zoom
Infographie AFP
La hausse historique du déficit de la France ne tient pas seulement à la crise mais aussi à la gestion du gouvernement qui
n'a pas maîtrisé suffisamment les dépenses pour compenser les baisses d'impôts, et notamment la création de «niches fiscales», estime la Cour des comptes.
Conséquence: réformes et règles budgétaires ne suffiront pas et «la dégradation des comptes, notamment dans le domaine social, est telle qu'il faudra aussi augmenter le produit des
prélèvements»... c'est-à-dire les impôts, avertit la Cour dans son rapport annuel publié mardi. Une solution à laquelle le gouvernement a pourtant promis de ne pas recourir.
La chute des recettes de l'Etat due à la crise est bien «la principale cause» de l'explosion du déficit public, passé de 3,4% du produit intérieur brut (PIB) fin 2008 à 7,9% fin 2009, explique la
Cour.
Mais selon ses calculs, la croissance des dépenses, hors plan de relance, et les baisses de prélèvements obligatoires sont responsables à hauteur d'environ
0,6% de cette «dégradation structurelle» du déficit en un an. Un calcul réfuté par Bercy, qui maintient dans sa réponse à la Cour que «la dégradation du déficit public en 2009 est
entièrement imputable à la crise».
Pour la Cour, ce déficit structurel est pourtant bien le résultat d'un «surcroît de dépenses non imputables» au plan de relance de l'économie et du non respect par le gouvernement de ses
engagements en matière d'encadrement des «niches fiscales».
Le gouvernement s'était en effet engagé à ce que chaque nouvelle «niche» - une dérogation fiscale synonyme de manque à gagner pour l'Etat - soit gagée par la suppression d'une dépense d'un
montant équivalent.
Or, d'après la Cour, le coût des nouvelles niches l'an dernier est supérieur de 1,2 milliard d'euros aux gain obtenus dans le même temps par ces suppressions.
Si l'on ajoute l'augmentation du coût de la myriade de niches déjà existantes, le manque à gagner pour l'Etat passerait ainsi de 65,9 milliards d'euros à 70,7 milliards en 2009, soit une hausse
de 7,3% (hors dérogations fiscales incluses dans le plan de relance).
Pire: un certain nombre de ces «niches» ne sont plus inscrites dans les budgets depuis 2006, mais «elles existent encore, atteignent 80 milliards d'euros et sont probablement en augmentation»,
s'inquiète la Cour. Si ces dispositifs avaient été maintenus dans la liste des niches, leur coût total aurait atteint 146 milliards d'euros en 2008.
Plus généralement, le rapport fustige l'incapacité de l'Etat à préserver ses recettes, quand il baisse certains impôts sans contrepartie. Exemple: le taux
de TVA réduit accordé à la restauration (trois milliards de pertes par an).
Au total, les recettes fiscales nettes de l'Etat diminueront d'environ six milliards d'euros en 2009 et de deux milliards de plus en 2010, hors réforme de la taxe professionnelle et hors plan de
relance, relève la Cour.
D'où «un emballement du déficit et de la dette au-delà de tous les repères» avec des «marges de
manoeuvre pour affronter d'éventuelles nouvelles crises considérablement amoindries». Et «la nécessité de mesures structurelles» de grande ampleur pour redresser les finances publiques.
Si la Révision générale des politiques publiques (RGPP) lancée par le gouvernement pour réduire les dépenses de fonctionnement «est une démarche ambitieuse», elle n'aboutit «au plan budgétaire
qu'à des résultats modestes», rappelle le rapport: 7,7 milliards d'euros ramenés à six après rétrocession aux fonctionnaires sous forme de revenus supplémentaires d'une partie des économies
réalisées.