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L'Occident civilisationnel et la question identitaire (7/7), par Éric Timmermans

Publié le 03 février 2010 par Roman Bernard
Voici la septième et dernière partie de cet article consacré à l'identité occidentale.
7. Conclusion : De l'Occident civilisationnel au communautarisme gallique ?

La géopolitique a suscité mon intérêt dès l'âge de quinze ans. Nous étions alors en 1983. Nous approchions de l' « ère Gorbatchev » et de la fin de la « Guerre froide », mais nous ne le savions pas et rien, dans l'actualité, ne semblait devoir nous le faire prévoir. Opération militaire française Manta au Tchad, destruction d'un Boeing sud-coréen par la chasse soviétique, opération militaire US à la Grenade, massacre des soldats français et américains à Beyrouth et, bientôt, la crise des euromissiles. Non, décidément, rien ne nous permettait de croire que disparaîtrait, de notre vivant, le « rideau de fer », le « mur de Berlin », le « Pacte de Varsovie » et l'URSS elle-même, du moins pas sans guerre nucléaire. Et puis le « miracle » se produisit dans les années 1989-1991, rendant obsolètes les notions d'anticommunisme et d'atlantisme, telles que nous les avions entendues et envisagées jusque là.

Je n'en poursuivis pas moins ma « quête » géopolitique, par le fédéralisme européen d'abord, par l'occidentalisme ensuite, tentant toujours de faire coïncider une démarche identitaire civilisationnelle avec une certaine réalité géopolitique. Bien peu d'entre nous, toutefois, partagèrent cet intérêt pour notre monde, lui préférant le consumérisme et l'hédonisme qui explosèrent littéralement durant les eighties et les nineties. En diverses matières et notamment en matière identitaire, ces vingt années furent désastreuses pour l'Europe et l'Occident, particulièrement du fait de l'avènement de la « pensée unique politiquement correcte » et del'explosion du « festivisme consommateur ». L'on peut dès lors dire lorsque nous évoquons certaines questions géopolitiques, comme nous le venons de le faire, que nous ne faisons, tout au mieux, que théoriser à huis clos. Mais une réflexion partagée, même par un nombre restreint d'individus, vaudra toujours mieux que l'abêtissement organisé de millions d'imbéciles.

Cela dit, il faut bien reconnaître que les grands projets idéologiques et géopolitiques de naguère ne suscitent pas vraiment l'intérêt, et quoi de plus normal ? C'est là le signe d'une régression de la société, du déclin d'une civilisation, c'est là la marque d'un univers qui se retire de la scène plutôt que de s'étendre, de grandir et de briller. Le combat identitaire contre les « planétarismes », à savoir le global-consumérisme, l'altermondialisme (cet internationalisme « rouge » honteux ») et l'islam califatiste, n'en est que plus indispensable, mais sans doute doit-il s'organiser à un autre niveau, à un niveau non territorial.

Entre un projet d'unité civilisationnelle qui apparaît chaque jour un peu plus comme une chimère, du fait de sa dilution dans le « Village global » et du fait, plus encore, de la démission et du désintérêt des populations concernées — je parle de celles qui pourraient encore agir mais préfèrent se laisser aller aux délices de Capoue et non, cela va sans dire, de celles qui le souhaiteraient mais qui, sous la charge des réalités de la vie, se trouvent bien trop occupées par des impératifs de survie que pour pouvoir agir : l'être humain qui doit passer son existence à survivre n'a pas le temps de lutter contre la tyrannie du pouvoir et celui-ci le sait… —, et de vieux statonationalismes qui sentent le rance et la naphtaline, ma foi, je préfère ne pas choisir.

Alors quoi, le communautarisme ? Ce terme est l'un de ceux que l'on utilise sans réfléchir dans des cadres médiatiques et dialectiques interchangeables. Comme le relativisme, comme la technique, le communautarisme n'est, en soi, ni un bien, ni un mal, il est-ce que nous en faisons, il est aussi le fruit de certaines circonstances, il est enfin une réalité de notre monde, que nous le voulions ou non. On ne va pas contre la réalité du monde, surtout lorsque l'on ne possède pas le pouvoir et que le peu que l'on en possédait ou que l'on croyait en posséder en tant que citoyen d'une « démocratie » (ne nous esclaffons pas tous en même temps…), se réduit comme « peau de chagrin ».

Alors oui, en ce qui me concerne à un communautarisme « gallique », à une défense communautaire et prioritaire du monde européen ou/et occidental de langue et de culture françaises, ce qui m'amènera ultérieurement à approfondir ma réflexion à ce sujet, mais pas dans le cadre de ce texte. La résistance communautaire donc plutôt que le « grand jeu » géopolitique (ce qui ne doit pas empêcher la poursuite de la réflexion en ce domaine). La densité d'un enracinement cohérent plutôt que la dispersion dans de « grands projets » devenus illusoires. Une action communautaire cohérente plutôt que des nostalgies passéistes : un monde défunt ne ressuscite jamais. De petites unités de résistance plutôt que de grands mouvements d'une émouvante mais vaine mégalomanie.

Au-delà des différences et même des divergences idéologiques et géopolitiques, d'ailleurs devenues absolument obsolètes, les éléments identitaires qui se reconnaissent dans une même tradition « gallique » doivent se retrouver, agir politiquement et transmettre l'Héritage, faire primer la qualité sur la quantité, le Libre et le Beau sur l'arbitraire et la grisaille, et se souvenir toujours que l'Art et l'Acte sont intimement liés.

Éric Timmermans, Bruxelles


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