vient en complément des billets écrits sur ce sujet : Télétravailleurs, avez-vous pensé au portage salarial ? et Être indépendant dans un monde de salariés.


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LES COMMENTAIRES (1)

Par aide creation entreprise
posté le 07 septembre à 10:46
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La LME de 2009 a imposé une réforme du portage salarial. Un accord a été annoncé, il ne reste plus qu'à le mettre en place. Or, si les sociétés de portage salarial ont négocié de conserver leur spécificité (face aux sociétés d'intérim notamment), les salariés portés devront être cadre et justifier d'un haut niveau de facturation (50.000€ par an). Que deviendront les autres salariés portész actuellement ?

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