Magazine

Contes de l'ordi sacré : Gudule au centre de la terre 29

Publié le 16 janvier 2010 par Porky

gateau-mariage-geek.jpg

EPISODE 29 (et avant dernier) : Où le lecteur qui ignorerait en quoi consiste une cérémonie de mariage trouvera dans cet épisode de quoi combler ses lacunes. Pour les autres, l'épisode risque d'être aussi ennuyeux que ladite cérémonie, et ce n'est pas peu dire...  

Le bras droit passé sous celui de Myxomatose, son bouquet d'asphodèles dans la main gauche, l'Impératrice glissait légèrement sur le parquet ciré, éblouissante dans sa robe pourpre à longue traîne en velours de soie ; les bijoux de la couronne posée sur sa tête scintillaient ; un collier d'or et d'argent, à triple rang de rubis s'épanouissait sur sa gorge, tandis que les bracelets en diamant, lapis-lazuli, et topaze qui enserraient ses poignets jetaient des feux si redoutables que l'Assemblée fut obligée de baisser les yeux sur son passage. La Belle Monogramme et le Prince Charmant Logarithme tenaient la traîne de la robe et La Princesse de Conte de fée, relookée pour l'occasion, et donc grandement appréciée par le public, grommelait intérieurement à cause de la lourdeur du tissu (cela n'étonnera personne) ; le Caribou Magique et Marsupilania suivaient, puis la Femme Maigre et le Masque de fer ; le Caribou Satanique accompagné de l'immonde Jo la Fine fermaient le cortège.

Il y eut un petit incident au moment où la mariée arriva devant le magistrat, incident qui passa heureusement inaperçu : l'Impératrice, qui marchait sans regarder où elle mettait les pieds, glissa sur une perruque malencontreusement non ramassée et aurait chu sur son séant si Myxomatose ne l'avait retenue d'une poigne musclée. Cet imprévu n'eut aucune conséquence fâcheuse si ce n'est qu'on s'étonna que la couronne de Sa Majesté fût mise de travers, mais on ne dit rien, pensant qu'il s'agissait d'un usage à la Cour ou d'un charmant caprice de l'Impératrice : une couronne placée en déséquilibre sur la tête et qui menaçait de dégringoler sur le nez à chaque seconde.

On installa L'Impératrice à côté de son futur mari, on rééquilibra discrètement la couronne, on arrangea la traîne de façon à ce que Sa Majesté, en s'asseyant, ne repoussât pas le fauteuil en arrière et ne tombât point ainsi sur le derrière, et, s'étant assuré que tout allait pour le mieux dans le meilleur des mondes possibles, on prit place parmi les invités de marque et on suivit avec intérêt la cérémonie.

Le lecteur a sans doute déjà assisté dans sa vie à cette idiotie qu'on appelle un mariage. L'auteur ne va donc pas lui infliger, et s'infliger à soi-même, une description de ladite cérémonie. Il suffira de dire que tout se passa bien, que le baiser rituel fut échangé avec une passion qui n'excluait pas la grâce et l'élégance, que L'Impératrice ne s'évanouit pas, qu'elle parapha d'un trait majestueux le Registre des Mariages mais qu'elle écouta avec assez peu d'attention le discours du Magistrat, tout occupée qu'elle était à serrer la patte de son Maléfique adoré. On trouva ça très mignon, et d'ailleurs, personne n'écouta tellement c'était rasoir.

Repas, bal, buffet, boissons à gogo, etc, etc... Rien ne manqua pour faire de ce raout l'événement annuel du Centre de la terre. Nos amis ne regrettaient certes pas Gudule, qui avait été expédiée avec le caribou fou et le Servile Séide sur Pluton l'Infernale Atrocité quelques minutes avant la cérémonie, mais ils pensaient avec une certaine nostalgie à leurs aventures passées et le Prince Logarithme, qui ne manquait pas une danse, allait quelquefois sangloter dans les bras de Sa Belle Monogramme parce que, disait-il « tout ça est maintenant vraiment fini, va falloir se remettre à cette vie débile ! » Myxomatose regrettait carrément ses bagarres avec Monogramme, Princesse de conte de fée, que le fait de ne plus pouvoir insulter le Lapin Putride commençait à déranger fortement. Quant à Marsupilania, dans sa robe en tulle rouge fuschia et sous son chapeau de paille décorée de grosses pommes rouges et jaunes, elle broyait du noir, littéralement.

La voyant dans cet état, le Caribou Magique s'approcha d'elle. « J'ai eu un entretien avec le Maléfique, avant les noces », dit-il. « Ah ? » fit Marsupilania, l'oeil terne et tout à fait semblable à celui d'un poisson mort. « Quelqu'un  t'attend dans la bibliothèque, continua le Magique, imperturbable. Il a quelque chose à te dire. » « Encore un gros bouffi merdique ? » dit peu gracieusement la Vaillante. « Eh... Peut-être que non... » répliqua le Caribou en souriant. « C'est mon CDC ? C'est lui qui est dans la lingerie ? » « La bibliothèque, sourdingue », dit le Caribou, mais il n'eut pas le temps d'en dire plus, la Vaillante était partie à fond de ballon vers la buanderie. « Oh et puis zut ! pensa le Caribou Magique. Elle finira bien par le trouver ! »

Quelques jours après la noce, il fallut bien songer à se séparer. Tout le monde pleurait, y compris l'Impératrice que le fait d'avoir le Pouvoir Absolu et d'être immortelle n'avait point rendu inhumaine et prétentieuse. Aussi fit-elle en sorte d'arranger tout le monde. Et avec l'accord de son mari, elle mit au point un certain nombre de plans, pas trop complexes, mais efficaces, reconnaissons-le. Elle proposa à Marsupilania de devenir sa dame de compagnie et de rester sa Maîtresse à enseigner ; puisque la Vaillante ne pouvait plus quitter le Centre de la terre, autant l'occuper un peu. Quant au CDC, il aurait la possibilité, très exceptionnelle, de se tirer de cet endroit quand il le voudrait, comme il le voudrait, avec pour seule condition d'y revenir très vite, sinon, ça allait barder pour son matricule. « C'est très bien, approuva Marsupilania. Comme ça, je l'aurai sous la main et en même temps, il fera pas suer avec son amour de la liberté. »

Myxomatose allait certes regagner ma cabane au Canada avec le Magique, mais on lui apprit un certain nombre de formules pour se rendre au Centre de la terre. « Il est bien évident que vous serez vous aussi toujours le bienvenu, Caribou Magique, précisa L'Impératrice. Vous n'avez point besoin d'avertir et de demander audience. »

Restaient Logarithme et Monogramme. La Princesse de Conte de fée n'avait aucune envie de séjourner au Centre de la terre. Elle aimait son Pavillon de chasse dix-huitième et s'y sentait très à l'aise. Mais elle savait que son Beau Logarithme allait se laisser tomber dans une déprime innommable si on le séparait de ses amis. Et elle n'avait aucune envie de passer son temps à lui filer des paires de baffes. Adonc, elle et L'Impératrice Multimédia concoctèrent un arrangement qu'elles soumirent à l'intéressé. « Loga chéri, dit Monogramme. Nous allons regagner toi ton château, moi mon pavillon, mais Multimédia nous a donné les mêmes formules qu'à Myxomatose. Donc, si tu as envie de voir tes amis, tu n'as qu'à les prononcer et tu seras transporté où tu voudras : ici, dans ma cabane au Canada, au Pavillon de chasse, chez la Femme Maigre, chez le Masque de Fer à Sainte-Marguerite, etc... Tu peux même aller rendre visite à Gudule sur Pluton l'Infernale Atrocité... Non, c'est pas vrai, c'est une plaisanterie », corrigea-t-elle voyant Logarithme devenir vert de peur. « Tu viens quand tu veux, dit Multimédia. Et si jamais tu déprimes, tu n'hésites pas. D'ailleurs, je crois que nous allons nous revoir souvent, tous. »

Et le Masque de fer ? Et  la Femme Maigre ? Ils avaient décidé de s'installer dans la fameuse grotte pluri centenaire de l'île Sainte-Marguerite, et le Masque écrivait tandis que la Femme Maigre cuisinait des langues de boeuf et le quittait assez souvent pour aller participer à des émissions de télés à Paris, tourner des films bidons, faire de l'humanitaire au moment des fêtes de fin d'année, et essayer de graver sa voix sur un CD, ce qui relevait de l'impossibilité surnaturelle, le matériel des studios d'enregistrement semblant posséder une vie propre et se refuser à enregistrer quoi que ce soit dès qu'elle ouvrait la bouche. Quant à Jo la Fine, elle avait été réexpédiée dans les couloirs du centre de la terre, munie d'un escabeau tout neuf, avec ordre de faire mourir de peur tous les visiteurs qui croiseraient son chemin, mission extrêmement facile pour elle à exécuter, elle n'avait rien à faire, rien à dire, seulement à se montrer.

(A suivre)

(Et voilà, c'est presque fini ! Plus qu'un épisode, et les Contes vont s'achever... Mais justement, quelle va être la fin ? Quel sera l'avenir de nos héros ?... Attendons la semaine prochaine...)


Retour à La Une de Logo Paperblog

A propos de l’auteur


Porky 76 partages Voir son profil
Voir son blog

l'auteur n'a pas encore renseigné son compte l'auteur n'a pas encore renseigné son compte