Le wadi Dhar se fraye un chemin dans le Djebel Harz (un wadi est un ruisseau). Au pied d’une source, s’élève le palais d’été de l’imam Yahya perché sur un piton de grès rouge Dâr Al-Hajjar (Palais du Rocher). C’est une surprenante construction.
Entre Sanaa et Marib se dressent de belles maisons-tours, des plantations de qat et des treilles de vigne. Immensément riches grâce au commerce de l’encens, les propriétaires locaux développèrent une agriculture aux portes du désert à l’aide de canaux d’irrigation. Dans le fameux Rub Al-Khali (quart vide), rien ne pousse, comme si Chitane, le diable, repoussait l’avancée de la foi.
Grâce à des ouvrages hydrauliques entièrement édifiés en pierre, les eaux de crue étaient maîtrisées et permettaient d’irriguer de larges zones. L’oasis de Ma’rib aurait couvert 10 000 hectares. Dans la sourate XXXIV-15 d’ Al Koran, il est fait allusion à la rupture du barrage à la fin du 6e siècle. « Nous déchaînâmes contre eux les eaux entassés dans un torrent. Leurs jardins submergés et détruits ne produiront plus que des fruits amers, des tamaris et quelques nabkas ». A voir le nouveau barrage situé à quelques kilomètres en amont de la digue antique. Cinq colonnes carrées demeurent, il pourrait s’agir des restes d’un palais.
Les enfants qui escaladent les piliers suivant la méthode dite « de la cheminée ». Ils en redescendent en glissant. Ce sont les individus les plus photographiés du Yémen ! (Mais pas par moi !).
Barâqish est un site préislamique. Il se compose d’imposantes fortifications hérissées de tours de guet. Fondées par les Minéens avant le 5e siècle de l’ère préchrétienne, elles ont gardé l’entrée du Jawf jusqu’en 24 avant J.-C., date à laquelle le royaume est tombé aux mains des Romains. Dès 400 avant J.-C., Barâqish fut la capitale du royaume minéen, l’un des plus urbanisés de toute la péninsule arabique. Ses remparts, hauts de 14 m, se voulaient probablement moins défensifs que symboliques. Il s’agissait de montrer ostensiblement la puissance d’une ville enrichie grâce à son commerce.
Saada présente ici une architecture de terre (zabur). A 1 800 m d’altitude. En 906, Al Hadi Yahya Ibn Hussein, un descendant d’Ali (gendre du Prophète), s’y installe et fonde la branche yéménite du zaïdisme. Au rythme des chants, les manœuvres lancent des boules de terre mêlée à des débris de paille au maître-maçon qui les agglomère en larges boudins hauts de 40 cm. On laisse sécher chaque niveau avant de monter le suivant. Le mur ainsi formé est lissé à la main et légèrement relevé à chaque coin car le 1er boudin est posé sur quatre pierres d’angle. Chaque nouveau boudin est légèrement décalé, ce qui confère aux maisons un aspect pyramidal. Les ouvertures sont prévues en cours de construction. Au rez-de-chaussée ne sont pratiquées que de simples meurtrières, les fenêtres vont par paire dans les étages supérieurs et sont encadrées d’un badigeon blanc rehaussé de motifs lancéolés. Volets et petits auvents de bois les protègent. Une bande de plâtre peut souligner le toit en terrasse dont les coins sont relevés par des crêtes dentelées. Le toit des plus riches est festonné par un parapet à arceaux. Même distribution qu’à Sanaa : étables et remises au rez-de-chaussée, étages pour domestiques ensuite, appartements des femmes et enfants. Tout en haut, l’étage est réservé aux hommes. Seul le mafraz est un ajout récent. La ville est ceinte de remparts. C’est surtout dans la région de Saada que l’on rencontre les Juifs du Yémen. Les relations entre l’Arabie du Sud et les Hébreux remontent à l’Antiquité. La présence de cette communauté judaïque au Yémen est attestée dès le 2e siècle de notre ère et Dhû Nuwâs, dernier roi himyarite, a même imposé la religion judaïque à son peuple !
La Tihâma est une longue bande plate chaude et sablonneuse qui longe la mer Rouge depuis la frontière du Yémen jusqu’au Bâb al Mandab (la porte des lamentations). La Tihâma (terre chaude) où la température peut atteindre 50°C l’été, a une hygrométrie de 85%. Aucun vestige de civilisation sud-arabiques. Les habitants sont plus noirs de peau et de type abyssin pour la plupart. Les maisons ressemblent plus à des cases africaines qu’aux châteaux et aux maisons-tours des montagnes yéménites. Ici, les habitants sont en majorité sunnites et non plus zaydites. Les femmes ne portent pas le voile, surtout les campagnardes ; quelques mosquées sont mêmes ouvertes aux étrangers. Huttes de paille ou de terre avec toit de chaume ceintes d’un mur de branchages épineux qui protègent le soir des hyènes et chacals.
Sabine
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