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Pour que le développement durable devienne une réalité "habitée" : les propositions de l'architecte Françoise-Hélène Jourda

Par Marc Chartier
Structure abri de la station de métro Parilly, à Lyon :
réalisation Jourda Architectes
(illustration extraite du site de cette agence)

Dans un rapport adressé en septembre 2007 à Jean-Louis Borloo, ministre de l'Écologie, du Développement et de l'Aménagement durables, l'architecte Françoise-Hélène Jourda développe les mesures les plus importantes à prendre pour transformer le parc immobilier afin que le développement durable devienne une réalité "habitée".
Ce rapport est le résultat d'un travail accompli avec l’aide de nombreux experts en France et à l’étranger et grâce à l’expertise acquise sur le terrain depuis vingt ans, particulièrement en Allemagne et en Autriche et dans le département que dirige F.-H. Jourda à l’Université technique de Vienne.
La construction figurant parmi les plus importants facteurs de la dégradation de l’environnement et de la production de gaz à effet de serre, la situation actuelle requiert un changement radical de nos habitudes ainsi que de nos modes de concevoir et de construire.
Une réelle « révolution culturelle » s'impose, mais en de domaine, la France a un retard considérable par rapport aux autres pays européens, tout particulièrement ses voisins de l’Europe du Nord.
Pour illustrer son propos, F.-H. Jourda énumère quelques éléments d'un bilan pour le moins peu flatteur :

  • notre RT 2005 est totalement dérisoire et d'une efficacité contestable, faute de contrôles systématisés ;

  • des millions de m², construits depuis des décennies, qui sont de véritables "passoires" thermiques ;

  • une certification HQE qui manque cruellement d’ambition et d’efficacité et qui a également des effets pervers ;

  • retard en matière de techniques de construction et d’équipements, voire de matériaux.

Il est donc urgent de mettre en place les outils permettant, de manière volontaire ou réglementaire, de transformer le patrimoine bâti existant ou à venir pour qu’il s’inscrive dans les délais les plus courts dans une véritable politique de développement durable et pas seulement d’économie d’énergie.
Quatre dispositifs principaux permettront de générer une prise de conscience de tous les acteurs (y compris le particulier qui construit sa maison individuelle), un encouragement à la réalisation de projets ambitieux et innovants en matière de développement durable, et en particulier une obligation de réduction des consommations énergétiques, dans des délais compatibles avec les capacités humaines et techniques disponibles aujourd’hui :

1. Mise en place d’un label DDC (Développement Durable de la Construction) :
- qui intègre tous les aspects du développement durable,
- qui couvre ou rassemble la multitude éparpillée des labels et certifications diverses existant aujourd’hui,
- qui soit modulé selon les régions climatiques, les usages et la nature des travaux à effectuer,
- qui soit un label à points donnant droit, selon le nombre de points acquis, à des niveaux de label différents,
- qui soit doté d'un système de cotation révisé périodiquement (tous les deux ans par exemple),
- qui permette, selon le nombre de points d’accorder des aides plus ou moins importantes,
- qui anticipe les réglementations thermiques,
- qui puisse devenir le label de référence européen.

2. Mise en place d’un Volet Développement Durable à fournir lors de la dépose du Permis de construire ou de démolir. Ce Volet, dont les grands chapitres reprendront les critères du label, devra être affiché sur le chantier, accompagnant l’affichage réglementaire et permettant ainsi la comparaison aisée entre des opérations de même nature.

3. Élaboration de nouvelles réglementations thermiques compatibles avec les capacités de l’industrie de la construction et dans des délais acceptables.
Dans un délai de quatre ans, les investisseurs et les maîtres d’ouvrage, les concepteurs, les entreprises et les fabricants devraient être capables de rattraper le retard accumulé, de former leurs équipes, de concevoir et de faire homologuer, ou simplement de mettre sur le marché les services et les produits existant souvent ailleurs.
Il est raisonnable de penser qu’une réglementation exigeant une consommation en énergie primaire maximale en 2012 de 80 kWh/m2.an puis en 2014 de 50 kWh/m2.an serait applicable sans difficulté majeure, rendant ainsi possible l’exigence suivante : celle de bâtiments à énergie zéro, ou positive en 2018 grâce à l’emploi massif des énergies renouvelables.

4. Création d’une Agence gouvernementale du Développement Durable de la Construction dont le rôle sera de :
- définir et promulguer le label DDC pour une mise en service en janvier 2009,
- procéder à sa réactualisation périodique,
- annoncer et définir les réglementations thermiques à venir et leur calendrier,
- susciter la mise en place de formations qualifiantes et inter-professionnelles,
- mettre en place les procédures d’urgence d’homologation des matériaux et techniques de construction,
- créer les banques de données et d’échanges,
- mettre en place les modalités de contrôle et de retour sur expérience,
- promulguer et valoriser les opérations exemplaires.
Cette agence devra non seulement rassembler et associer toutes les compétences existant en France dans les institutions et les associations régionales et nationales, mais aussi travailler en coopération avec les organismes étrangers expérimentés et avec les institutions européennes concernées.
Sous ces conditions, le secteur de la construction en France pourra en une douzaine d’années devenir responsable et exemplaire, prouvant ainsi qu’il est possible de vivre et de travailler dans des bâtiments confortables et sains, sans effet dommageable pour la planète, en préservant les ressources, et donc la capacité des générations futures à répondre à leurs besoins.

Téléchargement du rapport, via Le Moniteur-Expert : ICI


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