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Chômage: la précarité menace un million de fins de droits

Publié le 20 janvier 2010 par Juan

Depuis quelques heures, on parle d’Outre-Mer, depuis quelques mois, on parle d’identité nationale. On devrait parler précarité. Près d’un million de chômeurs se retrouveront en fin de droit en 2010. Comme par hasard, la nouvelle a été révélée par la direction des statistiques, enquêtes et prévisions de Pôle emploi en novembre, au moment où Eric Besson lançait son funeste débat sur l’identité nationale. Depuis, rien n'avance. Un groupe de travail se réunit les 20 et 22 janvier entre partenaires sociaux. Le Medef veut «plus d'éléments pour réfléchir» d'ici une prochaine réunion calée le ... 26 février. Le gouvernement botte en touche. Le sujet est pourtant simple.
1. En février 2009, les partenaires sociaux s’étaient mis d’accord sur une fausse amélioration du dispositif d’indemnisation des chômeurs, entrée en vigueur en avril : l'accès à l'indemnisation démarrait plus tôt (après 4 mois de travail contre 6 mois précédemment). Présentée comme une mesure sociale attendue, cette réduction à 4 mois de cotisations de la durée minimale nécessaire pour prétendre à indemnisation était en fait un retour à la situation d’avant 2003. Pire, la durée maximale d’indemnisation a été uniformément calée sur la durée d'affiliation à pôle emploi et plafonnée à 23 mois. Depuis des années, les réformes de l’assurance chômage ont ainsi réduit progressivement et durablement la durée d’indemnisation des chômeurs.
2. Depuis avril 2008, la mise en œuvre de la défiscalisation partielle des heures supplémentaires par le gouvernement a déstabiliser l’emploi intérimaire et en CDD, bien avant la récession économique de l’été 2008 et l’envolée du chômage. Ce dispositif, application de la promesse présidentielle du « Travailler plus pour gagner plus » a eu des effets désastreux. De 10,7% des emplois début 2007, la part des CDD et intérimaires est tombée à 9,8% début 2009. Pôle emploi révèle ainsi que « En 2008, parmi les chômeurs en fin de droits à l'assurance-chômage, 45 % s'étaient inscrits à la suite d'une fin de contrat à durée déterminée (CDD) et 14,7 % après une fin de mission d'intérim ».  En 2008, quelques 726 161 chômeurs avaient déjà cessé de recevoir une quelconque indemnité chômage. 38 % d’entre eux avaient cotisé moins d'un an et 38 % étaient des chômeurs de longue durée.
En d’autres termes, la défiscalisation des heures supplémentaires a précipité davantage de salariés précaires (intérim, CDD) dans les bras de pôle emploi, qui, une fois chômeurs, vont constituer le gros des bataillons des « fins de droits. »
3. Fin novembre, le nombre de demandeurs d’emploi en fin de droits a cru de +3,5% sur un an. Les chômeurs de longue durée représentent 40% du total, un nombre en forte augmentation en valeur absolue : 947 000 au troisième trimestre 2009 contre 760 000 sur la même période en 2008.
4. Sur le million de futurs exclus de l’assurance chômage, 38 % d’entre eux seulement auront accès à une aide sociale : « sur la période de juillet 2008 à juin 2009, 16 % des chômeurs en fin de droits étaient éligibles à l'allocation spécifique de solidarité (ASS), et 22 % au revenu minimum d'insertion (RMI), remplacé depuis par le revenu de solidarité active (RSA) », indique Jean-Paul Blouard, directeur adjoint de la direction des statistiques, enquêtes et prévisions de Pôle emploi. Pour mémoire, l'ASS (450 euros mensuels au mieux) est réservée aux salariés ayant travaillé au moins cinq ans durant les dix dernières années. Elle devrait concerné environ 17% des fins de droits. Elle a été revalorisée a minima le 1er janvier dernier : +1,2%. Concernant le RSA, nombre de chômeurs n’y auront pas accès, car le calcul d'ouverture des droits au RSA dépend des revenus du conjoint. En se référant aux statistiques du RMI, on peut mesurer la précarité des futurs exclus : 80 % des allocataires du RMI vivaient sous le seuil de pauvreté en 2005.
5. Le gouvernement a également encouragé le chômage partiel, afin de limiter l’envolée du chômage général. L’inactivité est ainsi cachée dans les entreprises. Ces aides supplémentaires au chômage partiel ont coûté 300 millions d’euros en 2009.
6. Les syndicats préconisent une extension des durées d’indemnisation (+555 millions de surcoût pour un mois ; 1,3 milliards d’euros pour 3 mois). Une piste refusée par le gouvernement, et notamment son secrétaire d’Etat à l’Emploi Laurent Wauquiez. Ce dernier botte en touche, et recommande de répartir différemment l’assurance chômage. Selon lui, cette problématique des fins de droits est une « question de gestion de l'assurance dans la crise ». En novembre, quelques jours avant la publication des prévisions de fins de droits par Pôle emploi, Laurent Wauquiez fanfaronnait sur l'efficacité des mesures gouvernementales de lutte contre le chômage: « la France est avec l'Allemagne le pays qui a le mieux amorti la crise de l'emploi»
7. S'ajoutent les difficultés de Pôle Emploi, débordé par l'envolée du chômage et la désorganisation issue de la fusion mal préparée des ASSEDIC et de l'ANPE. En août dernier, les agences d'Ile-de-France ont dû fermer, pour rattraper le retard des dossiers intraités. Des agences privées ont été sollicitées, à prix d'or, pour gérer certaines catégories de demandeurs d'emploi. Actuellement, chaque conseiller suit en moyenne plus de 94 chômeurs, alors que le gouvernement tablait sur une fourchette comprise entre 30 et 60. Un conseiller de Pôle Emploi sur cinq s'occupe de plus de 130 demandeurs d'emploi.
Lire aussi:

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  • Equilibre Précaire 
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