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POLLUTIONS : COMMENT METTRE NOS PETITS A L'ABRI ?, Marie Claire, II-10

Publié le 20 janvier 2010 par Caroline Rochet
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MARIE CLAIRE
Pollutions : comment mettre nos petits à l'abri ?
  Février 2010

Biberons, lingettes, doudous ... A en croire la rumeur, nos enfants risqueraient le cancer à chaque instant. Info, intox, un peu des deux ? Pour ne pas s'affoler inutilement mais tout faire pour protéger nos bouts de chou, on a fait le tour des experts. Ca valait le coup.


Au XXI° siècle, impossible d'éviter les sujets de panique verte. Et, bien sûr, encore moins possible de ne pas loucher avec angoisse sur nos enfants, nés en plein coeur de notre société ultra moderne, premières victimes du cocktail de pollution dans lequel nous vivons. D'une part, parce qu'ils n'ont connu "que" ce monde-là, d'autre part, parce que leur organisme en plein développement est particulièrement vulnérable à ces dangers environnants. Ondes électromagnétiques, tabagisme passif, pesticides, mais aussi produits chimiques utilisés sans contrôle pour le bâtiment, le mobilier ou les produits d'entretien : le danger semble être fourbement tapi partout. Et les faits, pas joyeux, parlent d'eux-même : les cancers chez les petits progressent de 1 à 2 % par an depuis 30 ans (en lien avec certains facteurs environnementaux), le nombre et la qualité des spermatozoïdes a diminué de 50% en 50 ans, l’exposition du fœtus ou du bébé aux substances chimiques industrielles peut mener à des désordres du développement neurologique (autisme, retards mentaux), les malformations génitales explosent chez les nouveaux-nés, on identifie plus de 200 produits chimiques dans le sang du cordon ombilical, et des dizaines de pesticides dans les urines de femmes enceintes ... N'en jetez plus ! Face à ces nouvelles fort réjouissantes, les parents s'intéressent à l'alimentation bio ou aux jouets sans phtalate. On apprend vaguement "ce qu'il faudrait faire", sans bien savoir démêler le bon grain de l'ivraie, un peu découragés face aux efforts supposés qu'une éducation verte demanderait. Le risque ? Finir par ne plus faire attention à rien, persuadés que la cause est perdue d'avance. Erreur ! La bonne nouvelle, c'est que dans la plupart des domaines concernés, on peut facilement améliorer la qualité de vie de nos petits, grâce à quelques gestes intelligents. Voici lesquels.

◊ ALERTE AU BIB' !

De quoi on parle ?

Ces derniers temps, les medias s'enflamment sur le thème du Bisphénol A (BPA) dans les biberons. Pour qui n'est pas scientifique, le sujet reste obscur. Qu'en est-il exactement ? "Le Bisphénol A est un composant du plastique présent notamment dans la majorité des biberons et des bouteilles en plastique. Sous l'effet de la chaleur, il migre de façon importante dans les aliments, explique André Cicolella, chercheur en santé environnementale, porte-parole du Réseau environnement santé(1) (RES). C'est une des substances chimiques les plus utilisées au monde : on la trouve dans la vaisselle d’enfant, les boites de conserve, le revêtement des canettes, certains films étirables ..." Or, cette substance est soupçonnée de perturber le système hormonal, provoquant notamment cancers du sein et de la prostate, diabète, stérilité, et troubles du comportement. Elle diminue aussi l'efficacité des traitements du cancer du sein.

Doit-on s'affoler ?

Au nom du principe de précaution, le Canada a interdit les biberons au BPA, suivi de près par une partie des Etats Unis. En France, les crèches de Paris, Toulouse et Nantes ont décidé de s'en passer. Pourtant, jusqu'à juin dernier, le ministère de la Santé, s'appuyant sur des rapports de l'Afssa(2) (études "obsolètes à la déontologie discutable", dixit André Cicolella), concluait à l'innocuité. Le dossier est aujourd'hui reconsidéré : les dernières études concluent à une dangerosité potentielle, et l'Afssa vient d'annoncer qu'elle reprenait ses travaux sur le sujet.

Et nous, on fait quoi ?

Par précaution, les experts conseillent évidemment de modifier un peu nos habitudes. Par exemple préférer les biberons en verre (ou en plastique sans BPA, c'est-à-dire sans les chiffres 7, 6 ou 3 gravés au fond), comme chez Dodie, Philips, Beaba, Green Republic ou SGD. On peut aussi stocker et réchauffer la nourriture dans des récipients en verre, éviter canettes et boites de conserve, et choisir les produits les plus bruts possibles. Faisable, donc !

(1) www.reseau-environnement-sante.fr

(2) Agence française de sécurité sanitaire des aliments, www.afssa.fr

◊ L’ASSIETTE EN QUESTION

De quoi on parle ?

On n'a pas très envie de le savoir, et pourtant : notre assiette est de plus en plus douteuse. Pesticides, additifs, arômes de synthèse, édulcorants, acides gras trans, sulfites ... Nos enfants en sont évidemment les premières victimes. Au banc des accusés, en première ligne, les pesticides : avec ses 80.000 tonnes annuelles, la France est championne mondiale (en terme de ratio / surface) de leur utilisation … !

Doit-on s'affoler ?

Toxiques, cancérigènes, perturbateurs endocriniens et immunitaires, générateurs de retards de croissance intra-utérine, présents tant dans l’alimentation que dans l’eau, les pesticides n’agissent pas que sur les insectes ravageurs, mais nous touchent aussi de plein fouet. Quant aux graisses saturées et trans, elles augmentent le risque de maladies du cœur. Pour ne parler que d’eux.

Et nous, on fait quoi ?

D’abord, on diversifie : le secret d’une alimentation équilibrée, c’est une bonne répartition entre les aliments, sans diabolisation. Ensuite, on n’évite pas les sacro-saints fruits et légumes, efficaces dans la prévention de nombreux cancers (grâce aux antioxydants, vitamines, minéraux, polyphénols). On se met aussi à lire les étiquettes : on a peur de n'y rien comprendre, mais en fait, il est assez simple de se renseigner une bonne fois pour toutes afin de choisir systématiquement les produits les moins transformés possibles. Et surtout, on mange bio ! Le Pr Charles Sultan, Professeur d'endocrinologie pédiatrique au CHU de Montpellier, confirme que loin d’être une mode bobo-marketing, l’alimentation bio est essentielle à qui souhaite réduire l’impact chimique de l’alimentation de ses enfants. Pendant la grossesse, on évite également le soja à haute dose (qui peut provoquer des malformations génitales). Pour les bébés, on essaie de préparer les petits plats soi-même (des phtalates ayant été retrouvés dans les petits pots industriels). On peut aussi soutenir le combat du WWF-France, « Oui au bio dans ma cantine », pour l’introduction de produits issus de l’agriculture biologique locale dans les cantines scolaires (à hauteur de 20% d’ici 2020).

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◊ CRÈCHES : DE L’AIR ?

De quoi on parle ?

L’année dernière, l'Association Santé Environnement de France(3) a analysé l'air de neuf crèches réparties sur tout le territoire, en se concentrant particulièrement sur trois particules dangereuses. Le benzène, qui provient de l'air extérieur, mais aussi de la peinture et des vernis intérieurs, et peut entraîner problèmes respiratoires ou leucémies chez l'enfant. Le formaldéhyde, puissant irritant des muqueuses et cancérigène, présent dans les sols en lino, le contreplaqué ou les peintures. Et les phtalates, ces produits chimiques présents dans les plastiques (jouets, sols, colles, trousses ...), qui peuvent causer la stérilité. Les trois sont des perturbateurs hormonaux. Problème : les taux de ces substances ont souvent (d’une à deux fois sur trois) dépassé leur taux de référence autorisé.


Doit-on s'affoler ?

Face au buzz lancé par cette étude de l'ASEF, les parents s'inquiètent, et Chantal Jouannot, secrétaire d'Etat à l'Ecologie, a lancé une grande enquête sur le sujet dans 300 écoles et crèches. "Notre étude n'a fait que mettre en évidence ce que tout le monde savait sans que personne ne bouge, scande le Dr Patrice Halimi, chirurgien pédiatre et secrétaire général de l'ASEF. Il existe des normes concernant l'air intérieur à la Médecine du Travail, mais rien pour les établissements des enfants ! Alors qu'ils passent plus de temps que nous à l'intérieur, et que leurs organismes sont en formation."


Et nous, on fait quoi ?

Selon le Dr Halimi, nous pouvons tous encourager l'Etat à bouger : "Les parents peuvent se mobiliser pour demander qu'un cahier des charges soit établi dans les crèches et les écoles : matériaux sains (l'ASEF exige un meilleur étiquetage des meubles), peintures écologiques, aération ... Et qu'on évite à l'avenir de construire des crèches trop près des routes. Mais ils peuvent aussi agir à la maison, en préparant la chambre de bébé des mois avant la naissance, afin que le mobilier et les peintures aient le temps de dégager leurs substances toxiques, en aérant bien la pièce. Contrairement à d'autres, cette cause n'est pas perdue ! Nous pouvons tous agir pour le mieux."

(3) ASEF, http://france-sante-environnement.fr


◊ À LA MAISON : PÉRIL EN LA DEMEURE

De quoi on parle ?

Nous passons 80 % de notre temps à l'intérieur. Or, du papier peint au produit d'entretien, de la bougie d'ambiance aux meubles, on a l'impression que tout est source de pollution. De fait, notre home sweet home est infesté de produits chimiques hautement toxiques, comme ceux cités plus haut ou encore les retardateurs de flammes, substance que l’on ajoute aux matériaux au cours de leur processus de fabrication afin de réduire le risque d’incendie. On peut aussi y ajouter les ondes électromagnétiques provenant de la téléphonie mobile ou du wifi, provoquant symptômes des plus bénins (maux de tête) aux plus inquiétants (leucémies, cancers du cerveau). Enfin, pour les petits, le Pr Charles Sultan souligne aussi le danger des jouets contenant des phtalates (soit tous les jouets chinois … !). Sympa.

Doit-on s'affoler ?

« Nous vivons dans des environnements très pollués, et les pathologies aigues explosent, confirme Fabien Squinazi, du LHVP (Laboratoire d'hygiène de la ville de Paris). Mais on peut améliorer les choses. » Quand on en est malade, le médecin peut envoyer un pro à notre domicile : le conseiller médical en environnement intérieur (CMEI). Avant d’en arriver là, on peut tout simplement faire preuve de bon sens, et réduire les dégâts.

Et nous, on fait quoi ?

Une partie du travail nous dépasse et concerne les pouvoirs publics, comme l’étiquetage des produits par exemple, et le Grenelle de l’Environnement a bien posé les questions à résoudre. De notre côté, conseille Fabien Squinazi, on peut réduire les pièges à poussières (bibelots, fleurs séchées), éviter les fenêtres bloquées, les systèmes de ventilation bouchés, l’humidité, les moisissures (responsables de pathologies respiratoires chez l’enfant), l’abus de bâtons d’encens, bougies d’ambiance et autres sprays parfumés, faire attention aux produits d’entretien trop toxiques (les écolos sont très bien), préférer une connexion Internet filaire au wifi, et éviter bien entendu le tabagisme, source de pollution la plus déterminante, même si « ce n’est pas dans la pièce où dort bébé » … Le réflexe évident ? Sans surprise, VENTILER. Aérer une bonne demi-heure par jour permet de renouveler l'air et réduire la concentration des polluants. Pour les enfants, on évite de les laisser jouer avec nos téléphones portables, on pense jouets en bois plutôt qu'en plastique (Nature & Découvertes), anneaux de dentition en tissu écolo, Playmobils (sans phtalates), et on lave les peluches avant utilisation !

 A lire : « Des bons gestes pour un bon air », à télécharger sur le site de l’Observatoire de la Qaulité de l’Air Intérieur (www.air-interieur.org), et le Guide « Jouets » de WECF (Women in Europe for a Common Future), une mine d’infos (http://wecffrance.canalblog.com).

◊ COSMÉTIQUES : PAS BESOIN DE SOUFFRIR POUR ÊTRE UN BEAU BÉBÉ

De quoi on parle ?

Depuis quelques temps, les cosmétiques pour bébé sont sur la sellette, suite à une étude du Comité pour le développement durable en santé (C2DS) ayant jugé dangereux le contenu des mallettes de cosmétiques pédiatriques distribuées à la sortie des maternités.  Les cosmétiques comprennent des parabens, phénoxyéthanol et BHT, soupçonnés de perturber le système hormonal des enfants. La barrière cutanée des tout-petits étant fine et fragile, les produits passent plus facilement dans le sang. Mais selon Olivier Toma, président du C2DS, la problématique est plus vaste : « Les enfants et les femmes enceintes sont, au-delà des cosmétiques, exposés à un cocktail de produits chimiques permanent et multiple, provenant de la qualité de l'air, la nourriture, la boisson ... Et cette multi-exposition est inquiétante car les conséquences de leur interaction n'est pas étudiée. »

Doit-on s'affoler ?

Ca dépend des interlocuteurs. Fabienne Bartoli, de l’AFSSAPS (Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé, chargée de leur évaluation et leur contrôle), tient à rassurer les consommateurs : « Les conservateurs sont essentiels dans les produits puisqu’ils protègent d’une contamination bactérienne, et leur quantité maximum est toujours respectée. » Mais pour Olivier Toma, ce n’est pas le problème : « Pour chaque produit concerné, les industriels disent respecter les normes, explique-t-il. Le problème est le mélange de toutes les substances ensemble. Pour connaître les effets de cette accumulation, il faudrait faire des études à 50 ans qui ne soit pas faite sur des rats de laboratoire mais sur des hommes ! » Logique, le Pr Charles Sultan ajoute : « Bien sûr, la concentration en parabens dans ces cosmétique se calcule au millionième … Mais si vous multipliez par 100 jours, puis 100 jours, le tout sur une peau ultra fine, vous imaginez le résultat ».

Et nous, on fait quoi ?

Pour Fabienne Bartoli, on peut continuer à utiliser les produits du commerce : « Le service de cosméto-vigilance de l’AFSSAPS avertit le public dès lors qu’elle constate un danger - comme lorsque nous avons demandé le retrait de lots de Lotion démaquillante pour les yeux Klorane. Nos contrôles sont réguliers : pas d’affolement … » Olivier Toma est beaucoup plus circonspect : "Il faut remettre du bon sens dans ses achats ! Consommer le moins transformé et le plus sain possible, ne pas se laisser envoûter par les bons mots des publicitaires, lire les étiquettes, et toujours se demander si le produit est bon pour ses enfants ". Côté cosmétiques, nos petits n'ont pas forcément besoin de lingettes ou de crèmes multiples, et le savon d'Alep (non allergène) suffit largement. Cyrille Telinge, de Novexpert(4), rappelle les bons réflexes : « Toujours penser à la mention hypoallergénique, l’absence d’huiles essentielles et la formule sans parfum. Préférer les pompes airless aux pots (pour ne pas tremper ses doigts dans le produit), et choisir des textures peu liquides – car plus il y a de l’eau, plus il y a de conservateurs. Préférer aussi les produits avec un maximum d’ingrédients d’origine naturelle, qui seront plus biodégrédables sur la peau. » Bref, d’idées malines en bons réflexes, et sans pour autant virer parano, on peut faire joliment pousser nos petits enfants bios.

(4) www.novexpert-lab.com


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