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Une leçon doit être tirée des vaccins contre la grippe H1N1 : la santé ne doit pas être laissée aux margoulins !

Publié le 09 janvier 2010 par Kamizole

grippe-h1-n1-ces-messieurs-de-l-famille.1263020090.jpgCertes, «la santé n’a pas de prix mais elle a un coût» entendis-je quand je fis un stage d’administration hospitalière entre 1982 et 1984. Il faut bien évidemment en tenir compte et ne jamais dépenser inconsidérément. Les économies faites à bon escient devraient permettre de mieux allouer les dépenses en évitant les gaspillages qui n’ont guère manqué. La Sécu a été trop longtemps une vache à lait – pas seulement pour les assurés ! loin s’en faut quand bien même certains auraient-ils commis quelques abus - et l’on a mis beaucoup trop de temps à rectifier le tir.

Les exemples ne manquent guère mais je ne retiendrais aujourd’hui qu’un seul. Depuis le début des années 80 j’entendais parler des médicaments génériques – les molécules qui ne sont plus couvertes par un brevet – mais il fallut attendre les années 2000 pour qu’ils soient imposés aux prescripteurs. Pourquoi un tel retard alors que dans d’autres pays ils étaient déjà couramment prescrits ?

Je ne vois qu’une seule réponse : tant qu’ils étaient fabriqués par des labos indépendants personne n’en voyait la nécessité même en tenant compte de leur moindre coût – justifié par le fait qu’ils n’avaient pas à investir dans des frais de recherche - qui eût été pourtant intéressant pour l’équilibre de la Sécurité sociale. Or, c’est au moment où les grands laboratoires qui les avaient produits se sont mis à produire eux-mêmes leurs propres génériques – bien obligés parce qu’ils n’avaient plus l’exclusivité des molécules – qu’ils se sont imposés notamment en France.

Or, concernant les vaccins contre la grippe H1N1, je lis dans un article de Libération Afflux de critiques contre le gouvernement et son surplus de vaccins qui pointe une contradiction majeure qui rejoint exactement ce que j’avançais dans un article récent - à savoir que ce sont bien les laboratoires qui ont imposé leurs conditions non seulement financières mais surtout médicales - que le ministère de la Santé se justifiait en avançant que lorsque la France a passé commande de 94 millions de doses de vaccins «au début de l’été» c’était le schéma d’une double injection par personne qui était alors prévu. Or, début novembre, «les premiers résultats des essais cliniques ont été en faveur d’un schéma vaccinal à une seule dose»,

C’est exactement la même chose lorsque Roselyne Bachelot justifie le traitement de faveur accordé aux laboratoires fabricant les vaccins sur le plan de la responsabilité en cas d’accidents de vaccination par le fait que l’AMM – autorisation de mise sur le marché qui suppose un contrôle rigoureux de l’innocuité des produits pharmaceutiques nouveaux – n’était pas encore accordée. Autrement dit, les autorités sanitaires françaises ont accordé un blanc-seing aux laboratoires avant même que les essais cliniques – phase essentielle de la délivrance de l’AMM – n’aient été menés à terme.

Cela s’inscrit dans une tendance générale qui vise à raccourcir considérablement les délais de mise sur le marché des médicaments et que l’on observe dans la majeure partie des pays ainsi que dans les organismes européens chargés de ces autorisations. Dans ce dernier cas c’est plutôt gênant car si un pays est réticent il suffit qu’une majorité se dégage au sein des Etats membres pour que le médicament lui soit néanmoins imposé. Souvent contre l’avis des autorités sanitaires nationales chargées en autres de surveiller l’innocuité des médicaments. Les nouveaux comme les anciens.

A qui profite le crime ? sinon aux multinationales de la pharmacie… Il s’en faudrait de beaucoup qu’elles soient vertueuses et préoccupées par les problèmes de santé publique. Quand bien même le slogan de Sanofi-Avantis serait-il «L’essentiel c’est la santé»… Pur pipeau !

Nous savons bien que ces monstres de l’industrie pharmaceutique qui dominent le marché mondial – de même que les multinationales en général – n’ont qu’une seule obsession : faire le max de profits en un minimum de temps pour satisfaire les exigences de leurs actionnaires – fonds d’investissement ou représentants d’autres firmes géantes – sans se soucier le moins du monde du sort des malades qu’ils prétendent soigner.

Cela se traduit notamment par la recherche de la “molécule miracle”. Non point tant celle qui permettra de faire une avancée considérable dans le traitement de maladies graves, ce temps-là est bien fini ! mais de découvrir un médicament dit “block buster”. Entendre celui qui permet d’obtenir un chiffre d’affaires annuel d’au moins 1 milliard de dollars.

Dès lors, tous les coups sont permis. Certes, les firmes pharmaceutiques investissent dans la recherche. Mais j’ai lu il y a peu que les résultats ne seraient guère au rendez-vous. La recherche, même appliquée, reste un exercice aléatoire et ce qui semble parfois prometteur sur le papier ou sur des souris en labo ne produit pas forcément les résultats escomptés chez l’être humain. De surcroît, certaines molécules tout à fait prometteuses ne sont pas dénuées d’effets secondaires – en fait aucun médicament n’y saurait échapper, c’est la loi du genre… s’ils sont efficaces sur un symptôme ou une affection ils n’en agressent pas moins l’organisme – et ceux-ci sont plus ou moins graves.

Or, plusieurs exemples récents ont prouvé que certains experts ont délibérément passé sous silence des effets secondaires graves apparus lors d’essais cliniques. Ce fut le cas notamment pour le Vioxx, médicament miracle qui dut être retiré précipitamment du marché.

Il en serait tout autrement si ces experts ne portaient jamais une double casquette ou signalaient ce que l’on appelle pudiquement un “conflit d’intérêt”, à savoir qu’ils sont rémunérés par le laboratoire pharmaceutique dont ils défendent les intérêts devant les autorités sanitaires chargés d’approuver ou non la mise sur le marché. Ne me faites surtout pas dire que les experts sont forcément pourris. Mais l’on ne parle en règle générale que de ceux par qui le scandale est arrivé.

Il me serait nettement plus agréable de signaler qu’un expert travaillant d’une façon ou d’une autre pour un laboratoire l’aurait signalé tout en disant avoir mené ses travaux avec la plus grande rigueur intellectuelle, sans omettre qu’une molécule présente des avantages mais également des inconvénients qu’il signalerait à l’attention des autorités sanitaires chargées de l’agréer ou non. Sans doute en existe-t-il mais ils ne défraient pas la chronique et c’est fort dommage.

Je signalai, dès le 3 novembre 2005 – le blog n’avait que 5 mois mais déjà toutes ses dents bien acérées – dans un article expert téléguidés que selon un article du Monde datant du 23 octobre la revue très sérieuse revue Nature précisait que «la fameuse neutralité des experts médicaux chargés d’expertiser et de recommander des médicaments serait mise en défaut par le pouvoir financier de l’industrie pharmaceutique qui rémunérerait d’une façon ou d’une autre 35 % d’entre eux»… et qu’encore s’agissait-il de ceux qui avaient fait état d’un conflit d’intérêt. Quid de ceux qui l’avaient omis ?

Je demandai par ailleurs ce qu’il fallait penser de l’Afssaps – agence spécialisée dans les recomman-dations médicales – sachant qu’elle est directement financée par une contribution des laboratoires.

Je récidivai le 1er janvier 2007 avec le cas de Richard Doll épidémiologiste britannique reconnu qui avait certes mis en évidence le rôle du tabagisme dans le cancer du poumon mais avait refusé d’admettre que «l’agent orange» défoliant utilisé massivement par l’armée américaine au Viet-Nam provoquait des cancers ainsi que force produits chimiques, faisant tout juste une exception pour le chlorure de vinyl mais pour le seul cancer du foie…

Or, l’on devait apprendre par la suite qu’il était rémunéré par l’industrie chimique américaine et britannique et qu’il avait perçu à ce titre des honoraires substantiels (22.188 €) et qu’au surplus il était devenu consultant «secret» (!) du secteur industriel de l’amiante et qu’il refusait d’admettre – contre toute évidence – que l’amiante était à l’origine du redoutable mésothéliome de la plèvre qui atteignit – avec l’asbestose, l’équiv-alent de la silicose chez les mineurs – les professionnels en contact avec l’amiante.

Je fis quelques jours plus tard un large tour d’horizon des problèmes liés au manque d’indépendance des experts en général querelles d’experts d’experts : tous pourris ?! à quelque domaine qu’ils appartinssent : pharmacie, agro-business – OGM, engrais, pesticides, etc. - agro-alimentaire, chimie en général – quand ce sont les industriels qui financent et donc contrôlent et orientent forcément les recherches.

On pourrait en dire autant de la directive Reach puisque la Commission européenne admet que ce soient les industriels eux-mêmes qui indiquent les substances chimiques qu’ils utilisent et leur dangerosité. J’avais dit en son temps – le 3 décembre 2006 - Pauvre directive REACH tout le mal que je pensai d’une telle insigne connerie. Autant demander à l’assassin pris sur le fait de prétendre qu’il n’a pu occire sa victime !

Dernier exploit en date qui m’avait été signalé par la newsletter de Napakatbra - oeuvrant de si magistrale façon sur le blog Les mots ont un sens que je le soupçonne d’en avoir au moins huit ! - dont j’avais allégrement pillé un florilège d’au moins 4 articles pour écrire le 4 avril 2009 laboratoires en folie des bons docteurs Paricy-l’Oseille & autres experts en-dessous de tout soupçon .

J’en retiendrais – Scandale de grande ampleur dans l’industrie pharmaceutique - le cas tout à fait embléma-tique du Dr Scott S. Reuben, «un des chercheurs américains les plus prolifiques dans le domaine du traitement de la douleur postopératoire qui a fabriqué de toutes pièces la plupart des données de ses recherches, depuis 1996, au profit de plusieurs géants pharma-ceutiques. Pfizer et Merck notamment».

Ainsi, il n’aurait jamais effectué le moindre essai clinique qu’il décrit pourtant dans au moins 21 (sur 76) articles scientifiques publiés depuis 1996… Parmi les médicaments qu’il a ainsi «promus», le Vioxx de Merck dont on sait qu’il a dû être retiré en 2004 du marché en raison de sa dangerosité… Pour les seuls Etats-Unis : 160.000 crises cardiaques et 27.785 décès !

Pour la bonne bouche… c’est bien le cas de le dire ! Acomplia, la petite pilule miracle contre l’obésité qui tape sur le moral qui faisait suite à plusieurs articles où je m’interrogeai sur l’innocuité du Rimonabant, molécule promue à grand renfort de publicité par le laboratoire qui commercialisait ce remède. Alors même que la Drug Food Adminstration américaine n’avait pas donné son feu vert pour le commercialiser et suspectait déjà d’être responsable de troubles psychiatriques, les autorités sanitaires européennes s’étaient empressées d’accorder l’autorisation de mise sur le marché.

Mal leur en prit car elles durent l’interdire quelques mois plus tard quand il fut reconnu qu’elles provoquaient de graves dépressions avec tendances suicidaires. Maigrir c’est très bien mais si c’est juste pour que les corps puissent tenir dans un cercueil standard ?

Pour rester sur le marché de l’obésité – dont les multinationales de l’agro-business et de l’agro-alimentaire sont hautement responsables en tant que pourvoyeuses de mal-bouffe ! – il reste à traiter du cas «Alli» autre petite molécule-miracle – en fait un médicament déjà ancien mais utilisé à plus faible dose et dont jusqu’à présent le seul inconvénient connu était de provoquer des diarrhées car les graisses sont éliminées par les selles. Il reste que selon l’Afssaps La pilule anti-obésité est mal utilisée ais-je lu dans un article du Monde relativement récent (21 décembre 2009).

Ces gélules anti-obésité vendues – sans ordonnance – feraient l’objet d’une utilisation non appropriée chez 17 % de la clientèle – essentiellement féminine – aurait indiqué l’Afssaps le 18 décembre 2009. Ce taux de mauvais usage serait lié “au non-respect de l’indication ou à l’existence de contre-indications” et sans remettre en cause le rapport bénéfice d’Alli, l’organisme de surveillance sanitaire «invite les patients prenant Alli ou souhaitant débuter de traitement à consulter leur médecin pour bénéficier d’un bilan de santé et détecter d’éventuels risques liés aux pathologies associées».

La voie de la sagesse. Ce qui veut dire également qu’Alli ne serait pas forcément d’une innocuité totale si l’obésité est associée comme il arrive souvent à des maladies qui peuvent être graves : diabète et maladies cardio-vasculaires notamment. Je me demande également quelles pourront être les conséquences de diarrhées répétées. D’autant qu’un afflux de graisses dans l’intestin peut, ce me semble, provoquer une malabsorption des nutriments nécessaires comme c’est le cas par exemple avec l’huile de paraffine – un dérivé du pétrole ! – utilisée contre la constipation et qui provoque des avitaminoses en cas d’usage prolongé.

Entre autres inconvénients les diarrhées répétées diminueraient les effets des pilules contraceptives selon un article déjà ancien de 20 minutes Alli : la pilule qui n’aime pas la pilule. Autrement dit, si Alli fait perdre du poids elle risquerait de donner un gros ventre de façon fort différente.

Par une de ces petites ironies dont l’histoire en général a le secret : Acomplia était produit par Sanofi-Aventis et Alli fait les beaux jours de GlaxoSmithKline santé grand public (GSK) qui en aurait déjà commercialisé 460 000 boîtes depuis février 2009… Deux labos fer de lance pour la production des vaccins contre la grippe H1N1. Gros profits tous azimuts. N’est-elle pas belle la vie des multinationales de la pharmacie ?


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