Hommage à mon frère Donat Ruben Leconte (Bob) Par Gardith...

Hommage à mon frère Donat Ruben Leconte (Bob)
Par Gardith L. Tabuteau, Gardithnic@yahoo. com
Du plus profond de mon cœur, j'adresse mes condoléances à toutes les familles, qui comme moi, ont perdu un être cher au cours du séisme du mardi 12 Janvier en Haïti. Aux familles des étudiants décédés en même temps que mon frère Ruben sous les décombres de son Université, le " Collège Ruben Leconte" sise à Delmas 53, je partage votre douleur.
Donat Ruben Leconte
Ce 12 janvier 2010, une date que les Haïtiens et moi n'oublieront jamais. D'ailleurs, ce fut la date d'anniversaire de naissance de feu ma mère, Mme Vve Richard Leconte. Je suis loin de vous aux États-Unis, mais je me sens si proche. Je partage votre douleur chers frères, chères soeurs. Tout comme vous, j'ai perdu un être cher et de la façon la plus atroce.
Comme pour vos fils, Ruben (Bob) est irremplaçable. Il avait dédié sa personne à la jeunesse haïtienne. Homme sérieux, timide, intelligent, de nature discrète, il caressait, sans fanfare, le rêve d'être utile à son pays en chaussant les souliers de feu son père, Richard leconte, fondateur de l'école de génie du même nom. Diplômé en génie à l'Université de notre père, muni d'un second diplôme en sciences économiques, il laissa le pays en vue de parfaire une maîtrise. La mort prématurée de notre père chambarda son plan. Le devoir de remplacer Papa à la tête de l'institution l'obligea à tout abandonner et rentrer au pays en vue d'assister notre mère dépassée par les charges que ce départ hâtif était venu lui incombées. Il représentait ma mere à l'ISHT. Sans remunération aucune, il s'est montré à la hauteur des devoirs de sa charge au point de l'en augmenter en ajoutant une section de comptabilité avec pour corollaire l'optimisation des programmes de l'Université. Ma mère et moi étions fières de ses performances. Il n'avait que 23 ans à cette douloureuse époque. Il était respecté de tous et de toutes. Il avait l'intelligence et la sagesse pour faire face aux problèmes inhérents à ses tâches, même si notre mère veillait à la bonne marche de l'établissement.
Tous les Dimanches à la messe de 10:00 heures au Sacré Coeur de Turgeau, Ruben accompagnait maman à l'église, lui apportant toute l'assistance, l'amour, et l'assurance qu'une mère avait besoin après la mort de son époux. Ruben était son homme de confiance, et maman pouvait toujours compter sur lui. Quand Ruben, un bon matin, a confié à maman son rêve de créer sa propre école, cette dernière avait entièrement endossé l'idée et la trouva géniale. C'est ainsi qu'en 1989, ce jeune Haïtien à vingt quatre ans, ambitieux, dynamique, progressif, et tenace a pu ouvrir, avec ses propres ressources, sa première École secondaire " Centre De Formation Classique et Économique d'Haïti" (CFCE) a Bourdon. Les choses n'ont pas été faciles, mais Bob a tenu bon et a réussi. Au fil des ans, il a mis sur pied CFCE # 2, l'École secondaire et sa propre Université de génie, d'Architecture et de Comptabilité à Delmas 53. Papa pouvait se reposer en paix. Ma mère nous laissa en 2002, mais elle avait la chance de voir l'un de ses enfants réussir sa vie et faire honneur à la famille en perpétuant le nom des Leconte.
Après avoir été attaqué par des assassins en 2004, Ruben décida de faire partir sa femme Nelsie, et ses enfants Nahissa et Brian pour les USA. Il préféra rester au pays, pour continuer le travail qui lui tient à coeur: aider la jeunesse de son pays à sortir de l'ornière. Je sais que beaucoup de familles, tout comme moi, ont perdu en Ruben un père, car il aidait souvent ceux qui ne pouvaient supporter financièrement leurs enfants. Mon frère refusait d'abandonner ses étudiants en se disant " Si je ferme une école, j'ouvrirai les portes d'une prison".
Nous l'avons perdu, mais je sais qu'il est parti avec son autre famille : ses jeunes qu'il chérissait tant. Il avait pu décocher des bourses d'étude au Canada pour certains étudiants les plus méritants. Directeur-Fondateur de ses Écoles Secondaires (CFCE) et Université 'Collège Ruben Leconte", en plus d'être l'unique investisseur, il s'est dévoué corps et âme jusqu'à sa mort.
J'aimais mon frère de son vivant, et l'aimerai jusqu' à mon dernier souffle. Je l'admirais d'être si intègre, laborieux, tenace, respectueux, tendre, simple, et un homme d'église. Il était un bon chrétien, et je sais que beaucoup comme moi se sentiront perdus sans lui. Il fut un époux , un père de famille exemplaire, un frère impeccable, un être généreux de son temps. Ce fut la bonté et l'honnêteté personnifiées.
Je remercie l"Education Nationale qui avait reconnu d'utilité publique les écoles et l'Université de Ruben Leconte, l'avait encouragé et l'aidé à aller jusqu'au bout de ses rêves. Également merci à tous les parents, amis, et étudiants qui avaient placé leur confiance en lui, et ses collaborateurs. Notre pays est en deuil. Port-au-Prince, la Capitale est détruite. Il ne nous reste que des souvenirs et des pleurs. Ruben faisait partie de la solution de notre pays, comme le chanteur Wyclef Jean, que j'admire. J'espère comme mon frère, que ce dernier ira juqu'au bout de ses rêves. Je me sens vide et perdue.. Je suis encore dans l'impossibilité d'accepter cette dure réalité. Quel malheur! Frérot, mon héros.
Tu as laissé ta femme, Nelsie et vos deux enfants Nahissa et Brian. Ils étaient si fiers de toi. Tu vas leur manquer pour toujours. Mais je sais qu'ils construiront, un jour, ce qui a été détruit et achèveront ce que tu avais commencé. Je te promets de les combler d'amour jusqu'à la fin de mes jours autant que tu m'en avais offert. Bonne route mon amour, mon frère adoré, ma "poupée", "my rock", mon modèle. A tous ceux partis avec toi, bonne route! Tu étais un être merveilleux, un grand au firmament des grands. Tu n'es pas parti, je ne veux pas y croire. Par tes projénitures, ton nom sera auréolé et tes oeuvres revivront grâce à elles. Comme notre père, tu leur a déjà tracé le chemin.
Je t'aime mon adorable Bob. La flamme de l'espoir ne sera jamais éteinte.
Ta petite sœur qui t'adore, Gardith.